Grève du 29 septembre. À Paris, contre la vie au ras du Smic
Plus de 200 rassemblements se sont déroulés en France pour exiger des hausses de salaire et protester contre la réforme des retraites. 40 000 personnes ont défilé dans la capitale, selon la CGT. Nous y étions !
C’est au son de la chanson des Doors, Riders on the Storm, évoquant des hommes coincés dans une tempête, que la manifestation interprofessionnelle à l’appel de la CGT, FSU, Solidaires et des organisations de jeunesse, s’est élancée, jeudi, depuis la place Denfert-Rochereau, à Paris. Alors que le gouvernement a annoncé le jour même une parodie de consultation sur la réforme des retraites pour tenter d’apaiser les esprits, ils étaient 40 000 à défiler dans la capitale (selon les organisateurs) pour cette rentrée sociale, mais aussi 4 500 à Nantes, quelques milliers à Marseille ou encore 1 000 à Saint-Denis de La Réunion, bien décidés à ne pas se laisser piéger par cette nouvelle régression.
Avec des salaires faméliques dans le secteur de la sécurité, la fin de carrière n’augure rien de bon pour Djamel Benotmane, délégué syndical CGT chez Fiducial. « Je touche à peine le Smic au bout de quinze ans, j’ai quatre enfants et ma femme ne travaille pas. Avec des horaires de nuit, je ne m’imagine même pas arriver à la retraite ! » tranche-t-il. Avec SUD et la CFDT, la CGT a réussi à faire tomber l’accord de branche qui prévoyait 3,5 % d’augmentation au niveau de la grille. Le patronat a revu sa copie en proposant + 7,5 %. Insuffisant pour le cégétiste : « Au 1er janvier, cette hausse sera déjà obsolète avec l’inflation, dénonce-t-il. Le métier est devenu tellement peu attractif que Gérald Darmanin a annoncé qu’ils allaient recruter des étudiants pour la sécurité des JO ! » C’est aussi ce manque de reconnaissance qui a conduit Solène, 26 ans, à bifurquer. Psychologue contractuelle en centre médico-psychologique, elle enchaînait les CDD et a été remerciée du jour au lendemain : « Je faisais six heures de transport aller-retour pour 1 700 euros net à bac + 5. Quand j’ai décidé de m’installer en libérale, ils m’ont rappelée pour me proposer un contrat… d’un mois. Pendant ce temps-là, les patients attendent parfois six à sept mois pour un rendez-vous. »
Ce conflit avec leur éthique professionnelle a poussé les personnels du Samu social à se mettre en grève, ce jeudi. Pour la première fois depuis trente ans, compte tenu de la mobilisation, la ligne d’urgences pour les sans-abri, le 115, n’a pas pu être assurée. « Les salaires de base sont tellement bas, en dessous du Smic, que certains employés habitent dans les centres d’hébergement temporaire, explique Jordan Bernard, secrétaire adjoint de la CGT. On ne peut pas être enferré dans la précarité pour s’occuper de ceux qui sont dans la grande précarité. La dégradation de nos conditions de travail et de vie rejaillit sur les personnes dont on s’occupe. »
À la Maîtrise de Radio France, les professeurs de musique œuvrant au chœur des enfants sont aussi chauffés à blanc par l’austérité. Et pour cause, leurs grilles de salaire ont été tellement peu revalorisées depuis plus de vingt ans qu’elles sont toujours affichées en francs. « Nous sommes en pleine négociation, précisent Aurélia et Marie. « Mais l’enveloppe qu’ils nous proposent ne rattrapera pas le manque à gagner de toutes ces années. » De leur côté, les employés du Technocentre Renault de Guyancourt (Yvelines) n’ont pas digéré les tours de magie de leur employeur. « Renault a annoncé 1 000 euros de prime la semaine dernière sauf qu’on en aura concrètement que 500, le reste ce sont, par exemple, des exonérations de cotisations mutuelle, déplore Christian, secrétaire du syndicat SUD. Les déclarations d’Emmanuel Macron, menaçant de dissoudre l’Assemblée nationale si la réforme des retraites rencontrait une opposition, l’agace : « C’est une façon de nous dire : “Ça passera de toute façon”. » De quoi motiver les manifestants pour un prochain round revendicatif contre la réforme.
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