Rupture conventionnelle collective, dix questions sur son mode d’emploi

PHOTO PASCAL GUYOT / AFP

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Pour contourner les licenciements économiques, l’ordonnance relative à la sécurisation des relations de travail a créé une nouvelle disposition : la rupture conventionnelle collective. Date d’application : dès qu’un accord collectif est passé et homologué par la Direccte. Ce qui est possible depuis le 4 janvier 2018.

A quoi sert la rupture conventionnelle collective ?

Elle permet aux entreprises de contourner le PSE – Plan de sauvegarde de l’emploi lorsqu’elles envisagent des suppressions d’emplois. Ca évite les procédures lourdes et coûteuses (pour les entreprises) des licenciements collectifs.

C’est ce que prévoit l’article 10 de l’ordonnance 3  qui dit bien que « un accord collectif peut déterminer le contenu d’une rupture conventionnelle collective excluant tout licenciement pour atteindre les objectifs… de suppression d’emplois. »

Attention, elle ne met pas fin au PSE qui reste une possibilité pour l’entreprise en cas de difficultés économiques entraînant des licenciements.

Un accord collectif doit donc la prévoir ?

En effet, un accord collectif de branche, à défaut d’entreprise  Notre article accords-de-branche-ou-dentreprise-lequel-s’impose-à-l’autre ? doit prévoir cette possibilité ainsi que les conditions et les modalités.

Mais il doit être validé par les Direcctes (directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi).

Quelles sont les conditions et les modalités ?

L’accord collectif doit déterminer – décret du 20 décembre 2017 :

– les modalités et conditions d’information du CSE (comité social et économique) ou, en attendant sa mise en place des IRP (délégués du personnel, CE, CHSCT),

– le nombre maximal de départs envisagés, de suppressions d’emplois associées et la durée de mise en œuvre de la rupture conventionnelle collective,

– les conditions à remplir par chaque salarié intéressé pour en bénéficier,

– les critères de départage entre les potentiels candidats au départ,

– les modalités de calcul des indemnités de rupture garanties au salarié qui NE PEUVENT ETRE INFERIEURES  AUX INDEMNITES  LEGALES DE LICENCIEMENT  Notre article indemnites-de-licenciement-cest-combien-depuis-la-publication-des-ordonnances ?

– les modalités de présentation et d’examen des candidatures au départ par rupture conventionnelle. Ces modalités doivent comprendre les conditions de transmission de l’accord écrit du salarié au dispositif prévu par l’accord collectif,

– des mesures de reclassement externe des salariés sur des emplois équivalents (formation, validation des acquis de l’expérience, reconversion, actions de soutien à la création d’activités nouvelles ou de reprises d’activités),

– le suivi de la mise en œuvre effective de l’accord portant rupture conventionnelle.

Précisons que les salariés protégés (élus CE, DP, CHSCT, CSE…) peuvent être candidats à la rupture conventionnelle collective sous réserve de l’autorisation de l’inspection du travail (Direccte).

Combien l’indemnité de rupture ?

Vous l’avez lu ci-dessus en capitales, l’indemnité de rupture conventionnelle ne peut être inférieure aux indemnités légales de licenciement, soit :

– ¼ de mois de salaire par année d’ancienneté pour les 10 premières années,

– 1/3 de mois de salaire par année d’ancienneté au-delà de 10 ans.

Le salaire retenu est déterminé selon (au choix de la valeur la plus favorable pour le salarié) :

– le tiers des 3 derniers mois complets (attention 2 mois et 29 jours = 2 mois) qui précèdent la notification de la rupture conventionnelle collective,

– ou le 1/12ème de la rémunération des 12 derniers mois complets (attention 11 mois et 29 jours = 11 mois) qui précèdent la notification de la rupture conventionnelle.

Il s’agit là d’un minimum et donc l’accord collectif entérinant la rupture conventionnelle collective peut prévoir une indemnité plus favorable.

