Les incantations de Macron

afp
Retour  sur le meeting d’Emmanuel Macron qui s’est tenu samedi au Palais des Sports de Gerland, à  Lyon.
« Les bibliothèques seront ouvertes le dimanche ».  Je répète. « Les bibliothèques seront ouvertes le dimanche ». Le petit homme entre dans l’arène. Les bras en croix devant la foule. Miracle ! Plus de 8000 pèlerins ont pu trouver place dans l’enceinte qui ne peut en contenir que 6500. Miracle ! Le peuple, appelé à se mettre et à demeurer « En marche ! » jusqu’au printemps, a supporté de rester assis. Assis pendant une heure et quarante cinq minutes pour entendre cette prophétie : « Les bibliothèques seront ouvertes le dimanche ». 
Au cœur de l’enceinte, une tribune. Même design que celle qui, au siècle dernier, permit à un François Mitterrand de promettre une vie plus rose. La réverbération de type cathédrale (chapeau le sonorisateur!) donne du coffre à la voix du petit banquier en costume gris, qui veut se faire Général à la place du Général.
Le scénario messianique est léché. Le démon, c’est Hamon. Qui veut faire de nous des oisifs, en multipliant par deux le RSA. (Ah bon? Douxékilavussa ?) Oui, oui, le méchant Hamon, veut multiplier le RSA par deux ! Juré, craché, vomi ! Une honte ! Seul le travail rend libre (traduction pour nos lecteurs d’Outre-Rhin :« Arbeit macht frei »).
Alors, prenant son courage à deux mains, pour invoquer demain face à la force du passé qui habiterait le démon Hamon, le financier chausse son faciès d’exorciste et dégaine une autre prophétie : les budgets militaires seront multipliés. La foule exulte. Comblée. Gonflée d’espoir et d’envie. Seigneur ! En attendant l’ouverture des bibliothèques le dimanche, nous ne saurions trop conseiller à chacun des membres de cette foule galvanisée par le logo « En marche ! »  de cliquer sur ce lien pour méditer la notion de « logorrhée ».
Comme dans toute séance de catéchisme, le silence se fait à la lecture d’un passage littéraire, choisi pour nourrir quelques réfléxions. Le banquier, décidément voué à l’art du copier-coller pour briller, plaque en particulier un extrait des « Feuillets d’Hypnos » de René Char. Des écrits courts, haletants, que l’écrivain couchait sur le papier entre deux scènes de guerre vécues dans les années 40. Hypnotique. La foule retient son souffle.  Et toute la France est invitée à rester en apnée, en attendant de pouvoir lire enfin le programme d’Emmanuel Macron. Mars. Pas avant, mars. Et autant prévenir, il sera aussi court qu’ un Feuillet de Char. Pas 200 propositions, comme les autres. Non, non. Le monsieur qui a simplifié le Code du Travail, promet un projet politique simplifié pour gouverner la 5e puissance mondiale. Des idées simples, dans un corps de texte simple.
Chez ces gens-là, chez ces gens de l’anti-système, on n’écrit pas. On cause.
De l’autre côté du miroir (de devant l’écran de son smartphone pour être précis), l’ex-ministre de la Culture se souvient qu’elle a eu à se coltiner les diktats du banquier lorsqu’il gouvernait depuis Bercy transformant les carrosses ferroviaires en vulgaires autobus. Aurélie Filippetti, rédige 140 signes sur le fond bleu de son compte Twitter : « J’ai déjà rappelé que début 2015 il a lui-même rejeté puis amoindri mon amendement à sa propre loi pour ouvrir les bibliothèques ». Diable ! C’est court, mais c’est vrai que ça en dit long !
Laurence Mauriaucourt, Journaliste

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