Les ambassadeurs de 54 pays africains à l’ONU ont exigé vendredi, dans un communiqué au langage très fort, « rétractations » et « excuses » au président américain Donald Trump après ses propos rapportés la veille sur l’immigration en provenance de « pays de merde ».
« Racistes », « abjects » et « blessants », les propos de Donald Trump sur l’immigration en provenance de « pays de merde » ont provoqué un torrent d’indignation à travers le monde qui ne tarissait pas dans la nuit de vendredi à samedi, l’Afrique entière réclamant des excuses. D’une même voix, dans un langage d’une rare dureté, les 54 ambassadeurs du groupe africain à l’ONU ont exigé une « rétractation » au président américain, condamnant des « remarques scandaleuses, racistes et xénophobes ». Ils se sont dit préoccupés par la tendance « grandissante » de l’administration Trump « à dénigrer le continent, et les gens de couleur ».
Le Sénégal et le Bostwana ont convoqué chacun l’ambassadeur américain. Le gouvernement haïtien a lui dénoncé des propos « odieux et abjects » qui, s’ils étaient avérés, seraient à tous égards « inacceptables car ils reflèteraient une vision simpliste et raciste ».
Comme souvent, c’est via Twitter que le président américain a réagi à cette nouvelle polémique qu’il a lui-même suscitée et qui le met en difficulté au moment où il tente de trouver un compromis au Congrès sur le dossier sensible de l’immigration. « Le langage que j’ai utilisé lors de la réunion était dur mais ce ne sont pas les mots utilisés », a affirmé le milliardaire dans une formule alambiquée.
Quelques minutes plus tard, le sénateur démocrate Dick Durbin, présent lors de la réunion, assurait pourtant que le président avait bien utilisé « plusieurs fois » l’expression injurieuse. « Les mots utilisés par le président tels qu’ils m’ont été rapportés directement par ceux qui ont participé à la rencontre n’étaient pas « durs », ils étaient abjects et répugnants », a ajouté en écho le sénateur républicain Jeff Flake, un conservateur opposé à Donald Trump.
Sollicitée jeudi soir sur ces propos, la Maison Blanche n’avait pas contesté ou démenti, se bornant à souligner que M. Trump se battrait « toujours pour le peuple américain ».
Au coeur des débats de la réunion désormais célèbre de jeudi à la Maison Blanche: la régularisation de centaines de milliers de clandestins arrivés jeunes aux Etats-Unis, et dont le statut temporaire accordé sous Barack Obama a été supprimé en septembre. Quand Donald Trump a abrogé le programme Daca, qui a permis à 690.000 jeunes sans-papiers de travailler et d’étudier en toute légalité, il avait donné jusqu’à mars au Congrès pour trouver une solution pérenne pour ces clandestins connus sous le nom de « Dreamers » (Rêveurs). Mais il a lié toute régularisation à son projet de mur à la frontière avec le Mexique, auquel les démocrates se sont jusqu’à présent opposés fermement.
Outre la réalisation de cette promesse de campagne, M. Trump exige aussi la suppression de la loterie annuelle de cartes vertes et une réforme de l’immigration légale pour réduire le rapprochement familial.
« Pourquoi est-ce que toutes ces personnes issues de pays de merde viennent ici ? », a demandé le président Trump lors des discussions jeudi, selon le Washington Post, qui cite plusieurs sources anonymes.
Selon elles, M. Trump faisait référence à des pays d’Afrique ainsi qu’à Haïti et au Salvador, expliquant que les Etats-Unis devraient plutôt accueillir des ressortissants de la Norvège. « Pourquoi avons-nous besoin de plus d’Haïtiens ? », aurait encore demandé le président. Vendredi, il a tenté de donner une version différente de ses propos. « Je n’ai jamais dit quelque chose d’insultant sur les Haïtiens outre le fait que, et c’est une évidence, Haïti était un pays très pauvre et en difficulté », a-t-il lancé. Le Haut commissariat de l’ONU pour les réfugiés a déploré des propos « racistes », « choquants et honteux ». L’ancien vice-président démocrate Joe Biden a lui aussi donné de la voix. « Ce n’est pas comme cela qu’un président devrait parler et se comporter. Mais surtout, ce n’est pas comme cela qu’un président devrait penser ». En Amérique latine, le président vénézuélien, Nicolas Maduro, a appelé à la solidarité avec les pays « agressés » par Donald Trump. Cuba a condamné vendredi les déclarations « racistes, dénigrantes et grossières » du président américain Donald Trump, après ses propos rapportés la veille sur l’immigration en provenance de « pays de merde ». L’île « condamne fermement les déclarations racistes, dénigrantes et grossières des Etats-Unis sur Haïti, le Salvador, les états africains et les autres continents », a déclaré lors d’un journal télévisé le ministère cubain des Affaires étrangères. « Ces déclarations pleines de haine et de mépris suscitent l’indignation du peuple cubain », a-t-il ajouté, rappelant notamment l’importance du rôle joué par les Africains et les Haïtiens dans l’histoire de Cuba.
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