Quels autres droits pour les salariés ?

Comme pour la rupture conventionnelle individuelle, les salariés bénéficient de l’assurance chômage notamment l’ARE ou l’AREF s’ils suivent une formation, sous réserve bien-entendu de remplir les conditions (inscription à Pôle emploi, recherche d’emploi etc.).

Par contre, la rupture conventionnelle collective étant déconnectée de tout motif économique, le salarié qui l’accepte n’a pas droit au bénéfice de la priorité de réembauche, ni à celui de contrat de sécurisation de l’emploi ou d’un congé de reclassement

Le salarié doit-il donner son accord ?

Oui ! La rupture conventionnelle collective demeure volontaire et ne peut être imposée. D’ailleurs le salarié intéressé doit donner son accord écrit. En effet, la rupture conventionnelle collective entraîne (si elle est validée) rupture du contrat de travail.

Comme indiqué ci-dessus, il est bien prévu que l’accord collectif portant rupture conventionnelle collective doit prévoir cette condition. Le refus du salarié ne peut en principe pas donner lieu à son licenciement ni même à une sanction.

Qui contrôle la validité de l’accord ?

Ce sont les Direcctes dont les coordonnées sont sur http://direccte.gouv.fr/ qui les valide ou pas, dans les 15 jours de leur transmission,  en s’assurant de sa conformité, que toutes les modalités ci-dessus ont été prévues, de la régularité de la procédure d’information du CSE ou des IRP en attendant la mise en service de ce dernier.

Dans ce délai, le CSE (ou les IRP) doit être informé de cette validation ainsi que les organisations syndicales représentatives signataires.

Attention, au-delà du délai de 15 jours, le silence de la Direccte vaut validation. L’employeur doit alors transmettre une copie de la demande de validation au CSE et aux organisations syndicales représentatives signataires.

La compétence des Direcctes est reconnue par décret du 20 décembre 2017

Un salarié peut-il contester la rupture de son contrat ?

Oui ! Tout salarié peut contester la rupture de son contrat de travail consécutive à une rupture conventionnelle collective. Il a 12 mois pour le faire à compter de la date d’effet de la rupture de son contrat de travail devant les prud’hommes.

Les salariés protégés (DP, DS,  élus CE, CHSCT et CSE) peuvent eux contester devant le juge administratif  l’autorisation de la Direccte de rupture de leurs contrats de travail.

Notez-bien : le délai de prescription pour contester toute rupture de contrat de travail (licenciements, rupture conventionnelle collective ou individuelle, mise à la retraite) est de un an (au lieu de 2 ans auparavant). Ce nouveau délai s’applique aux contestations déposées à partir du 23 septembre 2017 (date d’effet de l’ordonnance 3). Les contestations en cours à cette date continuent de bénéficier du délai de deux ans.

Quand peut-on conclure une rupture conventionnelle collective ?

Les accords collectifs prévoyant les ruptures conventionnelles collectives peuvent être conclus depuis le 23 décembre 2017. Mais pour qu’ils soient effectifs, ils doivent être homologués par les Direcctes.

Cette homologation ce fait par télétransmission de l’accord collectif à la Direccte comme indiqué dans le décret du 20 décembre 2017 selon les modalités précisées par arrêté du 29 décembre 2017 – J.O du 5 janvier 2018 fixant au 4 janvier 2018 la date de l’entrée en vigueur du dispositif de rupture conventionnelle collective.

Donc la porte est ouverte à l’homologation des accords collectifs prévoyant une rupture conventionnelles collectives depuis le 4 janvier 2018.

Quid des ruptures conventionnelles individuelles ?

La rupture conventionnelle collective ne met pas fin à la rupture conventionnelle individuelle qui peut être conclue entre un salarié en CDI (contrat à durée indéterminée) et son employeur. Conditions et modalités expliquées en cliquant sur le lien rupture conventionnelle individuelle ci-desssus.


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