«En Guerre» sur deux fronts, à Cannes et à Agen : ma-gni-fique !

Photos AFP
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Chapeau bas à tous les figurants de Lot-et-Garonne, au comédien Vincent Lindon et au réalisateur Stéphane Brizé : le film «En Guerre» est un véritable poing levé, un manifeste pour celles et ceux qui luttent, à la vie à la mort, pour conserver leur emploi.

On l’attendait avec la plus vive impatience, ce film «En Guerre» de Stéphane Brizé, qui nous avait déjà tenus en haleine l’an passé, avec ses différents points de tournages en Lot-et-Garonne. Agen et Fumel étaient alors au cœur d’une belle aventure humaine, puisque le réalisateur et le comédien Vincent Lindon avaient décidé de s’entourer exclusivement de figurants amateurs pour mieux camper les ouvriers en grève. En guerre pour sauver leur emploi.

Dans un département sinistré sur le plan économique et social, un tel projet cinématographique prenait tout son sens.

Exceptionnel, magnifique

Et puis la pression montait de semaine en semaine à l’approche de la présentation à Cannes, le festival de tous les possibles, le rendez-vous le plus prestigieux de la planète cinéma. Le film serait-il à la hauteur ? Pendant qu’il était projeté hier au Palais des festivals, après que certains figurants lot-et-garonnais eurent eux-aussi foulé le fameux tapis rouge, deux projections en avant-première étaient organisées à Agen, à 18 heures, au multiplexe CGR et aux Montreurs d’images. Quelques dizaines de cinéphiles impatients avaient tenu à vivre en direct l’événement, en même temps que les membres du jury du 71e Festival. Alors, au bout de deux heures, que retenir ? Que le film est exceptionnel, magnifique, et qu’il dépeint avec une grande sincérité une lutte sociale, une vraie guerre que mènent les 1 100 ouvriers de Perrin Industrie pour arracher leur usine de la gueule de la mondialisation, qui détruit l’économie et les familles.

Conti, Molex, Perrin même combat

On pourra taxer le film de manichéisme, vilipender sa vision anti-actionnaires, pointer un réalisateur militant, chantre d’un cinéma de combat. Oui, peut-être. Et alors ? N’est-ce pas le projet ? Ne s’agit-il pas de vivre de l’intérieur, durant deux heures, la lutte extrême, la tension insoutenable que vivent des hommes et des femmes broyés par la machine à détruire les emplois, baladés par l’État et tous ceux qu’ils appellent à l’aide ? Le film traite sur le vif un combat pour l’emploi et la dignité, et donne davantage à voir et à comprendre que les reportages télé qui ne font que 2 minutes. Qui se souvient de l’issue du combat des Conti ? Qui se souvient des Molex ? De toutes ces usines fermées ici et ailleurs ? Désormais, pour eux, on se souviendra de Perrin. Stéphane Brizé, Vincent Lindon et tous les autres signent un coup magistral avec «En Guerre», dont on peut tous être fiers. Avec ses accents de vérité, il mérite au minimum la palme du grand public.


Le texte qui est ici joué, il vient des tripes

Le film «En Guerre» aurait tout autant pu être tourné en Lorraine, en Normandie, au Creusot… et dans toutes ces régions de France qui ont été dévastées par les fermetures d’usines ces trente dernières années.

Le tournage s’est effectué en Lot-et-Garonne, département qui a lui aussi payé cher la crise, qui a sacrifié bien des emplois, comme à Fumel. C’est d’ailleurs dans l’usine locale, qui a connu des heures noires, que se joue le film, du moins les images du site industriel bloqué par les ouvriers en grève. Eux, ce sont les «Perrin», ils ont été dupés par leurs patrons qui se sont gavés de profits et qui désormais veulent fermer boutique. Les 1 100 salariés vont tout faire pour sauver le site industriel, et sont menés par un leader campé par Vincent Lindon. Dans les rues d’Agen, dans les ateliers à l’usine, dans les réunions de concertation, il est entouré par des figurants qui connaissent leur rôle par cœur puisqu’ils le vivent chaque jour : l’avocat Laurent Bruneau fait dans le juridique, Patrick Ancelmetti ou Thierry Berton dans le journalisme, l’élu Bernard Barral dans le repreneur local, etc. Si le talent de Vincent Lindon est criant, accordons une mention particulière à tous ces figurants : filmés caméra sur l’épaule, ils sont «dans leur jus». Le texte qu’ils jouent, pas besoin de l’apprendre : il vient des tripes.

 


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