Brésil. Mondialisation des échanges et commerce de viande avariée
Deux grandes entreprises brésiliennes viennent d’être épinglées pour avoir mis en place un trafic de viandes avariées et de protéines végétales qu’elles faisaient passer pour de la chair de dinde. Plusieurs de ces produits ont été exportés et beaucoup auraient alimenté des cantines scolaires. Au-delà des individus compromis dans ce trafic, cette affaire illustre les dangers véhiculés par le libre échange mondialisé sur fond de dumping social généralisé, quand le monde du travail doit économiser sur tout, à commencer par la nourriture.
Cela se nomme désormais le scandale de la « carne fraca ». Cela se passe au Brésil. Deux firmes géantes spécialisées dans le commerce de la viande sont impliquées. Il s’agit de BRF propriétaire des marques Sadia et Perdigao ainsi que de JBS qui commercialise les marques Friboi, Seara et Frango. Elles ont commercialisé sur le marché national comme à l’exportation des viandes avariées mais aussi des protéines végétales qu’elles ont fait passer pour de la viande de dinde. Cela s’est fait via une organisation criminelle mais avec des complicités d’agents du ministère de l’agriculture brésilien rétribués par des pots de vins. Au total 37 personnes sont visées par l’enquête en cours dont deux hauts responsables des deux firmes mises en cause.
Des viandes ont été vendues après la date de péremption. Certaines étaient traitées à l’acide sorbique dans le but d’en améliorer l’apparence. Mais il s’agit d’un produit cancérigène injecté dans les morceaux de viande. Cette viande a été servie dans des cantines scolaires du Brésil et probablement dans de nombreux pays importateurs dont peut-être la France et d’autres pays européens. En France, la recherche du prix de revient le plus bas possible dans la restauration collective conduit à utiliser à plus de 75% des viandes importées, dont certaines en provenance d’Amérique du sud.
Au Brésil, ce trafic a permis de découvrir que ces firmes commercialisaient de la viande de dinde qui n’en était pas, puisque composée de protéines de soja, de fécule de manioc tandis que des morceaux de poulet contaminés à la salmonellose étaient vendus à l’exportation.
Limites et dangers de la course aux prix bas
Cette affaire, au-delà du fait qu’elle met la vie des consommateurs en danger, interpelle sur les dangers du libre. Elle intervient quelques semaines après que les chefs d’Etat et de gouvernement européens, comme une majorité de députés européens aient approuvé le CETA, cet accord de libre échange qui permet au Canada de multiplier par cinq ou six ses exportations de viande bovine en Europe alors que nous n’en n’avons pas besoin. Il intervient à un moment où ces mêmes chefs d’Etat et de gouvernement continuent de mandater la Commission européenne pour négocier avec les pays du Mercosur, dont le Brésil , un nouvel accord de libre échange qui se traduirait par plus de viande sud américaine vendue en Europe en faisant encore baisser des cours déjà trop bas sur le marché intérieur européen, suite à une augmentation en Europe de la production de viande bovine induite par l’abandon des quotas de production laitière en avril 2015.
L’Europe importe aussi trop de soja
Enfin, moins de 18 mois après la conférence de Paris sur le climat, il est peut-être temps pour les candidats en campagne de proposer mesures pour freiner le réchauffement climatique. Dans le domaine de l’élevage, les mesures les plus sages consistent à nourrir de les herbivores avec de l’herbe plutôt qu’avec du maïs complété en protéines végétales par du soja importé du Brésil. Car l’Europe et la France ne se contentent pas d’importer de la viande en provenance des pays tiers. Les pays de l’Union européenne consomment chaque année quelques 35 millions de tonnes de tourteaux de soja dont plus des deux tiers sont importés, principalement du Brésil et d’Argentine. L’Europe participe via ces importations à la déforestation de l’Amazonie et au retournement des prairies dans la pampa argentine, ce qui augmente considérablement les émissions de gaz à effet de serre.
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