Deux ouvrages entendent tirer un premier bilan de Macron à l’Élysée et dégager des pistes pour un ressourcement de la gauche.
L’un est porte-parole du PCF. L’autre est éditorialiste au magazine Alternatives économiques. Chacun, dans un livre, entend répliquer à l’offensive en cours, et construire un après-Macron, vu de gauche. Le premier, Olivier Dartigolles (1), s’inscrit dans une visée transformatrice ; le second, Philippe Frémeaux (2), se situe explicitement dans une social-démocratie revitalisée.
Tous deux se penchent sur le cas Macron et ce que dit, d’abord, l’élection inédite à la présidence de la République d’un homme sans parti. Dans ce retour préalable, Olivier Dartigolles distingue d’abord un homme « puissamment soutenu par le système, Macron a été le candidat choisi par les forces coalisées de tous ceux qui voulaient manifestement tout maintenir en place ». Philippe Frémeaux insiste, lui, sur le fait qu’une « large partie du salariat, l’ancienne base sociale de la gauche, n’est plus hostile au marché, à l’innovation, à l’entreprise, par réalisme ou conviction ». Et que « notre société est devenue plus tolérante aux inégalités, présentées comme le corollaire inévitable de la réussite individuelle ». Ce à quoi le responsable communiste objecte qu’il demeure, au sein des Français, cette « passion pour l’égalité ». La gauche, écrit-il, « n’est plus la gauche quand elle ne propose plus aucun imaginaire à se partager et transmettre ». Il réfute « l’opposition entre le peuple et l’oligarchie » portée par Jean-Luc Mélenchon, tandis que, justement, les premiers mois de Macron marquent, selon lui, « un retour tonitruant du clivage gauche-droite ».
Pour chacun, le moment est venu de dessiner l’avenir de la gauche
Après le constat, partagé, lui, de l’accroissement des inégalités, vient pour chacun le moment d’esquisser l’avenir de la gauche. Pour Philippe Frémeaux, « ce qui sépare la gauche réformiste, y compris la France insoumise, d’un Emmanuel Macron est moins une différence de nature qu’une différence de degré ». Car le pouvoir est pour lui « nécessairement dans un compromis et de gauche et de droite » entre « tenir l’agenda réformiste » et « éviter de casser la poule aux œufs d’or en cassant la dynamique d’une économie de marché ». Plus inquiet, Olivier Dartigolles relève que « nous sommes toujours dans une situation marquée par une forme de sous-estimation d’une opération de grande envergure », une révolution en cours – comme le titre du livre de Macron. Citant l’essayiste Bruno Latour, il fait sienne l’hypothèse qu’« une partie importante des classes dirigeantes est arrivée à la conclusion qu’il n’y aurait plus assez de place sur Terre pour tous les habitants », et qu’il est devenu inutile de faire comme si l’histoire allait continuer de « mener vers un horizon commun ».
Résolument dans une « société post-croissance à construire », Philippe Frémeaux prévient : « Une politique d’emploi inclusive ne peut se réduire à la distribution d’un revenu modeste à tous. » Frémeaux propose d’agir sur plusieurs leviers, soit « poser la question d’un État employeur en dernier ressort, poser celle du temps de travail, développer une vraie sécurisation des parcours et de nouvelles protections », afin de construire « une économie réellement soutenable, plus douce à ses membres, où l’égalité retrouvée étend la liberté de tous ». « Le problème est la manière dont la richesse produite est inégalement et injustement répartie », résume de son côté le responsable communiste, pour qui l’enjeu immédiat est de « faire davantage la liaison entre les luttes sociales et les luttes écologiques », préalable à un « projet alternatif pour des “communs” ». Chacun en est persuadé, l’« après-Macron » n’attend pas.
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