« Il faut rentrer dans le rang, maintenant ! » par Daniel Amédro, ancien inspecteur d’académie

A propos de « SOS École Université, Pour un système éducatif démocratique »

NDLR de MAC: Merci à Daniel Amédro, ancien inspecteur d’académie pour cette note riche et éclairante. A diffuser massivement!

La société change. L’école aussi. De quels changements s’agit-il ? D’où proviennent-ils ? Comment les apprécier ? Quels lendemains nous promettent-ils ? Que vont-ils nous apporter ou nous imposer ? Quelles conséquences pour les élèves et les enseignants, dans la classe ? Que faire ?…

Cela fait beaucoup de questions, auxquelles, il faut bien le dire, il n’est vraiment pas facile de trouver des réponses, tant il est vrai que l’on a affaire à des réalités imbriquées, intriquées, enchevêtrées. « SOS École Université, Pour un système éducatif démocratique », coordonné par Martine Boudet aux éditions du Croquant (296 pages), s’y essaie, et – disons-le d’emblée – ne manque pas sa cible.

Le premier mérite de l’ouvrage est de rassembler les contributions d’un ensemble particulièrement varié d’acteurs du monde de l’éducation : professeurs des écoles, professeurs des lycées et collèges, universitaires, inspecteurs pédagogiques, formateurs en ESPE/INSPE, inspecteurs généraux, auxquels il faut ajouter deux ‘’intellectuels collectifs’’ : le ‘’Groupe Jean-Pierre Vernant’’[1] et ‘’Université volante’’[2]. Soit, dit Martine Boudet, « une équipe intercatégorielle, interdisciplinaire et intersyndicale ». Son autre mérite est de s’appuyer sur la vaste littérature publiée sur le sujet depuis bien des années[3] en braquant sur les sujets retenus, -grâce à la diversité des expertises des contributeurs, -un projecteur particulièrement …éclairant parce qu’il établit des liaisons pertinentes entre les résultats de la recherche, le travail de réflexion mené par un certain nombre de cadres du système, et les réalités – éventuellement déroutantes, difficiles à interpréter – des écoles et des établissements.

Pourquoi lancer un SOS ?

La formule a un petit côté stressant, convenons-en, mais j’ai le sentiment qu’elle est employée moins pour alerter sur une supposée situation désespérée de l’École et de l’Université que pour provoquer une réaction des acteurs de l’école, auxquels ce livre s’adresse en priorité. Situation pas désespérée, en effet, parce que même si les ‘’contre-réformes’’ pleuvent comme à Gravelotte, dont le sens n’est pas facile à établir, dont d’aucuns peuvent même se demander si elles s’inscrivent dans un projet d’ensemble, et auxquelles, d’ailleurs, il ne paraît pas nécessairement urgent d’opposer une réponse ferme et unie, en dépit de ces assauts donc, fort heureusement, le système éducatif, ce vaste ensemble d’écoles et d’établissements animé par plus d’un million d’agents, n’a pas (encore) véritablement perdu son caractère d’institution de la République, vouée à la lutte contre les inégalités.

Oui mais, disent les contributions particulièrement bien documentées réunies par Martine Boudet (voir, à cet égard, les notes infrapaginales n° 7, 8 et 10), il faut faire très attention : le processus de déconstruction, entamé presque ‘’tranquillement’’ depuis quelques décennies, marqué par « des vagues de modifications successives, dispersées, pas toujours coordonnées » (p. 50), systématisé et conforté dans l’indifférence générale par une stratégie de Lisbonne[4] ignorée du plus grand nombre, connait depuis quelques temps une intensification et une accélération dont il faut absolument prendre conscience….

 

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[1] Intellectuel collectif regroupant des universitaires de différentes spécialités.

[2] Collectif constitué de 600 membres, étudiants, militants, universitaires et chercheurs.

[3] Sans aucune prétention à l’exhaustivité, citons :

  • Christian Laval, L’école n’est pas une entreprise, La découverte, 2004 ;
  • Christian Laval, Francis Vergne, Pierre Clément, Guy Dreux, La nouvelle école capitaliste, La découverte, 2011 ;
  • Denis Kambouchner, Philippe Meirieu, Bernard Stiegler, Julien Gautier, Guillaume Vergne, L’école, le numérique et la société qui vient, Mille et une nuits, 2012 ;
  • Martine Boudet, Florence Saint-Luc (co-coord.), Le système éducatif à l’heure de la société de la connaissance, Presses universitaires du Mirail, 2014 ;
  • Grégoire Chamayou, La société ingouvernable, Une généalogie du libéralisme autoritaire, La Fabrique, 2018 ;
  • Wendy Brown, Défaire le dèmos, Le néolibéralisme, une révolution furtive, éditions Amsterdam, 2018 ;
  • Barbara Stiegler, « Il faut s’adapter », Sur un nouvel impératif politique, Gallimard, 2019

