Éducation. La contestation des réformes de l’université et du lycée prend de l’ampleur. La première coordination nationale s’est tenue, samedi, avec en vue la manifestation du 1er février.
«Sélection à l’université = précarité » « Non au Plan étudiants ! » Les slogans s’affûtent parmi les étudiants et les affichettes fleurissent sur les murs des facs. À quelques jours de la mobilisation nationale du 1er février contre la réforme de l’accès à l’enseignement supérieur, la mobilisation monte en puissance. Toulouse-Jean-Jaurès, Aix-en-Provence, université Paris-Sorbonne, Strasbourg, Paris-I Tolbiac… Une demi-douzaine d’assemblées générales, rassemblant des centaines d’étudiants et de professeurs, se sont déroulées la semaine dernière. Semaine qui s’est conclue, samedi, par la tenue de la première coordination nationale de l’éducation, à l’initiative d’une douzaine d’organisations (1), et le lancement d’un appel.
« La duplicité du discours gouvernemental »
Toute l’après-midi, dans l’amphi B de l’université Paris-III Sorbonne-Nouvelle, les représentants de plus de trente universités ont alerté sur les dangers du projet de loi « relatif à l’orientation et la réussite des étudiants » (ORE), actuellement en débat au Parlement, ainsi que sur les réformes envisagées du Bac et du lycée. Pour les participants, ces différents textes se complètent et vont permettre, via la nouvelle plateforme d’orientation Parcoursup et ses fameux « attendus », la mise en place d’un tri des bacheliers aux effets délétères sur les plus fragiles. « Des collègues se sont emparés de cette réforme pour mettre en place une sélection, a déploré le sociologue Romain Pudal, de l’université de Picardie. Dans Parcoursup, avec les attendus nationaux renforcés localement, on pousse non seulement à la censure mais aussi à l’autocensure des bacheliers, qui se sentent exclus de la culture qui s’y étale ou des critères qui y sont mis. » À ses yeux, avec ces réformes, « il ne s’agit pas de lutter contre les discriminations existantes, mais de prendre acte qu’elles existent et d’organiser le système selon les inégalités – et en les renforçant ». Beaucoup des intervenants ont souligné la « cohérence » des mesures envisagées pour le lycée et la fac, ainsi que l’idéologie qui les sous-tend. « Nous ne sommes pas face à une politique singulière de la ministre Frédérique Vidal, c’est une nouvelle étape après celle initiée par Valérie Pécresse, il y a dix ans », a souligné Jean-Louis Fournel, professeur à Paris-VIII et ancien président de Sauvons l’université ! Même analyse de la députée (LFI) Sabine Rubin, qui dénonce « la duplicité du discours gouvernemental qui masque un projet de société ancien d’une grande brutalité : la libéralisation et la marchandisation de l’éducation pour produire des salariés ou des self-made-men au service du marché ». Autant d’aspects que les opposants comptent mettre en avant pour convaincre un maximum d’étudiants, de lycéens et d’enseignants de se mêler de cette bataille.
Une bataille qui se jouera aussi sur le terrain juridique. Présent lors de cettecoordination nationale de l’éducation, le sénateur (PCF) Pierre Ouzoulias est revenu sur la démarche initiée par le groupe communiste, républicain, citoyen et écologiste (CRCE) au Sénat, qui a décidé de saisir cette semaine le Conseil d’État pour obtenir la suspension de l’arrêté mettant en place Parcoursup. De fait, l’ouverture de la plateforme, le 15 janvier, ainsi que la publication des « attendus » auxquels doivent répondre les bacheliers ont eu lieu alors même que le projet de loi ORE, censé donner une existence légale à ce nouveau processus d’orientation, n’a même pas encore été voté ! Il sera débattu au Sénat à partir du 7 février. « On est face à une violation flagrante des droits du Parlement », s’agace le sénateur. Qui prévient : « En forçant l’application de la loi sur la sélection à l’université avant son vote par le Parlement, le gouvernement prend le risque d’une crise majeure à la rentrée. » Pierre Ouzoulias va plus loin. Il reproche également au nouveau portail de demander aux candidats, en plus des informations habituelles, des données sur leur parcours extrascolaire : CV, activités sportives et artistiques, attestations de formations diverses… Des informations socialement marquées qui font craindre un écrémage en fonction des milieux sociaux et qui demeurent litigieuses sur le plan juridique. « Cette collecte d’informations, dont on ne sait pas précisément à quoi elles vont servir, contrevient à la loi informatique et liberté », assure le sénateur. Son argumentaire juridique sera mis à disposition pour être utilisé contre les conseils d’administration des universités, qui ont déjà mis en application cette loi non votée. Une arme de plus dans le combat qui s’engage.
Selon un texte adopté à l’unanimité (moins une voix), les membres de la première coordination nationale de l’éducation, qui s’opposent au projet de loi sur l’orientation des étudiants et aux projets de réforme du bac et du lycée, appellent lycéens, étudiants, parents d’élèves et personnels à se mettre en grève et à participer à la journée de mobilisation du 1er février à laquelle la FCPE a décidé de se joindre également. Ils appellent aussi à la mobilisation, le 6 février, ainsi qu’à la tenue d’assemblées générales dans tous les lycées et établissements d’enseignement supérieur.
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