Assemblée nationale. André Chassaigne : « Nous vivons un moment historique »

« Notre responsabilité est aujourd’hui d’apporter des réponses en prenant en compte la contestation de nos institutions, auxquelles nous sommes associés  », avance André Chassaigne. Romain Gaillard/Rea

« Notre responsabilité est aujourd’hui d’apporter des réponses en prenant en compte la contestation de nos institutions, auxquelles nous sommes associés », avance André Chassaigne. Romain Gaillard/Rea

Devant l’incurie de la majorité face aux mobilisations des gilets jaunes, les députés communistes comptent déposer une motion de censure. Leur chef de file explique pourquoi le gouvernement doit changer.

Pourquoi avez-vous pris l’initiative de solliciter d’autres groupes parlementaires pour déposer une motion de censure ?

André Chassaigne Alors que nos concitoyens poursuivent, sous des formes diverses, la mobilisation pour rejeter la politique du président des ultrariches, il est urgent de poser un acte fort. Les députés communistes ont donc décidé d’utiliser l’arme institutionnelle à leur disposition pour contrer la gestion catastrophique de cette crise par le gouvernement. Nous avons donc sollicité les députés de la France insoumise et les députés socialistes pour déposer cette motion de censure, qui a pour objectif d’obtenir la démission du gouvernement.

Vous devez réunir au moins un dixième de l’Assemblée nationale, soit 58 députés, pour déposer la motion. Êtes-vous confiant ?

André Chassaigne Nos trois groupes comptent 62  députés. Et la voix du peuple est suffisamment forte pour que nous ayons l’apport de députés progressistes d’autres sensibilités. Mais le plus important, c’est que les députés de la majorité parlementaire prennent leurs responsabilités et votent cette motion pour porter la voix de la majorité qui s’exprime dans le pays.

Pourquoi faut-il changer de gouvernement ? En quoi celui-ci n’est plus légitime ?

André Chassaigne Le gouvernement a failli en persistant dans une attitude méprisante qui attise une colère légitime. Son entêtement à « garder le cap » à tout prix menace la paix civile et fragilise l’activité économique de nos territoires. Sa censure constituerait l’acte de naissance d’un nouveau gouvernement, dont le mandat ne pourrait ignorer les revendications économiques et sociales légitimes du mouvement populaire qui traverse actuellement notre pays.

Les gilets jaunes ont replacé les questions sociales au cœur du débat politique. Quelle analyse faites-vous de ce mouvement, qui est en train de déstabiliser le pouvoir macroniste, alors que les précédentes mobilisations sociales avaient échoué ?

André Chassaigne J’ai pris connaissance des « directives du peuple » envoyées aux députés par leurs porte-parole, j’ai vu ce samedi les images de la jonction des gilets jaunes et des gilets rouges de la CGT, j’ai échangé avec des manifestants de ma circonscription. C’est indéniable : les questions sociales sont clairement au cœur de toutes les mobilisations. Et ces revendications sont celles que portent avec constance et détermination les militants et parlementaires communistes. Après s’être exprimée à l’annonce de la hausse des taxes sur l’essence et le diesel, la colère a fait prendre conscience de la nécessité d’un changement radical de politique. Nous vivons un moment historique où la conjonction des mobilisations ouvre enfin de réelles perspectives de progrès social en lien avec le progrès écologique.

L’une des spécificités de ce mouvement réside dans son autonomie vis-à-vis des syndicats et des partis politiques. Que révèle cette défiance et quel rôle peuvent jouer les organisations politiques, en particulier le PCF ?

André Chassaigne Cette exigence d’autonomie exprime en effet une grande méfiance à l’égard des organisations syndicales et politiques. Une défiance que le président de la République et le gouvernement n’ont cessé de nourrir en écartant les corps constitués. Ils en payent aujourd’hui durement le prix et mesurent combien il est difficile de dialoguer face à des mouvements non structurés. Notre responsabilité est aujourd’hui d’apporter des réponses en prenant en compte la contestation de nos institutions, auxquelles nous sommes associés. Il nous faut intensifier les échanges avec tous ceux qui se mobilisent, faire connaître nos propositions et nos actions pour les faire aboutir, et relayer les revendications avec force et avec la volonté d’obtenir des résultats concrets. Depuis dix-huit mois, nous portons dans l’hémicycle ce cri de notre peuple, ce cri du monde du travail et de nos territoires. Depuis le premier jour de la mobilisation des gilets jaunes, nous sommes à leurs côtés. Et c’est bien ensemble que nous pourrons obtenir la démission du gouvernement. Le dépôt d’une motion de censure est un des leviers à actionner pour contraindre le pouvoir à transposer au plus vite dans la loi les revendications qu’expriment les multiples mobilisations.

Entretien réalisé par Maud Vergnol

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