 


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Un budget encore plus modeste 

Le budget 2021 est en train de se dégonfler. La publication des « bleus budgétaires », c’est à dire des comptes détaillés des ministères, montre un budget de l’enseignement scolaire en faible évolution en 2021 et une revalorisation des enseignants plus faible qu’annoncée. Finalement ce ne sera pas 10 milliards, puis 1 milliard, puis 500 millions, puis 400 millions, le budget annonce plus modestement 141 millions pour le premier degré public et 173 pour le second. Dès septembre nous annoncions que « l’éducation n’est pas une priorité » gouvernementale. C’est maintenant officiel.

« L’année de la consolidation »

Pour le ministère, qui rédige son document budgétaire, 2021 est « le temps de la consolidation et d’évaluation des réformes engagées ». « L’année 2021 marque l’aboutissement de la mise en place des réformes pédagogiques engagées depuis le début du quinquennat, dont le point d’orgue est la mise en oeuvre du nouveau baccalauréat 2021, mais aussi le début de leur évaluation, les résultats devenant significatifs quatre années après la mise en oeuvre des  premières mesures à la rentrée 2017 ». Le document rappelle « la priorité donnée au premier degré » et la nécessité de « renforcer l’attractivité du métier de professeur ». « Le Grenelle de l’éducation qui doit se saisir de l’ensemble de ces questions sera ainsi structuré autour de trois axes : une meilleure reconnaissance des professeurs pour attirer, diversifier et conserver les talents, une plus grande coopération pour développer l’esprit d’équipe et des collectifs dédiés au suivi individualisé de l’élève ;  l’ouverture du champ des possibles pour transformer les pratiques, via le numérique notamment ». Enfin en 2021, l’Ecole sera « mobilisée pour ses valeurs. Continuer la lecture de Un budget encore plus modeste 

Mobilisation à Montauban de l’intersyndicale CGT-FO-FSU pour sauver la sécurité sociale

Guillaume Mangenot- FSU - Lina De Santi - CGT et Bernard Garcès - Solidaire 82.
Guillaume Mangenot- FSU – Lina De Santi – CGT et Bernard Garcès – Solidaire 82. Photo DDM, Hélène Spring.

L’intersyndicale CGT-FO FSU et Solidaires de Tarn-et-Garonne a organisé une journée d’études sur l’histoire des 75 ans de la Sécurité Sociale. En 1945, au lendemain de la guerre, le Gouvernement provisoire de la République Française a voté les ordonnances promulguant les champs d’application de la Sécurité sociale. Le principal initiateur de ce progrès social se nommait Ambroise Croizat, alors ministre du travail. Il disait déjà ce que les syndicalistes rappellent aujourd’hui : « Ne parlez pas d’acquis sociaux, parlez de conquis sociaux, parce que le patronat ne désarme jamais ». Pour Lina De Santi de la CGT : « La sécurité sociale a été mise en place par le comité national de la résistance pour protéger les travailleurs et leurs familles des aléas de la vie. Le principe étant chacun cotise selon ses moyens et reçoit selon ses besoins. Les gouvernements successifs n’ont eu de cesse de détricoter le système. Ils rendent les usagers responsables du ‘trou’ de la sécu alors que si les cotisations URSSAF patronales étaient recouvertes en totalité, il n’y aurait plus de trou. L’objectif de cette journée est l’édition d’une plaquette commune rassemblant les revendications de base ».

Pour Guillaume Mangenot de la FSU : « La Sécurité sociale a été attaquée au lendemain de sa création, nous élaborons un discours commun pour la défendre. Le choix sémantique du gouvernement et du patronat n’est pas anodin. Ils parlent de déficit, nous dénonçons un sous-financement, une casse de la protection sociale et nous engageons une reconquête pour imposer une nouvelle révolution sociale, pour rétablir les valeurs de solidarité, de partage, d’entraide, d’équilibre entre le patronat et le salariat. Le grand patronat a volé la sécurité sociale, les victimes demandent réparation ».

Pour Bernard Garcès de Solidaire 82 : « Nous sommes en plein dans l’actualité avec la création de la 5e branche dépendance et autonomie du projet de loi de finances de la Sécurité sociale présenté mercredi. Nous voulons rendre la gestion de la sécurité sociale aux salariés. J’ai ma carte d’électeur et je n’ai pas voté à la CPAM depuis 1983, les salariés ont perdu la main ».