Santé. Comment attirer les médecins
Face à l’accroissement des déserts médicaux, une étude a analysé et croisé les stratégies internationales et propose d’en adapter certaines mesures.
Les déserts médicaux gagnent du terrain. La pandémie n’a fait qu’accentuer ce constat, alors que l’évolution de la démographie médicale en France accroît, année après année, les déséquilibres. Comment renverser la tendance et attirer de nouveaux médecins généralistes dans ces zones ? Le problème n’a rien d’hexagonal. Et c’est peut-être de l’international que viendra la solution. Comme l’attestent les différents rapports de l’Organisation mondiale de la santé, de l’Organisation de coopération et de développement économiques ou de la Commission européenne, quels que soient les pays, il est toujours plus difficile de se soigner dans les zones rurales ou les zones urbaines défavorisées. La direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees) s’est donc penchée sur le sujet en regardant ailleurs : les États-Unis, l’Australie et le Canada, les pays nordiques, la Grande-Bretagne… Des stratégies ont été dégagées de l’international pour être analysées et passées au crible français.
L’argent, un levier secondaire
L’argent serait-il l’outil le plus incitatif pour faire déménager les praticiens ? C’est souvent l’argument utilisé pour rééquilibrer la répartition géographique. Ce levier, pourtant, serait secondaire. La rémunération ne constitue pas une motivation suffisante pour compenser des journées à rallonge, la charge de travail, les trajets étendus dans ces zones dépeuplées… De même pour les incitations envers les étudiants : « Les dispositifs de soutien financier aux étudiants en contrepartie d’engagements de service permettent en général d’accroître l’offre à court terme mais avec des résultats discutables à plus long terme », constate l’étude de la Drees. D’autres facteurs bien plus mobilisateurs entrent en jeu, « les liens qu’on peut avoir avec ce type de territoire, parce qu’on y a grandi ou qu’on y a des attaches familiales ou amicales, le souhait d’exercer la médecine de famille ».
La formation initiale pourrait ainsi être la première piste fructueuse pour faire évoluer le paysage. La fin du numerus clausus en 2021 aurait pu jouer un rôle. Plus le nombre de médecins formés est important, plus les villes et zones urbaines denses vont être saturées, et entraîner un exode vers les campagnes moins pourvues. Dans les faits, cette mécanique ne fonctionne pas. En revanche, un constat américain pourrait encourager une autre méthode.
Marques de reconnaissance
Des études ont corrélé l’origine des médecins et leurs choix d’installation. Des formations décentralisées ont été mises en place, avec des sélections priorisant les étudiants issus de zones moins favorisées et en axant les cours sur un exercice en milieu rural (cours et lieux de stage spécifiques). Le développement en parallèle d’un soutien aux professionnels, le financement des remplacements, un accompagnement ont porté leurs fruits.
En France, suggère le rapport, « l’origine territoriale et sociale des étudiants en médecine pourrait être plus diversifiée ». Or, la politique de concentration des moyens et des établissements d’enseignement et de recherche va dans le mauvais sens. Des démarches proactives dès le secondaire pourraient être imaginées. L’organisation et le financement de remplacements, comme en Australie, devraient permettre aux praticiens de s’absenter. Le développement professionnel continu et l’acquisition de compétences nouvelles (compensation de la perte de revenu, prise en charge de frais de transport) pourraient être envisagés, comme l’assistance aux praticiens en souffrance professionnelle, des marques de reconnaissance quand on exerce dans les zones défavorisées, ou encore des congés de longue durée au bout d’un certain nombre d’années d’exercice dans des zones difficiles (comme dans certaines provinces canadiennes). Autant de mesures à mettre en place dans une stratégie globale plutôt que des mesures isolées sans impact à long terme.
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