Durant de longues années, il faut bien admettre que l’intervention citoyenne en matière de santé s’est « bornée » à la défense des structures publiques de santé, hôpitaux et maternités. Les résultats sont contrastés et les luttes n’ont de cesse de se multiplier rejoignant en cela les batailles emmenées par les personnels soignants ou non. Le libéralisme érigé en doctrine exclusive, et son bras armé l’ARS ont orchestré une casse du service public de santé sans concession ou si peu.
Les élus locaux ont souvent été désemparés face à cela et ils sont encore peu nombreux à s’engager dans les luttes existantes. En revanche, de mandats en mandats, ils mesurent bien la déliquescence de la continuité des soins sur leur commune, leur territoire avec le départ inexorable des médecins qui ne trouvent pas de remplaçants pour leur cabinet et des administrés qui leur en font reproche.
De l’argent public pour des pratiques privées.
Alors pour combattre les déserts médicaux naissant ou avérés, ils se sont engagés dans une réponse modélisée sous la forme de créations de Maison de Santé Pluridisciplinaire (MSP) qui par définition reste un modèle économique libéral soumis aux règles du genre et à la bonne volonté ou non des praticiens qui s’inscrivent dans ce type de projet. Des centaines de milliers d’euros avec ou sans subventions sont ainsi versés dans des structures (neuves ou rénovées) pour satisfaire l’installation de cabinets de médecins, d’infirmières, de kinés… ou autres ! Des plateaux techniques flambants neufs voient le jour avec l’approbation des autorités qui valident un peu plus la dérive marchande de l’accès à la santé.
En Occitanie, ce sont plusieurs dizaines de MSP, ou de projets de MSP qui jalonnent le territoire et qui répondent aux besoins immédiats de soins mais aussi aux besoins électoraux des élus locaux.
Pour autant, la réponse n’est pas à la hauteur de l’enjeu.
Plusieurs MSP sont restées des « coquilles vides » ou sont appelées à le devenir. Les médecins pressentis pour s’engager ont rechigné à s’installer sur des territoires à « faible potentiel d’attractivité ». De nombreux citoyens engagés précédemment sur l’accès à la santé ont vite compris le danger de cet unique modèle libéral et rappellent aujourd’hui combien la Santé est un droit fondamental qui passe par la mise en œuvre de la puissance publique au travers de nouveaux projets de santé territoriaux.
Agrégés en collectifs, mouvements, associations, c’est donc à une irruption citoyenne dans ce domaine à laquelle nous assistons aujourd’hui. Une intervention bienvenue qui vient prendre le relais d’élus désemparés découvrant alors une alternative en la création de Centres de Santé Public bien loin des dispensaires d’hier. Des Centres de Santé qui présentent l’intérêt d’une pratique médicinale collective au travers d’équipes de salarié-es œuvrant non pour leur propre compte mais pour un projet de santé en continuité avec les hôpitaux et maternités de proximité. Des CSP soutenus par un projet de santé incluant souvent la dimension de prévention, de médecine sportive voire de complément à la médecine du travail.
Les citoyens-nes ont bien saisi la richesse de la mise en œuvre de ces projets de CSP et donc l’enjeu sociétal dans des territoires ou le mieux vivre ne veut pas dire faire des kilomètres pour se soigner. Ils l’ont saisi bien plus vite que les élus locaux et ce malgré une opposition frontale des autorités telle l’ARS ou l’ordre des médecins. C’est un tout autre schéma qui se dessine alors, portés par la volonté de collectifs qui ne cessent de s’élargir, bien au-delà des tenants traditionnels du service public.
Un espoir pour nos territoires.
La réflexion mise en place publique en est encore à ses balbutiements, mais nous pouvons noter que plusieurs élus (de communes, de départements ou de la région) s’engagent à leur tour et que ces associations porteuses d’idées et de projets émergent dans la région. De plus, les citoyens qui les composent entretiennent un lien viscéral avec la défense des structures de santé publiques existantes qui sont mises à mal par les choix gouvernementaux successifs.
C’est donc une intervention citoyenne constructive, non repliée sur des acquis qui devient une force de propositions, d’informations, qui émerge dans le paysage politique, dans le débat public pour proposer une alternative crédible avec l’objectif de garantir à toutes et tous un droit à la santé pérenne dans nos campagnes, nos villes et nos villages.
Maximilien Reynès-Dupleix
Président et porte-parole du collectif 3CSP82