SNCF : Le PCF fait ses propositions de financement pour le service public ferroviaire

1 – Le projet de loi Macron « pour un nouveau pacte ferroviaire » ne résout aucun des problèmes de la SNCF et va tous les aggraver !

Le réseau ferré national manque cruellement de maintenance et d’investissements. Nous n’avons cessé de le dénoncer depuis des années. Aujourd’hui, le gouvernement acte le « sous-investissement dans le réseau ferré » mais il n’apporte que des mauvaises réponses (concurrence, fin des recrutements au statut, dégradation des conditions de recrutement, zéro moyen nouveau).

Une phrase en page 1 du projet gouvernemental est éclairante « Le réseau ferré national, en dehors des lignes à grande vitesse, est victime de décennies de sous-investissement ». Le rapport Spinetta chiffre à 3 milliards par an pendant 10 ans les besoins d’investissements.

Le gouvernement est obligé de faire ce constat , mais n’apporte aucune réponse à ce problème.

Faute de réponse, il fait des cheminots et de leur statut des boucs émissaires, en s’appuyant sur une affirmation jamais démontrée du rapport Spinetta sur le prétendu surcoût de production de la SNCF « Les coûts de production au sein de la SNCF, seraient, [d’après le rapport Spinetta], supérieurs de 30% à ceux des entreprises ferroviaires européennes ».

Cette affirmation, jamais étayée, cherche en fait à en justifier une autre : l’avenir, c’est la mise en concurrence. Là encore, avec de faux arguments.

L’exemple donné est souvent l’Allemagne. Or, en Allemagne, ce n’est pas la concurrence (limitée, la Deutsche Bahn a toujours 85% des trafics) qui a réglé quoi que ce soit, c’est l’investissement de 35 milliards d’euros en 1994 de l’Etat allemand pour reprendre la dette de la Deutsche Bahn.

L’exemple passé sous silence, c’est la Grande Bretagne. Les résultats de la privatisation britannique sont catastrophiques : multiplication par 6 du prix des billets, accidents… sans apporter zéro solution financière.

Autre contre-exemple : la mise en concurrence du fret SNCF. Depuis, la SNCF n’a plus que 60% du marché, mais le volume de trafic global du fret ferroviaire baisse continuellement au profit de la route. Sans investissement, c’est la catastrophe et les projections à 2050 sont désastreuses : multiplication quasiment par 2 du volume de trafic de camions ! Seul le projet publié par la CGT Cheminots, qui propose de viser 25 % de fret ferroviaire dans le trafic marchandises, définit une réelle ambition. C’est pourtant une urgence économique et écologique.

En vérité, La mise en concurrence, c’est la désorganisation programmée du système ferroviaire. Quant aux attaques contre les cheminots, elles ne règlent rien et vont tout aggraver. Les cheminots ne sont pas bien payés (boulots durs, horaires contraints…) et la perte des droits liés au statut va dégrader l’attractivité de la boîte.

En fait, ce qui coûte cher à la SNCF et aux usagers, c’est la dette. 2,7 milliards de frais financiers annuels, soit le tiers de la masse salariale. Sur la dette, que propose le gouvernement : dans son projet soumis à ordonnances, rien !

2 – Le risque évident c’est la fermeture de lignes que les régions n’auront pas les moyens de financer, une catastrophe en matière d’aménagement du territoire

9 000 kilomètres de lignes sur les 29 000 sont des (mal nommées) petites lignes, avec des trafics limités. Elles sont toutes menacées par le projet Macron. Ce sont massivement des lignes TER subventionnées par les régions, mais qui profitent aussi d’investissements du système ferroviaire (SNCF réseau, qui voit sa dette augmenter).

La volonté du gouvernement de « rééquilibrer » la trajectoire financière de la SNCF implique de fait de transférer complètement la gestion de ces lignes et de leur déficit d’exploitation aux régions, avec probablement même une augmentation des niveaux de péages à payer.

Le calcul du gouvernement est pervers : ce seraient les régions qui auraient à fermer ces lignes par manque de moyens.

Prenons l’exemple concret de la région Occitanie : 270 gares, 4 500 communes desservies, 50% du réseau fait de « petites lignes ». La Région Occitanie consacre déjà 300 millions d’euros par an de subventions de fonctionnement pour faire rouler les TER (un quart du budget de fonctionnement de cette région, comme des autres).

La région Occitanie est à ce jour la seule (avec la Bretagne) à refuser la mise en concurrence , parce qu’il y a un vice-président communiste qui se bat et une présidente PS qui le soutient.

Si on lui transfère tout avec une augmentation massive du coût, cela sera très difficile de faire face.

