Le PCF n'abandonne pas la bataille du rassemblement
Le Parti communistes français a invité mardi à la Bellevilloise les principales forces de gauche à débattre de la finance internationale afin de travailler les convergences au-delà de la question des candidatures.
« La question sur laquelle on ne parvient pas à s’entendre, c’est celle de l’Europe »
« La loi de séparation bancaire a été la première prise de conscience du fait que François Hollande avait déjà renoncé à faire de la finance son ennemi », estime d’emblée Eva Sas, députée EELV, soulignant les « combats communs » menés pendant cinq ans avec le frondeur Pascal Cherki (PS) et Nicolas Sansu (PCF), avant de dénoncer la pénétration des lobbys financiers au plus haut niveau de l’Etat. Il y a « de nombreux points de convergences », reconnaît la représentante de la France insoumise, Jeanne Chevalier. Mais « à moins de 60 jours de la présidentielle, la question sur laquelle on ne parvient pas à s’entendre, c’est celle de l’Europe, et elle a tout à voir avec l’argent et la puissance de la finance», mesure-t-elle, projetant la recomposition de la gauche à partir de la fracture née du « débat sur le Traité constitutionnel européen ». « Il faut que l’on se donne les moyens de négocier en se donnant un Plan B », rappelle-t-elle.
Ça tombe bien, Pascal Cherki, proche de Hamon, a voté contre ce traité. Mais il appelle à construire l’avenir plutôt que de regarder le passé, se remémorant au passage que seuls les communistes s’étaient prononcés contre le traité de Maastricht, à l’époque, avant que d’autres forces n’évoluent sur le sujet. La victoire de Benoît Hamon est, pour lui, le signal que la « page a été tournée » au PS. Pour le reste, il a répété, pour preuve de bonne foi, que le premier déplacement de Hamon s’est fait au Portugal, et non en Allemagne, et qu’il n’y aura pas de solution qui ne soit pas européenne. « Ce n’est pas une unité de façade qui permettra de battre Marine Le Pen, mais la mise au cœur du débat de la question sur laquelle la gauche a échoué, analyse Pierre Laurent. Et c’est sur la question de la finance qu’elle a échoué, comme elle échoue depuis trente ans à chaque fois qu’elle est confrontée à l’exercice du pouvoir. Il n’y aura donc pas de succès de la gauche si nous n’organisons pas la reprise du pouvoir sur la finance. »
« Rien ne se fera sans intervention populaire »
Les convergences semblent nombreuses dès lors que les participants abordent la question de la Banque centrale européenne, dont les économistes Frédéric Boccara et François Morin ont souligné l’importance. Même chose pour les conséquences du CICE et du crédit impôt recherche, ce gâchis d’argent public mis en lumière par la sénatrice PCF Marie-France Beaufils. Idem encore sur la question de la rémunération du capital bien plus haute que celle du travail. La proposition de COP fiscale, avancée par le député PCF Alain Bocquet, sur le modèle des grandes conférences environnementales mondiales a aussi un certain succès, repris par plusieurs intervenants à la tribune. Si nous avions commencé à « discuter d’un contrat commun avant de discuter des uns et des autres, cela aurait été plus facile », note Pierre Laurent. Les échanges entre forces de gauches, qui sont « toutes légitimes », doivent être « publics, clairs, transparents », ajoute-t-il. « Moi, je refuse que tout le monde soit otage d’un débat où il y a deux solutions : ou le ralliement, ou se tourner le dos et se retrouver après la catastrophe. Des millions de Français attendent de nous voir débattre », poursuit le secrétaire nationale du PCF. « Rien ne se fera sans intervention populaire », souligne aussi Françoise Davisse, réalisatrice du documentaire Comme des Lions, sur la lutte des salariés de PSA d’Aulnay-sous-Bois, dont l’usine a été fermée dans le seul but de faire encore plus de profits financiers. « Il ne suffira pas d’avoir un programme, des points d’accords, et les meilleurs propositions communes », poursuit-elle. La question, c’est aussi ce qu’il se passe après l’élection. Car si François Hollande a renoncé, c’est peut être parce que « plein de gens ont intégré l’idée que la lutte, ça ne marche pas, ça ne sert à rien ». Pour gagner, il faut créer du « rapport de force. Il faut bien autre chose que des élections », conclut-elle.
« Il faut dire aux gens que nous allons continuer le combat avec eux »
Un soir électoral ne pourra pas tout changer, reconnaît Pierre Laurent. Mais toutes « les grandes conquêtes sociales dans notre pays ont allié grandes mobilisations sociales et victoires électorales ». Et l’on ne part pas de rien, selon le communiste : il y a eu la mobilisation contre la loi travail, entre autres, et l’élimination de Manuel Valls après le renoncement de François Hollande. « Dans les entreprises, comme dans le processus électoral, il faut permettre aux citoyens, travailleurs, salariés, de reprendre les pouvoirs. Il faut dire aux gens que nous allons continuer le combat avec eux », insiste-t-il. « Il y a des obstacles pour construire dans le peu de temps qu’il nous reste des alliances, des rapports de forces électoraux. Mais si nous faisons dans tous le pays des débats de ce genre, si nous multiplions des Bellevilloises comme ce soir, si nous encourageons les forces citoyennes à entrer dans le débat sans rester spectateurs de la vie politique, nous pourrons lever des obstacles et changer la situation dans les huit semaines qui viennent. Car beaucoup de choses peuvent encore se jouer ! »
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