Le CETA est mauvais pour l’élevage et pour le climat
Mercredi, les parlementaires européens doivent approuver ou rejeter l’accord de libre échange négocié entre la Commission européenne et le Canada. Il se dit déjà qu’une majorité de députés votera le texte ruineux pour nos éleveurs à deux semaines du Salon de l’agriculture tandis que la Commission négocie des accords de même type avec une vingtaine de pays.
Le Parlement européen doit ratifier ou rejeter, ce mercredi 15 février, l’accord de libre échange négocié entre la Commission européenne et Canada, désormais connu sous le sigle CETA. Sur ce sujet, Cecilia Malmström, la commissaire européenne en charge du commerce à Bruxelles, s’est confiée au quotidien libéral français « L’Opinion » du 9 février.
« En commission, une très forte majorité de députés européens s’est exprimée en faveur de l’accord ; cela semble assez bien refléter le sentiment général du Parlement. Si tout se passe bien mercredi à Strasbourg, et que le Parlement canadien se prononce ensuite comme prévu avant la fin du mois de février, le CETA pourra entrer en vigueur provisoirement début mars. C’est l’accord le plus ambitieux que la Commission ait jamais négocié au nom des Etats membres », affirme la Commissaire. Voilà qui suppose une approbation par les groupes de la droite européenne et une bonne partie des sociaux-démocrates, comme c’est souvent le cas à Strasbourg.
On notera ici que Cecilia Malmström parle de faire « entrer en vigueur provisoirement début mars » cet accord qui doit pourtant être ratifié ultérieurement par les Parlements de tous les pays membres de l’Union. La Commission semble donc faire peu de cas du vote des Parlements nationaux. En France, c’est du côté des éleveurs et même des céréaliers que cet accord suscite les plus grosses craintes alors que ces secteurs agricoles sont déjà en difficulté. Une étude commune d’Agro Paris Tech, de l’Institut de l’élevage et de l’Institut technique du porc, montre que l’agriculture française a plus à perdre qu’à gagner dans cet accord. « Les produits agricoles et alimentaires représentent près de 10% des échanges en valeur avec le Canada. La balance commerciale agricole et alimentaire est actuellement excédentaire avec le Canada. Mais elle est tirée essentiellement par les boissons. A contrario, le déficit se creuse nettement en céréales et oléagineux et dans une moindre mesure en préparations de viandes et poissons ».
Importer du jambon canadien pour moins payer les cochons vivants
Concernant la viande porcine, l’étude nous dit ceci : « A la sortie des élevages, compte tenu des coûts d’approche à l’intérieur du Canada et pour le transport maritime, l’élevage porcin canadien n’a pas un avantage déterminant en termes de compétitivité coût. Mais c’est à la compétitivité des pièces de découpe qu’il faut s’intéresser en priorité (…) Notamment le jambon non transformé et ses produits d’élaboration pourraient, dans certaines conjonctures, être exportés du Canada vers l’UE, en raison d’un prix sensiblement plus bas sur les marchés nord-américain ».
Pour dire les choses plus clairement, le consommateur canadien mange moins de jambon que son homologue français. Son pays pourra donc nous exporter ces pièces nobles en priorité. Mais leur arrivée sur le marché français servira à faire chuter le cours du porc au marché au cadran de Plérin encore plus souvent que ces dernières années. On ruinera ainsi de nombreux éleveurs qui gagnent très difficilement leur vie depuis que l’embargo de la Russie pèse sur les cours de porc en France en fermant les débouchés pour le lard et autres bas morceaux .Le risque est d’autant plus grand que les volumes exportés sans droit de douane du Canada à l’Europe vont passer de 105.000 tonnes par an à 180.000 tonnes.
Le risque est identique concernant la viande bovine. Dans la cadre de la mise en place du CETA, le Canada va bénéficier d’un contingent de 70.000 tonnes d’exportations annuelles de viande bovine vers l’Europe sans droits de douanes. Le volume n’est pas énorme. Mais, là encore, le consommateur canadien mange surtout de la viande hachée issue des bas morceaux et l’élevage bovin canadien est, comme en France, très spécialisé en races à viande. Or ce sont aujourd’hui les pièces nobles issues de ces races qui peinent à trouver leur place sur le marché en France et en Europe car elles valent nettement plus cher que les autres pièces.