Le duo pervers mise en concurrence/absence de financement, ce sera donc à terme :

  • Livrer aux profits de groupes privés les lignes les plus rentables (LGV Paris-Lyon par exemple) ; le CAC 40 a fait 93 milliards de profits. Il en veut plus.
  • Placer les régions dans des situations ingérables financièrement, qui ne pourront à terme que les amener à fermer de nombreuses lignes.
  • C’est donc une véritable « casse de la SNCF » avec (beaucoup) moins de trains, avec la privatisation des profits et la casse de tout ce qui est déficitaire et a besoin de la solidarité nationale.
  • C’est une catastrophe en terme d’aménagement du territoire : de très nombreuses villes moyennes et zones rurales n’auront à terme plus de trains du tout.
  • On parle déjà de sur-concentration des moyens dans les métropoles, ce sera pire. Comment espérer relancer l’emploi, le développement dans des territoires où on aura fermé la gare (après la poste, l’hôpital…) ?

En résumé, le projet Macron, c’est la France de la concentration du capital financier, contre la France de tous les territoires, du service public, de l’écologie. C’est cela le sujet, pas le statut des cheminots.

L’argument qui consiste à dire que la mise en concurrence est devenue une obligation européenne contre laquelle on ne peut plus rien est faux.

Le 4ème paquet ferroviaire, contre lequel nous avons voté quand ceux qui parlent aujourd’hui d’obligation venue de Bruxelles le votaient des deux mains, n’oblige pas le gouvernement à se précipiter comme il le fait. Et en plus, le règlement européen « Obligation de service public » prévoit dans ses articles 4 et 5 des dispositions qui permettent de maintenir les concessions aux exploitants publics. Le gouvernement peut donc engager la bataille contre la logique de privatisation du rail s’il en a la volonté.

3 – La vraie question, c’est le financement du système ferroviaire, pour lequel nous avançons des solutions

La dette du système ferroviaire augmente de 3 milliards d’euros par an. Elle est estimée (début 2018) à 53 milliards d’euros par an, dont 46 pour SNCF réseau et 7 pour SNCF mobilités. Elle augmente de près de 10 millions d’euros par jour. Cette trajectoire n’est pas soutenable, d’autant qu’elle génère des frais financiers très élevés.

Libérer la SNCF du poids de la dette pour investir et embaucher

Nous proposons que la dette soit reprise à taux zéro par la Caisse des Dépôts et les banques, en exigeant sa reprise ou son financement par la BCE, qui finance aujourd’hui le système bancaire à taux zéro sans aucune contrepartie utile au développement social et écologique.

Un Fonds européen pour les services publics, un plan européen pour le ferroviaire

Au delà, nous proposons que la France se batte pour engager la création d’un Fonds européen de financement des services publics, alimenté par le quantitative easing de la BCE, qui serve notamment au financement d’un plan européen de développement des infrastructures ferroviaires. Ce serait une contribution majeure à un plan climat ambitieux pour l’Europe.

De nouvelles ressources immédiates possibles qui ont fait leurs preuves 

Dans la bataille pour le réseau du Grand Paris Express en Ile-de-France, on nous a opposé pendant des années l’argument selon lequel le projet n’était pas finançable. Nous avons avancé des propositions qui sont aujourd’hui reprises et qui font leur preuve. C’est grâce à cela qu’on va construire 200 kilomètres de métro d’ici 2030 (le chantier a démarré à Champigny, et ce n’est pas un hasard que ce soit dans une ville et un département communistes qui ont été à la pointe de cette bataille).

Dès 2004, quand la loi de décentralisation des transports en Ile-de-France a été votée, nous avons fait des propositions de financement, en disant qu’il fallait beaucoup d’argent pour investir plus et financer le fonctionnement. Nous avions dit « il faudra mobiliser à terme 5 milliards d’euros par an en plus pour les transports urbains à Paris. »

Nous avons fait des propositions (hausse du versement transport des entreprises, hausse de la taxe locale sur les bureaux (qui était très basse et l’est encore) et création d’une taxe sur les parkings des entreprises et des hypermarchés.

Nous nous sommes battus et nous avons gagné des financements : fin 2010 sous le gouvernement Fillon, en 2013 sous Ayrault, en 2014 et 2016 sous Valls, et même fin 2017 le gouvernement Philippe a augmenté le versement transport (dans le 93 et le 94 et pas dans le 92 comme nous le proposions, mais tout de même pour 200 millions par an).

Et le gouvernement Philippe vient de s’engager début 2018 à dégager de nouveaux financements pour le Grand Paris (mission confiée à Gilles Carrez). On devrait gagner en juin 200 à 250 millions par an de recettes en plus.

