Alternatives. À l’ordre du jour, la sortie du capitalisme

Une trentaine de militants issus d’horizons différents lancent Initiatives Capitalexit. Leur ambition est de produire un nouvel espace de débat collectif sur des contenus politiques de dépassement du système mortifère.

« Suite à la crise sanitaire, de multiples voix s’élèvent pour construire le monde d’après. Mais pour les classes dominantes, il ressemble furieusement au monde d’avant, explique l’historien Jean Sève, l’un des membres fondateurs d’Initiatives Capitalexit. Cette fragilisation de notre société est pour elle s une occasion rêvée de renforcer leur pouvoir et leur domination. » Dans un manifeste (1), les signataires, qui organisaient mardi 2 juin une conférence de presse, partagent le constat fait par le philosophe récemment décédé Lucien Sève et son fils et coauteur dans Capitalexit ou catastrophe (la Dispute, 2018) : le système capitaliste est entré en phase terminale. Ce système a permis, par la surexploitation de la nature et par la destruction des habitats de la faune sauvage, l’émergence de cette pandémie, tout en étant incapable d’apporter des protections sanitaires à la hauteur. La recherche sans limite du profit est ainsi totalement responsable du démantèlement des structures de santé. Le capitalisme produit aujourd’hui une crise globale de civilisation, constituée de multiples crises imbriquées les unes aux autres.

« Un mouvement général conduit par la classe des dépossédés »

« Il faut donc sortir de ce système, reprend Cyril Melot, doctorant en science politique à l’université Vincennes-Saint-Denis-Paris-VIII. Par le passé, l’accession démocratique par voie électorale à la direction de l’État a presque systématiquement été ­récupérée par le capital, amenant alors à une trahison des engagements pris devant le peuple », explique-t-il pour démontrer la forte capacité du capitalisme à faire accepter et intérioriser ses normes et sa doctrine aux forces qui pourtant le contestent. Selon lui, les différentes alternatives de terrain comme les coopératives ou les ZAD préfigurent de réels moyens d’émancipation. « Mais, souffrant d’un manque de coordination entre elles et de généralité politique, elles ne peuvent créer les conditions d’un rapport de force suffisant pour imposer une sortie générale du capitalisme », conclut-il.

« Notre objectif est de transformer cette prise de conscience en une dynamique inédite pour mettre fin à ce système, poursuit Nadia Salhi, syndicaliste CGT en charge de l’industrie et comptant également parmi la trentaine de signataires du manifeste d’Initiatives Capitalexit. Nous sommes déterminés à défier les capitalistes sur le terrain du pouvoir et dans toutes les dimensions de la vie sociale. » À l’ordre du jour donc, « une intense entreprise de conviction couplée à rentes initiatives pratiques pour enclencher un mouvement général d’appropriation de tous les pouvoirs et de toutes les puissances sociales conduit et piloté par la classe des dépossédés ».

Afin d’éviter la verticalité inhérente aux organisations traditionnelles, Initiatives Capitalexit a fait le choix de prendre la forme de collectifs thématiques à « haute compétence d’initiatives et de réflexions ». Pour l’instant au nombre de quatre, ils traitent de sujets variés comme repenser la démocratie pour qu’elle se libère de ses entraves capitalistes, créer une économie dépourvue d’actionnaires, élaborer un système de retraite juste ou encore redéfinir le rôle et la place du service public dans notre société. Mais ces ­collectifs auront vocation à s’étendre, tant dans les thématiques que par une plus forte et plus importante représentativité sociale.

(1) À retrouver sur le site http://capitalexit.org.
Sylvestre Rome et Pierre Chaillan

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