Ajoutons que la Commission est mandatée par les pays membres de l’Union, dont la France, pour négocier des accords de libre échange avec une multitude de pays et groupes de pays. « Nous négocions ou nous nous apprêtons à le faire avec une vingtaine de pays », précise Cecilia Malmström dans l’entretien déjà cité. L’étude des trois organismes déjà cités « estime entre 150.000 et 350.000 tonnes les importations supplémentaires de viande bovine à l’horizon 2025, touts choses égales par ailleurs».
Le bas coût de la main d’œuvre des abattoirs polonais
Il faut enfin analyser les conséquences de ces nouvelles exportations canadiennes sur notre marché intérieur au regard de ce qui se passe déjà au sein de l’Union européenne. A la faveur de la sortie des quotas laitiers, la Pologne a augmenté son troupeau de vaches et élève pour l’engraissement de plus en plus de jeunes bovins issus du croisement de deux races pour gagner du poids pour la boucherie. Dans les abattoirs polonais, le coût de la main d’œuvre est trois fois plus bas que dans les abattoirs français, même quand des « travailleurs détachés » sont embauchés chez nous. Du coup, l’Italie est devenue le premier client de la Pologne. D’après les douanes italiennes, en 2015, les carcasses de jeunes bovins élevés en Pologne coûtaient 26% de moins que les carcasses de jeunes bovins français, ce qui a fait reculer les exportations française en Italie quand augmentaient celles de la Pologne.
Le contexte étant celui là, tout nouvel accord de libre échange faisant entrer plus de viande des pays tiers sur le marché européen avive la concurrence et aggrave la tendance baissière des cours payés aux producteurs, sans même bénéficier aux consommateurs. Ajoutons que toutes ces importations inutiles ont aussi un double effet pervers que nos décideurs politiques occultent de manière délibérée. Elles augmentent le bilan carbone de chaque kilo de viande consommé en Europe en allongeant la distance entre la fourche et la fourchette , mais aussi en poussant à la concentration des élevages dans des grandes bâtiments dont la construction est très émettrice de CO2. Ensuite, les animaux sont surtout nourris au grain ne sortent plus pour aller brouter l’herbe des prés. Voilà comment l’Europe tourne le dos aux engagements pris à Paris lors de la Cop21, tandis que le gouvernement français reste muet sur le sujet. Voilà aussi qui situe la responsabilité de chaque député européen au moment de voter pour ou conte le CETA le 15 février.
« En commission, une très forte majorité de députés européens s’est exprimée en faveur de l’accord ; cela semble assez bien refléter le sentiment général du Parlement. Si tout se passe bien mercredi à Strasbourg, et que le Parlement canadien se prononce ensuite comme prévu avant la fin du mois de février, le CETA pourra entrer en vigueur provisoirement début mars. C’est l’accord le plus ambitieux que la Commission ait jamais négocié au nom des Etats membres », affirme la Commissaire. Voilà qui suppose une approbation par les groupes de la droite européenne et une bonne partie des sociaux-démocrates, comme c’est souvent le cas à Strasbourg.
On notera ici que Cecilia Malmström parle de faire « entrer en vigueur provisoirement début mars » cet accord qui doit pourtant être ratifié ultérieurement par les Parlements de tous les pays membres de l’Union. La Commission semble donc faire peu de cas du vote des Parlements nationaux. En France, c’est du côté des éleveurs et même des céréaliers que cet accord suscite les plus grosses craintes alors que ces secteurs agricoles sont déjà en difficulté. Une étude commune d’Agro Paris Tech, de l’Institut de l’élevage et de l’Institut technique du porc, montre que l’agriculture française a plus à perdre qu’à gagner dans cet accord. « Les produits agricoles et alimentaires représentent près de 10% des échanges en valeur avec le Canada. La balance commerciale agricole et alimentaire est actuellement excédentaire avec le Canada. Mais elle est tirée essentiellement par les boissons. A contrario, le déficit se creuse nettement en céréales et oléagineux et dans une moindre mesure en préparations de viandes et poissons ».
