Éducation. Menace sur les lycées professionnels

Photo AFP.

Les syndicats de la filière ont appelé jeudi 27 à la grève. Dans leur viseur : le projet de réforme de Jean-Michel Blanquer, qui réduit à la fois les horaires et les besoins en postes tout en accentuant la concurrence avec l’apprentissage.

Parmi les 955 bacheliers – selon les chiffres officiels – toujours sans affectation dans Parcoursup, on dénombre « seulement » 60 titulaires du bac général. Ainsi s’exprimait mardi Frédérique Vidal, la ministre de l’Enseignement supérieur, trahissant le mépris dans lequel sont considérés les bacs technologiques et professionnels. Pourtant, son collègue Jean-Michel Blanquer clame à qui veut l’entendre qu’il veut « revaloriser la voie professionnelle » en la réformant. Pas de bol : c’est justement contre cette réforme que l’intersyndicale (Snuep-FSU, Snep-FSU, CGT Éduc’Action, SUD éducation, Snalc…) de l’enseignement professionnel ont appelé jeudi 27septembre à une journée de grève.

Selon elle, les mesures présentées en mai et prévues pour entrer en vigueur à la rentrée 2019 s’attaquent à la double finalité qui constitue le point fort de cette voie : permettre aux élèves d’accéder à une insertion professionnelle dès le bac obtenu, ou bien de poursuivre leurs études au-delà de celui-ci. Or, cette réforme déprofessionnalise la voie pro en réduisant le volume des enseignements professionnels (- 4,5 % selon les grilles horaires en projet) et, surtout, en repoussant le véritable choix de métier. En seconde, on opterait uniquement pour de grandes « familles » de métiers. « Ces secondes à “champs professionnels” vont supprimer un an de réelle formation professionnelle », indique Bérénice Courtin, du Syndicat national unitaire de l’enseignement professionnel (Snuep-FSU). Sur quatre ans à sa création en 1987, passé à trois ans en 2011, le bac pro se ferait désormais en… deux ans.

900 postes d’enseignants ciblés dès la rentrée prochaine

Dans le même temps, on réduit aussi le volume des enseignements généraux. Et pas qu’un peu, puisque les horaires baisseraient de 13 % en moyenne, certaines matières étant encore plus affaiblies que les autres comme les maths/sciences, qui perdent 16 % de leur volume horaire, et la langue vivante 2, qui perd… 42 % ! Cette fois, c’est bel et bien la possibilité de poursuivre des études supérieures qui est sapée, alors qu’on a observé ces derniers mois que les bacheliers professionnels sont déjà largement désavantagés par la plateforme Parcoursup. Et ce n’est pas le vague projet d’année passerelle, destinée à préparer uniquement une poursuite en BTS, qui compensera cette différence de traitement.

« Nous avons calculé que la seule baisse des volumes d’enseignement permettra de supprimer 900 postes dès la rentrée prochaine », dénonce Bérénice Courtin. Soit, pour la seule voie professionnelle, près du tiers des 2 600 postes que le ministère prévoit de supprimer en 2019 dans l’ensemble du secondaire, du collège au lycée, toutes filières confondues. Du coup, une question devient légitime : la réforme Blanquer n’a-t-elle pas ces réductions massives de postes pour finalité première ? Première, mais pas unique. En visant l’intégration dans tous les lycées pros d’unités de formation par l’apprentissage (UFA), la réforme vise aussi à mettre en concurrence bac pro et apprentissage. Résultat prévisible : l’apprentissage ayant de tout temps la préférence des employeurs, puisqu’ils le financent et en déterminent les contenus, le bac pro va vite en devenir le parent pauvre, dans tous les sens du terme. Les meilleurs profils seront « recrutés » pour l’apprentissage, sans préciser que 40 % des apprentis subissent des ruptures de contrat et se retrouvent sans diplôme… Les autres ? Ils fourniront un bataillon de salariés précarisés.

Olivier Chartrain

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