Coût du capital. Ces milliers d’euros qui manquent aux salaires

1 764 euros, en moyenne, ont été transférés en 2017 du salaire des Européens à la poche des actionnaires, comparé à 1990.

La Confédération européenne des syndicats (CES) a calculé que, en moyenne, 1 764 euros ont été enlevés sur la seule année 2017 au salaire de chaque travailleur européen, comparé au début des années 1990. La méthode de calcul est intéressante, puisqu’elle met en exergue le poids du coût du capital sur les revenus de chacun. Il y a trente ans, la part des salaires dans la richesse créée (le PIB) représentait exactement 66 % (elle était de 70 % en 1975). Elle est tombée en 2017 sous les 55 % dans certains pays comme la Pologne ou la République tchèque, et à 62,9 % dans la moyenne européenne. Ce qui représente un manque sur la fiche de paye dépassant les 4 000 euros par an dans certains pays d’Europe de l’Est.

À l’échelle de l’Union, chaque point de PIB représente 132 milliards d’euros environ, 20 milliards pour la France. « Les entreprises gardent une part plus importante de leurs bénéfices au détriment des salaires, estime Esther Lynch, secrétaire confédérale de la CES. Ce ne serait pas si grave si ces bénéfices étaient réinvestis dans l’entreprise et la formation des travailleurs, mais on constate que la part des investissements dans le PIB a également diminué. » Autrement dit, non seulement les entreprises se sont accaparé de plus en plus des richesses créées au détriment du salaire, mais elles ont également rogné sur les autres moyens de redistribution que sont l’investissement et la formation. « C’est du vol pur et simple, poursuit Esther Lynch, les riches deviennent encore plus riches aux frais des personnes qui dépendent de leur salaire pour vivre. »

Le coût du capital : 200 milliards d’euros de dividendes

Car, techniquement, ces milliards sont allés aux actionnaires. En 2017, plus de 200 milliards d’euros ont été reversés en seuls dividendes dans l’Union, dont près de la moitié pour les seules France et Suisse… « Les responsables politiques et les économistes s’inquiètent souvent des coûts salariaux mais, depuis au moins vingt-cinq ans, le vrai problème porte sur les coûts du capital : le montant versé aux actionnaires, explique Esther Lynch. La réponse à cette situation est de relancer la négociation collective en faveur de salaires plus justes. »

Pour le CES, les syndicats ont un rôle majeur à jouer pour « exiger une augmentation salariale supplémentaire pour compenser la perte d’une juste partie de la richesse que les travailleurs ont contribué à produire ».

La confédération insiste sur le fait que les augmentations de salaire profiteront à la croissance, via une hausse de la consommation de tous, et surtout qu’ils sont les garants de la bonne santé du système social. 


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