Importer du jambon canadien pour moins payer les cochons vivants
Concernant la viande porcine, l’étude nous dit ceci : « A la sortie des élevages, compte tenu des coûts d’approche à l’intérieur du Canada et pour le transport maritime, l’élevage porcin canadien n’a pas un avantage déterminant en termes de compétitivité coût. Mais c’est à la compétitivité des pièces de découpe qu’il faut s’intéresser en priorité (…) Notamment le jambon non transformé et ses produits d’élaboration pourraient, dans certaines conjonctures, être exportés du Canada vers l’UE, en raison d’un prix sensiblement plus bas sur les marchés nord-américain ».
Pour dire les choses plus clairement, le consommateur canadien mange moins de jambon que son homologue français. Son pays pourra donc nous exporter ces pièces nobles en priorité. Mais leur arrivée sur le marché français servira à faire chuter le cours du porc au marché au cadran de Plérin encore plus souvent que ces dernières années. On ruinera ainsi de nombreux éleveurs qui gagnent très difficilement leur vie depuis que l’embargo de la Russie pèse sur les cours de porc en France en fermant les débouchés pour le lard et autres bas morceaux .Le risque est d’autant plus grand que les volumes exportés sans droit de douane du Canada à l’Europe vont passer de 105.000 tonnes par an à 180.000 tonnes.
Le risque est identique concernant la viande bovine. Dans la cadre de la mise en place du CETA, le Canada va bénéficier d’un contingent de 70.000 tonnes d’exportations annuelles de viande bovine vers l’Europe sans droits de douanes. Le volume n’est pas énorme. Mais, là encore, le consommateur canadien mange surtout de la viande hachée issue des bas morceaux et l’élevage bovin canadien est, comme en France, très spécialisé en races à viande. Or ce sont aujourd’hui les pièces nobles issues de ces races qui peinent à trouver leur place sur le marché en France et en Europe car elles valent nettement plus cher que les autres pièces.
Ajoutons que la Commission est mandatée par les pays membres de l’Union, dont la France, pour négocier des accords de libre échange avec une multitude de pays et groupes de pays. « Nous négocions ou nous nous apprêtons à le faire avec une vingtaine de pays », précise Cecilia Malmström dans l’entretien déjà cité. L’étude des trois organismes déjà cités « estime entre 150.000 et 350.000 tonnes les importations supplémentaires de viande bovine à l’horizon 2025, touts choses égales par ailleurs».
Le bas coût de la main d’œuvre des abattoirs polonais
Il faut enfin analyser les conséquences de ces nouvelles exportations canadiennes sur notre marché intérieur au regard de ce qui se passe déjà au sein de l’Union européenne. A la faveur de la sortie des quotas laitiers, la Pologne a augmenté son troupeau de vaches et élève pour l’engraissement de plus en plus de jeunes bovins issus du croisement de deux races pour gagner du poids pour la boucherie. Dans les abattoirs polonais, le coût de la main d’œuvre est trois fois plus bas que dans les abattoirs français, même quand des « travailleurs détachés » sont embauchés chez nous. Du coup, l’Italie est devenue le premier client de la Pologne. D’après les douanes italiennes, en 2015, les carcasses de jeunes bovins élevés en Pologne coûtaient 26% de moins que les carcasses de jeunes bovins français, ce qui a fait reculer les exportations française en Italie quand augmentaient celles de la Pologne.
Le contexte étant celui là, tout nouvel accord de libre échange faisant entrer plus de viande des pays tiers sur le marché européen avive la concurrence et aggrave la tendance baissière des cours payés aux producteurs, sans même bénéficier aux consommateurs. Ajoutons que toutes ces importations inutiles ont aussi un double effet pervers que nos décideurs politiques occultent de manière délibérée. Elles augmentent le bilan carbone de chaque kilo de viande consommé en Europe en allongeant la distance entre la fourche et la fourchette , mais aussi en poussant à la concentration des élevages dans des grandes bâtiments dont la construction est très émettrice de CO2. Ensuite, les animaux sont surtout nourris au grain ne sortent plus pour aller brouter l’herbe des prés. Voilà comment l’Europe tourne le dos aux engagements pris à Paris lors de la Cop21, tandis que le gouvernement français reste muet sur le sujet. Voilà aussi qui situe la responsabilité de chaque député européen au moment de voter pour ou conte le CETA le 15 février.
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