Les thérapies « alternatives » font les frais d’une tribune au vitriol de la part de médecins et professionnels de santé. Comme eux, on peut s’alarmer d’une tendance qui tient à la fois du charlatanisme et du complotisme, et qui nuit gravement à la santé.
Ils sont 124, médecins et professionnels de santé, et ils y vont à l’arme lourde contre les médecines dites « alternatives » dans une tribune parue dans Le Figaro. Dénonçant le « charlatanisme », la « fake médecine », le caractère coûteux et dangereux de l’acupuncture, de la mésothérapie et de l’homéopathie, c’est incontestablement un appel au vitriol plutôt qu’un granule 15 ch.
Les mesures proposées sont, elles aussi, radicales. Les signataires demandent ainsi l’exclusion de ces disciplines « ésotériques » du champ médical, la radiation des médecins qui continuent à les promouvoir et le non-remboursement des médicaments ou soins liés à ces pratiques. Bref, de quoi faire hurler non seulement dans toutes les yourtes, mais aussi de surprendre une grande partie des Français. Car il est vrai qu’au pays de Descartes, la rationalité tangue un peu et que le nombre de patients qui recourent à ces « médecines » est en nette progression.
La croyance et l’efficacité
Pourtant, lorsque le texte parle de « pseudo-médecines à l’efficacité non prouvée », il est presque indulgent. Pour l’homéopathie, par exemple, il existe des dizaines d’études qui montrent que les fameux granules n’ont aucun principe actif, et que le seul effet possible est l’effet placebo. Ces études n’ont pas seulement des résultats, elles ont aussi des protocoles, une démarche scientifique.
Manipulation des grands laboratoires pharmaceutiques par du personnel stipendié, nous dira-t-on ? Après le scandale de l’affaire Servier, la rapacité, mais aussi le caractère meurtrier de certains groupes pharmaceutiques n’est plus à démontrer. Mais l’auteur de ces lignes tient à affirmer qu’il n’est pas rémunéré par les labos et que l’écriture de cet article n’est pas un appel de pied pour arrondir ses fins de mois. On signalera, au passage, que le laboratoire Boiron, un des leaders de l’homéopathie dans le monde, n’est pas exactement une sorte d’Amap autogérée, mais lui aussi un solide groupe industriel.
« Mais ça marche ! », entendra-t-on ici ou là. À vrai dire, un placebo a réellement une efficacité relative. Tout parent connaît l’efficacité de la câlinothérapie pour réconforter son enfant victime de petits tracas, il n’en demande pas pour autant une déduction fiscale.
Et que dire de la religion ? Sans même évoquer Lourdes, la prière, pratiquée par des milliards de fidèles depuis des millénaires, a aussi démontré son utilité sans pour autant relever de la Sécurité sociale. Il n’y a donc absolument aucune raison que le système de santé français prenne en charge financièrement ces pratiques. Au fond, là où pour la médecine traditionnelle, « On y croit parce que ça marche », on pourrait dire ici qu’avec les médecines alternatives, « Ça marche parce qu’on y croit ».
Complotisme
Au moins ce n’est pas dangereux, objectera-t-on. Et c’est vrai, tant que ces pratiques ne prétendent pas soigner des pathologies sérieuses. Quand on n’est pas vraiment malade, il n’y a guère de raisons d’absorber des médicaments qui ont, eux, une action, voire des effets secondaires déplaisants.
L’interdiction et la radiation des contrevenants proposées par l’appel poussent sans doute le bouchon un peu loin. En revanche, les signataires sont tout à fait fondés à écrire : « Produisant un discours à la limite du complotisme, entretenant la confusion dans l’esprit du public entre médecine scientifique et croyances, ces disciplines à la tête desquelles trône l’homéopathie font du mal bien plus que du bien ». Au Canada, l’essor des « vaccins homéopathiques », « aussi efficaces voire plus » que les vaccins traditionnels a tout de suite rencontré un gros succès : une belle épidémie de rougeole.
Vu les enjeux financiers, leur passé, leurs pratiques, il n’y a aucune raison de faire confiance aux grands labos pharmaceutiques. Mais la dimension totalement complotiste, parfois elle aussi intéressée financièrement, des anti-vaccins est intolérable.
Portée en France par tout une mouvance, notamment dans le sillage de l’eurodéputée Michèle Rivasi, le taux de couverture vaccinale tend à baisser dangereusement. Pourtant, en 2016, dernière année connue, 89.780 décès liés à la rougeole ont été recensés.
En 2000, ils étaient 750.000, et dans les années 1960, avant l’arrivée de la vaccination 6 (oui, 6 !) millions. C’est à cette aune qu’il faut apprécier les prouesses des anti-vaccins.
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