En résumé depuis 2010, les différents gouvernements ont accordé en « cumulé » environ 1,7 milliard d’euros par an de financements en plus aux transports en Ile-de-France (massivement la hausse du versement transport, de la taxe locale sur les bureaux et l’extension aux parkings des hypermarchés). Ce qui a permis de financer le Pass Unique, plus d’offres de transports et, surtout, un plan d’investissement massif de plus de 40 milliards dont le Grand Paris Express (200 kilomètres de métro). Ce sont des investissements qui n’existent que parce qu’il y a les nouvelles recettes proposées par les communistes. En 2005, il y avait 200 millions par an d’investis dans les nouvelles infrastructures de transports en Ile-de-France. En 2018, il y aura près de 4 milliards (20 fois plus).

La preuve est faite que quand on veut trouver les moyens, on peut.

On les trouve pour les transports en Ile-de-France.

On peut tout à fait les trouver pour investir pour la SNCF et pour desservir tous les territoires en France, nul besoin de tout casser.

Ce qu’on fait pour Paris, on peut le faire pour desservir Aurillac.

Nous demandons à Mme la Ministre une rencontre pour parler des propositions que nous avons présentées dans le cadre de notre contribution aux Assises sur les Mobilités.

La recette totale attendue est de 6 milliards, répartie entre 3 milliards pour la SNCF en direct et plus de 2 milliards pour financer tous les types d’investissements dans les différents modes de transport.

  • L’augmentation de la taxe locale sur les bureaux et son extension à toute la France (2 milliards par an). Le taux de la taxe locale sur les bureaux peut être modulée avec un effet redistributif à l’échelle nationale. Elle serait portée à 50 euros par m² à la Défense et dans le cœur de Paris (5 à 10 euros en province seulement). C’est tout à fait accessible, la taxe étant à 22 euros par m² aujourd’hui, et les entreprises payant plus de 500 euros de loyer par m² actuellement.
  • L’extension de la taxe sur les parkings d’hypermarchés à l’ensemble du pays (très vertueuse en matière d’aménagement du territoire, permet le développement du petit commerce, la revitalisation des centre-villes, les groupes de la distribution n’auront qu’à développer des plus petites surfaces mieux intégrées dans la ville comme supérettes et supermarchés (2 milliards par an).
  • Le déplafonnement du versement transport (avec péréquation nationale) et la création d’un versement transport additionnel pour les régions (réclamé depuis des années par les élus de tous bords (500 à 800 millions par an).
  • La création d’un Livret d’Epargne Transport (pour que l’épargne populaire aille vers les transports publics).
  • La renationalisation des autoroutes.
  • La création d’une éco-taxe poids lourds régionalisée (1 milliard par an).

Trouver 3 milliards par an pour investir c’est donc possible, plutôt que de s’attaquer aux effectifs et au statut des cheminots. Avec la reprise de la dette, le financement des investissements et les nouvelles ressources dégagées, nous proposons :

des conférences annuelles régionales, nationale, européenne du transport ferroviaire pour élaborer avec les usagers, les salariés, la SNCF, les acteurs du transport des engagements chiffrés, évalués et suivis,

un plan d’embauche et de formation en adéquation avec les objectifs de développement décidés,

la négociation d’un statut commun aux salariés du transport, cheminots et routiers, pour lutter contre le dumping social.

4Une campagne d’actions dans toute la France aux côtés des cheminots

Les cheminots seront dans l’action le 22 mars et en grève à partir du 3 avril. Nous serons à leurs côtés dans la rue le 22 mars et durant toute la grève, dans les modalités qu’ils décideront.

Il ne s’agit pas seulement de solidarité avec les cheminots mais de l’intérêt général pour stopper la dégradation du service public et gagner un plan de développement ambitieux du transport ferroviaire sur tout le territoire national.

Du 20 mars au 3 avril, nous allons nous adresser aux usagers dans toutes les gares et les trains de France pour que le mouvement soit celui de tous, cheminots et usagers. Avec un mot d’ordre commun : « ma gare, ma ligne, mon train, j’y tiens. SNCF 100 % public », nous voulons que soient portées en commun les revendications des cheminots et celles des usagers pour un meilleur service public.

Nous proposons aux usagers le port d’un badge « mon train, j’y tiens », et d’organiser l’action des usagers aux côtés des cheminots.

A ce jour, notre présence est déjà programmée dans plus de 950 gares cette semaine !

Enfin, nous favoriserons toutes les initiatives unitaires pour faire grandir le mouvement comme nous venons de le faire avec la déclaration de douze organisations de gauche, obtenue grâce à l’engagement d’Olivier Besancenot, Benoît Hamon et moi-même, ainsi que toutes les convergences construites à partir des revendications de chaque profession, et de l’ensemble des salariés du pays.

 


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