Je venais à peine de sortir du stage d’état sur « Valeurs de la République et Laïcité » que la nouvelle de l’assassinat de Samuel Paty « tombait » aux infos et sur les réseaux. J’en oubliai presque la réunion qui m’attendait sur la construction d’une nouvelle école à Castelsarrasin, tellement l’annonce me bouleversait.
Les heures suivantes furent émaillées de ces détails macabres qui confirmaient le caractère effroyable de cet assassinat…
Ma nuit fut hachée par ces images barbares et irréelles, d’un autre age, d’un autre temps qui ne s’impriment dans le cerveau qu’au travers de fictions filmées ou livresques. Et pourtant?
Ce matin, l’horreur est toujours présente!
Bien des questions demeurent et renforce ma colère une fois la stupeur passée. La succession des faits interroge et le procureur de la république ce soir apportent des éclairages qui ne sont pas anodins tels que les appels téléphoniques reçus les jours précédents par le chef d’établissement, une vidéo sur les réseaux sociaux, une rencontre entre un parent et le professeur, une dépôt de plainte, la présence de l’assassin aux abords du collège… L’enquête confirmera tous ces éléments et j’espère que le CHSCT pourra analyser les conditions d’exercice dans cet établissement. Au delà de M. Samuel Paty, cela semble l’ensemble de personnels qui a été impacté en amont du lâche meurtre.
Mais alors quid des alertes nécessaires!
Où sont donc passés les schémas d’alerte pour le signalement de tels faits? Où se sont situées les réponses attendues? Qui a fait quoi ou plutôt qui n’a pas fait? Pourquoi les signaux ont-ils été minimisés? Pourquoi y a t-il eu des demandes de « modération » alors que le collègue animait ce cours dans le strict respect des programmes et préconisations pédagogiques? Pourquoi….
La liste des questionnements est malheureusement longue et ne permettra pas de revenir en arrière.
Ma colère est toujours présente et j’ai mal à la République!
Cette colère n’est pas prête de s’éteindre tant la dévalorisation de la fonction professorale par les gouvernements successifs porte en elle les germes de la violence, de la maltraitance subies chaque jour par des milliers d’enseignants. C’est devenu un métier déprécié, soumis à des injonctions permanentes tant administratives que pédagogiques. Un métier que l’on exerce plus que par défaut, ou dans le meilleur des cas pour une durée que l’on veut limitée. Les salles des profs sont atones à force de situations vécues au quotidien qui laissent un sentiment de culpabilité chez de nombreux enseignants. Sous payés, souvent méprisés, ils sont en première ligne au quotidien pour gommer les maux de notre société, offrir un temps ou les valeurs de la République prennent sens.
Alors sans pour autant faire l’amalgame avec la barbarie de ces actes, force est de constater qu’à force de coups portés à notre système scolaire, à celles et ceux qui le font chaque jour, la société imprime un sentiment diffus ou l’ouverture des consciences, la liberté d’expression, le droit à la différence, les choix personnels pourraient s’effacer derrière des dogmes à l’intégrisme sans cesse renouvelé. Ou est la République?
Je suis toujours en colère et dans le même temps, je puise dans mes 38 ans d’enseignement la force de continuer le combat contre l’obscurantisme et si je ne sais pas dessiner, ce sont mes mots et mes convictions qui sont mes armes.Je sais ne pas être seul et j’invite mes concitoyens-nes à relever la tête, à faire front face à la haine des uns alimentée par l’ignorance, l’inculture, la ségrégation de tant d’autres.
Demain, partout en France, des rassemblements auront lieu et ils rendront hommage à Samuel Paty.
Faisons en sorte qu’ils ne soient pas sans lendemain, que les réponses soient apportées à toutes nos interrogations, qu’ils soient le début d’une prise de conscience encore plus large, qu’ils soient le premier acte d’un appel à l’intelligence pour combattre les intégrismes et les idéologies haineuses.
Ici, plus qu’ailleurs je rends hommage à cet homme, a son travail et à son professionnalisme, avec une pensée solidaire pour les siens, pour ses collègues et ses amis-es, pour les personnels de ce collège et les élèves qui le fréquentent.
Je serais toujours en colère jusqu’à mon dernier souffle mais comme mes collègues je serais aussi toujours debout pour dire haut et fort:
« Enseigner c’est Résister! »
Dimanche 18 octobre, je serais sur la place des Fontaines à Montauban à 15h00
Maximilien Reynès-Dupleix, enseignant spécialisé en SEGPA
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