La grippe aviaire a déjà conduit à sacrifier 3,7 millions de canards en France

En 2017, c'est 9,7 millions de canards qui ne pourront pas entrer dans le cycle de production du foie gras. Photo : Georges Gobet/AFP

En 2017, c’est 9,7 millions de canards qui ne pourront pas entrer dans le cycle de production du foie gras. Photo : Georges Gobet/AFP

Alors que le virus H5N8 diffusé par les oiseaux migrateurs est présent de 22 pays de l’Union européenne et touche désormais 73 espèces d’oiseaux, la facture de l’épizootie s’alourdit de semaine en semaine pour les éleveurs et les gaveurs de canards à foie gras. 3,7 millions de palmipèdes ont déjà été abattus à titre préventif. Beaucoup d’exploitations familiales sont désormais en grande difficulté.

Les semaines passent et les difficultés n’en finissent pas de s’étendre pour les éleveurs, les gaveurs et les salariés qui travaillent dans la filière du foie gras dans le sud-ouest de la France. On soupçonne que le virus H5N8 a été transmis aux premiers élevages en décembre 2016 par les migrations d’oiseaux sauvages dont une des voies en direction de l’Afrique passe par les départements du sud-ouest. Un an plus tôt, les souches impliquées étaient surtout le H5N1 et le H5N2. Elles étaient présentes sous une forme faiblement pathogène dans la population aviaire. En revanche, le H5N8 présent depuis décembre 2016 en France est beaucoup plus virulent et mortel. Il emprunte les routes migratoires des oiseaux sauvages depuis l’Asie vers l’Europe puis l’Afrique. Ce H5N8 est très contagieux avec un gros impact sur les volailles avec un taux de mortalité très élevé.

Pertes financières immédiates

Dans une longue note publiée hier, le Comité interprofessionnel des palmipèdes à foie gras (CIFOG) indique que, à ce jour, « ce sont environ 9,7 millions de canards qui ne pourront pas entrer dans le cycle de production du foie gras en 2017. Les pertes financières immédiates sont estimées à plus de 250 millions d’euros pour l’ensemble de la filière ». Toujours selon le CIFO, « la production est à l’arrêt dans la quasi-totalité des Landes, du Gers et des Pyrénées Atlantiques ainsi que dans une partie des hautes Pyrénées et du Lot-et-Garonne qui n’est pas stabilisée. A ce jour, 3,7 millions de canards ont été abattus et on estime à 6 millions le nombre de palmipèdes qui ne seront pas mis en production suite aux mesures de dépeuplement pour tenter d’en finir avec le virus.  Ce drame humain et économique touche plus de 55% de la filière, qui fait vivre 30.000 familles et représente environ 100.000 emplois sur le territoire », ajoute le CIFOG.

Le chômage sera durable

Paysanne dans les Landes et vice présidente nationale du MODEF, Isabelle Daugreilh dispose sur sa ferme d’un atelier de gavage. Depuis des années, les canards lui étaient régulièrement fournis par la coopérative. Mais en 2016 la lutte contre le virus de grippe aviaire H5N1 lui avait valu un vide sanitaire qui avait duré de la mi-avril au début du mois de septembre. En ce début d’année 2017, les dégâts imputables au virus H5N8 sont beaucoup  plus importants. Selon Isabelle Daugreilh, il ne reste plus guère de canards vivants dans les élevages landais et on ne sait pas vraiment quand la production pourra reprendre.Tout est bouleversé dans la filière. Dans les unités d’abattage, le chômage technique sera durable et sur les exploitations familiales il n’y aura pas de revenu pendant des mois et des mois alors que le manque à gagner avait déjà été très important l’an dernier. Grâce au gavage,  Isabelle et son mari valorisaient sur la ferme leur production annuelle de mais grain. Faute de gavage on peut toujours vendre ce maïs à la coopérative, mais sa valorisation n’est pas la même d’autant que les cours sont plutôt bas cette année. Selon Isabelle, parmi les oiseaux morts cet hiver dans la région on a dénombré pas mal d’aigrettes, de palombes et de buses, ce qui signifie que le H5N8 est virulent  et ne touche pas que les palmipèdes. Dès lors, qu’il s’agisse d’un transport d’animaux en camions, voire même de plumes transportées par le vent qui a beaucoup soufflé depuis le début de l’année, l’épizootie est difficile à contrôler en dépit de la multiplication des abattages préventifs.

Une profession très fragilisée

Cette seconde année de grippe aviaire avec un virus différent du précédent est en train de fragiliser toute une profession. « Quand n’y a plus de production, il n’y a plus de trésorerie et les banques deviennent très regardantes quand il s’agit d‘accorder un prêts d’accepter un report d’anuités. Or il nous faudra de nouveau investir dans la salle de gavage et se mettre aux nouvelles normes après cet arrêt de production, voire construire de nouveau  bâtiments pour certains éleveurs si les pouvoirs publics décidaient d’un confinement permanent. Beaucoup d’exploitant familiaux ne pourront pas continuer dans ces conditions alors qu’ils font une production de qualité », déplore Isabelle Daugreilh.

Gérard Le Puill


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