Par Patrick Le Hyaric, directeur de l’Humanité. Nous sonnons le tocsin pour l’Humanité. Nous le faisons en redoutant que la répétition des alertes puisse laisser penser qu’une fois encore « nous nous en sortirons ». Rien n’est moins sûr.
Depuis bientôt trois ans, nous vous avons informés du plan que nous tentions de mettre en œuvre pour créer les conditions d’une relance de notre groupe. Il a été élaboré à la demande des services de l’État pour permettre notre développement numérique et motiver l’engagement des banques.
Malheureusement, sa mise en œuvre tarde faute d’apports de ces dernières et par manque de clarté de l’État sur ses intentions. Nous avons manifesté beaucoup de patience. Des efforts considérables ont été déployés. Si, comme c’est le cas de tous les journaux, notre diffusion en kiosques recule, notre nombre d’abonnés pour l’Humanité reste stable depuis deux ans et celui de l’Humanité Dimanche augmente, tandis que le nombre d’abonnés numériques connaît une forte progression depuis huit mois. L’Humanité peut donc vivre et se développer si on ne l’étrangle pas.
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Nous ne perdons pas espoir. Mais nous alertons sur l’urgence. Et nous posons une question aussi claire qu’importante qui concerne tous les démocrates.
Alors que se manifestent avec tant de puissance et de complicité les forces de l’obscurantisme, des nationalismes, des extrêmes droites qui couvrent l’Europe et le monde de leur long manteau brun, va-t-il être décidé de laisser agoniser et mourir l’un des journaux qui leur est le plus radicalement et foncièrement opposé : l’Humanité ? Il ne fait nul doute que la disparition de nos journaux serait fêtée par ces irréductibles ennemis comme une nouvelle et précieuse victoire. La question, certes brutale, doit être posée tant la situation s’apparente au supplice de Tantale dans l’attente d’une chute fatale.
Et ceci au moment même où non seulement la presse est concentrée entre quelques grandes fortunes, mais est absorbée, dans des proportions non négligeables, par des puissances industrielles et financières étrangères. Personne ne peut rester indifférent aux conséquences possibles d’une telle stratégie. Ces magnats de l’industrie, du numérique ou de l’énergie s’accaparent à vil prix une partie de la presse française. Ce n’est pas gratuit. Cela vise à faire pression sur notre pays. C’est une part de la souveraineté qui est ainsi attaquée. Aucun démocrate, aucun humaniste, aucun républicain ne peut rester indifférent et laisser faire en silence.
J’en appelle donc à nouveau au gouvernement et au Parlement. Mesurons ce que coûterait au débat démocratique, au pluralisme, à notre capacité à faire société ensemble une nouvelle phase d’accaparement de nos journaux par des capitaux étrangers.
Nous ne voulons pas, à l’Humanité, devoir choisir entre notre disparition et notre perte d’indépendance. Dans un cas comme dans l’autre, la France et de nombreuses voix combattantes à travers le monde seraient amputées d’un journal portant les valeurs et les idées progressistes. L’Humanité est ce journal qui, il y a quelques jours encore, dans un dossier remarqué, a porté un regard original sur les fondements de la Première Guerre mondiale qui coûta la veille de son déclenchement la vie à son fondateur, Jean Jaurès. C’est ce journal qui a alerté et obtenu que la Sécurité sociale ne soit pas rayée de la Constitution, qui a défendu la nécessité de développer la SNCF aux côtés des cheminots, dans l’intérêt général et pour réussir la transition environnementale ; celui qui, jour après jour, montre et démontre les effets néfastes de la destruction des conquêtes et principes issus du Conseil national de la Résistance ; ce journal qui porte le drapeau de la paix et du désarmement, de la préservation de notre environnement ; celui qui a révélé ce salon ubuesque de l’évasion fiscale à Cannes. Ce journal qui s’attache à mettre en lumière le travail en souffrance, les espoirs ensevelis et les luttes qui se mènent parfois dans l’ombre pour la justice et la dignité humaine.
Tout autant journal de la question sociale que de la promotion de l’éducation et de la culture, l’Humanité est un outil utile et nécessaire à l’œuvre d’émancipation humaine. Il est l’un des piliers du pluralisme des idées et de la presse. S’amputer de son existence revient à amputer la démocratie elle-même. Tel est l’enjeu. Il concerne tous les citoyens, les acteurs sociaux, syndicaux, les élus, le Parlement comme le pouvoir ou le monde de l’économie. Il est grand temps d’engager une réflexion large sur les moyens de faire vivre le pluralisme de la presse dans les conditions d’aujourd’hui, bien plus rudes qu’hier. Des décisions doivent être prises en conséquence et en conscience.
C’est dans ce contexte préoccupant que nous nous trouvons dans l’obligation d’appeler une nouvelle fois à la mobilisation de nos lectrices et lecteurs, des amis, et de toutes celles et ceux qui ont le pluralisme et la démocratie au cœur, en participant à une grande souscription populaire pour faire face à nos échéances de fin décembre et de mi-janvier. Nous savons l’effort que cela demande à chacune et chacun en ces temps de pouvoir d’achat rogné. Nous avons besoin à court terme de plus d’un million d’euros. Nous remercions à nouveau celles et ceux qui répondront positivement à notre appel pressant et qui nous aideront à élargir le cercle de ceux qui s’y joindront, comme tous ceux qui font découvrir l’Humanité et l’Humanité Dimanche et réalisent un abonnement. Par avance, merci de votre engagement.
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