Blanquer : de l’auto-évaluation à l’autosatisfaction

L’opposition majoritaire des enseignants et des parents d’élèves n’impressionnent pas un ministre qui, après s’être consulté lui-même, avoir nommé les meilleurs les experts – qui pensent comme lui ! – et avoir décidé unilatéralement que 70% des enseignants l’approuvaient, impose autoritairement des évaluations qui servent son projet d’école. Au prix d’une scandaleuse pression exercée sur les élèves et d’une désorganisation sans précédent des enseignements.

Après une première vague en début d’année scolaire, Jean-Michel Blanquer tente à nouveau d’imposer cette semaine une évaluation nationale à l’ensemble des élèves de cours préparatoire. Les syndicats des enseignant·e·s du premier degré appellent à boycotter ces évaluations qui n’apportent rien aux élèves et risquent au contraire de les mettre en échec.

Les dernières évaluations nationales, qui étaient intervenues à la fin du mois de septembre et concernaient alors les élèves de CP et de CE1, avaient pourtant été un fiasco. Unanimement, les enseignant-e-s avaient dénoncé des évaluations hors-sol qui ne correspondait pas aux attentes du programme. Les bugs avaient été nombreux. Cela n’avait pas empêché Jean-Michel d’utiliser les résultats, avant même qu’ils ne soient communiqués aux enseignant·e·s, aux élèves et à leurs parents, afin de mettre publiquement en évidences les carences de l’école.

À n’en pas douter, nous connaissons d’ores et déjà les résultats de cette deuxième vague d’évaluation qui, comparés aux résultats précédents, permettront au ministre de se féliciter de la réussite de ses premières mesures. Nous dénonçons cette manipulation grossière des évaluations. Alors que l’évaluation des élèves doit être un outil au service des apprentissages, elle apparaît aujourd’hui comme un instrument pensé sur mesure par et pour la communication ministérielle.

Plus fondamentalement, ces évaluations nationales s’opposent à la liberté pédagogique des enseignant·e·s et contribuent à transformer ces derniers en exécutants, alors qu’ils sont d’abord concepteurs de leurs enseignements. Cette négation de l’essence même du métier et de leurs qualifications est inacceptable.

En outre, les dangers de ces évaluations sont nombreux. De l’évaluation des élèves à celle des enseignant-e-s et des établissements, il n’y a qu’un pas. Rien n’empêchera demain le ministère d’utiliser les résultats pour mesurer la « performance » ou la « productivité » d’un-e enseignant-e-s et la « valeur ajoutée » d’un établissement, récompensant les uns par des primes au mérite et pénalisant les autres, ou encore laissant les familles choisir l’école de leur enfant en fonction de divers classements que certains médias s’empresseront de publier.

Nous soutenons l’ensemble des enseignant-e-s qui refusera d’administrer ces évaluations. Seuls des mouvements collectifs de résistance de ce type permettront de faire reculer le gouvernement. Face aux volontés politiques de prolétariser le métier d’enseignant-e, nous proposons au contraire la mise en œuvre d’une formation initiale et continue ambitieuse des enseignant-e-s, qui leur permette de rependre la main sur leur métier. Cela suppose notamment un pré-recrutement non pas pensé comme un moyen d’économiser davantage mais plutôt sortir les professeur-e-s en devenir de la précarité afin de leur laisser le temps de découvrir progressivement le métier et d’acquérir les connaissances et compétences indispensables à son exercice.


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