Cultiver les terres de Notre-Dame-des Landes après le « laisse béton » du gouvernement

De nombreux candidats à l’installation sont déjà sur place et certains ont créé des activités depuis plusieurs années. Photo : Loïc Venance/AFP

De nombreux candidats à l’installation sont déjà sur place et certains ont créé des activités depuis plusieurs années. Photo : Loïc Venance/AFP

Le plateau du Larzac s’était couvert de brebis à partir de 1981 quand François Mitterrand renonça à en faire un terrain de manœuvres militaires comme en avait décidé Giscard d’Estaing. A présent, après avoir échappé au bétonnage aéroportuaire, les terres agricoles de Notre-Dame-des-Landes pourraient être utilisées pour promouvoir des productions de proximité à quelques kilomètres de Nantes.

Plus de 1 600 hectares de terres agricoles et de zones humides ont été sauvés de l’artificialisation avec l’annonce faite hier par le gouvernement de renoncer à construire un nouvel aéroport sur la commune de Notre-Dame-des-Landes. En déclarant que « les conditions ne sont pas réunies pour mener à bien le projet de Notre-Dame-des-Landes », car « un tel projet ne peut se faire dans un contexte d’opposition exacerbée entre deux parties presque égales de la population», Edouard Philippe a fait deux aveux de taille. Le premier est une reconnaissance du fait qu’une forte opposition militante lui a fait renoncer à ce projet. Le second aveu, plus implicite, renvoie à la petite  commission qui avait recommandé au gouvernement de renoncer à cet aéroport. Au-delà de la valeur des arguments mis en avant par cette commission, on savait qu’elle avait été missionnée pour parvenir à la conclusion que le gouvernement lui suggérait de lui suggérer en retour. C’était le moyen le plus habile de contrer le résultat du référendum que le gouvernement de Manuel Valls avait organisé dans le seul  épartement de Loire Atlantique pour obtenir un « oui » à ce projet, alors qu’une consultation plus large des départements des régions Bretagne et Pays de la Loire aurait assuré la victoire du « non ».

Trêve hivernale et besoin de concertation

Edouard Philippe a fait savoir hier que le gouvernement veut faire évacuer, d’ici la fin de la trêve hivernale en mars prochain,  la « Zone à défendre » (ZAD) occupée depuis des années par des hommes et des femmes dont certains vivent sur place d’activités économiques qu’ils y ont créées. Parallèlement, certains paysans sont restés sur les fermes qui, comme toutes les terres de la ZAD, avaient été achetées par l’Etat pour permettre au groupe Vinci d’y faite entrer les engins de terrassement.
Dès avant la décision prise hier par le gouvernement, un collectif de syndicats et d’associations avait publié un communiqué sous le titre « Nous nous engageons pour l’avenir de la ZAD ». Leur souhait  est de voir naître un « projet pérenne, en cohérence avec les valeurs portées par le mouvement se constituer ». Ce collectif demande « une période de gel de la distribution institutionnelle des terres » préservées, suite à l’abandon du projet d’aéroport. Il souhaite aussi « que ces terres aillent à de nouvelles installations agricoles et non agricoles, officielles ou hors cadre, et non à l’agrandissement ».

Louer les terres à des porteurs de projets

Plusieurs associations membres de ce collectif ont tenu ont point de presse ce matin à Bagnolet, en Seine-Saint-Denis. C’était au siège national de la Confédération paysanne, membre de ce collectif. Selon les militants présents,  de nombreux candidats à l’installation sont déjà sur place et certains ont créé des activités depuis plusieurs années. On y pratique des cultures maraîchères. On fabrique aussi du pain, des pâtes et de la bière tandis qu’une bergerie est en construction, qu’une menuiserie et une construction de charpentes sont déjà en place. Le collectif qui s’est exprimé ce matin à Bagnolet voudrait que l’Etat – comme ce fut le cas sur le plateau du Larzac, quand le gouvernement renonça en 1981 au terrain d’entrainement militaire-  reste propriétaire des 1 600 hectares acquis à Notre-Dame-de-Landes et qu’il loue ces terres aux porteurs de projets dont certains ont déjà une activité sur place.
Sauver 1 600 hectares de terres agricoles est important. Sachant que ces terres sont proches du bassin de population qu’est l’agglomération nantaise, on peut faire d’une pierre deux coups : mettre en place une agriculture de proximité respectueuse de l’environnement et réduire la distance entre la fourche et la fourchette. Sur place, le 10 février prochain sous l’intitulé  « Pour un avenir sans aéroport», une journée de débats sera consacrée à l’avenir de la ZAD. Le gouvernement se grandirait en saisissant cette volonté de dialogue pour l’avenir de ce site occupé depuis des années. Mettre en place une agriculture de proximité en phase avec la lutte contre le réchauffement climatique serait une manière de sortir par le haut dans ce dossier difficile que des gouvernements successifs ont trainé des décennies durant.

Gérard Le Puill, Journaliste et auteur

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