« Sans l’Huma, on est nus »

Souscription Entre nos lecteurs et le journal, c’est une histoire de cœur et d’engagement. Ces battants puisent dans leurs économies parfois modestes pour lire une information de qualité, qui donne du fil à retordre à la pensée unique.

Ils ne sont pas riches, les lecteurs de l’Humanité. Ce sont même, souvent, de toutes petites gens. De celles sur lesquelles le pouvoir crache beaucoup et avec mépris, ces temps-ci. C’est sans doute ce qui explique qu’ils soient toujours au rendez-vous quand il faut sauver leurs journaux l’Humanité et l’Humanité Dimanche. Quand il faut sauver leurs idées. Même si cela signifie, pour eux, se serrer la ceinture. Et ils n’ont pas l’intention de « laisser étrangler l’Humanité », comme Patrick Le Hyaric l’écrivait et le craignait dans les colonnes du journal, le 16 novembre 2018. Quand ils ont lu que le ­directeur de l’Humanité sonnait « le tocsin » pour leur journal, ils se sont mobilisés. Sans attendre. Et ils ont récidivé, fin janvier, lorsque la mauvaise nouvelle du passage devant le tribunal de commerce est tombée. Les lecteurs de l’Humanité, ce sont des battants.

« Je n’imagine pas commencer ma journée sans mon Huma dans ce monde irres­pirable » Jacqueline (93)

Et des battants qui racontent, en plus des sous qu’ils versent à la souscription, leurs raisons de soutenir nos titres. Comme Martine, qui livre, sur un joli papier vert, un « message personnel » : « L’Huma… des analyses, des arguments, un journal de classe qui parle de nous, du monde du travail qui peine et se bat. Sans lui, on parlerait tous comme TF1. Et l’espoir perdrait son âme. » La section du PCF de Périgueux, qui, dans le cadre de la préparation de son congrès, a validé une participation à la souscription, adresse un mot collectif, mais aussi un cri, avec son versement : « Nous avons aussi besoin de l’Humanité pour donner à penser le monde, mais aussi pour voir qu’il existe partout des initiatives originales et des résistances à ce monde qui ne tourne plus rond et qui crée une colère et un ressentiment énormes chez nos concitoyens. » Béatrice s’adresse au journal : « Chaque fois que j’ouvre notre journal, je vibre et retrouve ce moment sacré de ressourcement, oui, presque un instant de méditation », parce qu’elle se sent moins seule à défendre des convictions. À l’instar de ce lecteur, ou cette lectrice, qui avoue que la lecture « journalière » de l’Humanité « me réconforte. À la pensée de sa disparition, j’ai des battements de cœur ». Roland, lui, est plus radical… et drôle : « Imaginez qu’un jour l’Huma ne paraisse plus… Qu’est-ce que je fais ? Je me contente de l’information à la radio et à la télévision ? Ça ne va pas, non ! » Pierre Luo, lui, verse par « amour » du journal. Tout simplement.

Et l’Humanité et ses lecteurs, c’est effectivement, comme le notent si bien Pierre et ce lecteur anonyme, une histoire d’amour et de cœur. Une histoire de gens modestes qui ne se trompent pas sur l’utilité d’un tel outil. Et, quel qu’en soit le prix, pour eux. José a une toute petite ­retraite, mais donne 50 euros, et « c’est un grand sacrifice ». Yan « galère d’emplois précaires en domiciles précaires à Paris, mais je lis mon Huma chaque jour. Plus de chéquier. Voici un billet de 10 euros », et ces quelques mots, à eux seuls, disent toute la générosité de ces lecteurs. Quentin, un jeune lecteur de 19 ans, accompagne son versement d’un : « Merci pour votre travail, le journal, la Fête… » Il se déclare « fier de donner un peu de mon salaire à mon journal préféré ». C’est Jean-Louis qui a le mot de la fin : « Sans l’Huma, on est nus. C’est le seul journal qui nous donne le courage de lutter, nous fournit des arguments et du plaisir. » Il ajoute que sa participation vise aussi « à soutenir tout le personnel ».

Caroline Constant

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