Alain Krivine, ancienne figure de la LCR est mort

Artisan du Mai 68 étudiant, l’ancien candidat aux élections présidentielles de 1969 et 1974 est décédé le 12 mars à l’âge de 80 ans.

Alain Krivine en février 2009 (AFP/FRANCOIS GUILLOT)

Alain Krivine en février 2009 (AFP/FRANCOIS GUILLOT) AFP

De son vivant, il n’aura pas connu la révolution en France. Alain Krivine, figure du mouvement trotskiste, est mort à l’âge de 80 ans, samedi 12 mars. « Je t’entends encore dire que la plus belle manière de célébrer la mémoire des disparus est de perpétuer leur combat. Le faire sans toi n’aura plus jamais la même saveur », a réagi Olivier Besancenot, ancien collaborateur parlementaire de celui qui fût eurodéputé (LCR) au tournant des années 2000. Né à Paris en juillet 1941, et fils d’un docteur spécialiste en stomatologie, Alain Krivine est issu d’une famille de juifs ukrainiens ayant fui les persécutions antisémites à la fin du XIXe siècle. Durant cinq décennies, il a été l’un des fers de lance de l’extrême gauche française. Il continuait à disposer d’un bureau au-dessus de l’imprimerie Rotographie, à Montreuil (Seine-Saint-Denis), le siège du NPA.

À 17 ans seulement, il s’engage aux seins des Jeunesses communistes. Entré au Parti communiste international (PCI), il est exclu en 1966 de l’Union des étudiants communistes (UEC) en raison de son entrisme trotskiste au sein de l’organisation proche du PCF. Il fonde alors la Jeunesse communiste révolutionnaire (JCR) et joue un rôle actif dans les mobilisations étudiantes de Mai 68, aux côtés de Daniel Cohn-Bendit, Jacques Sauvageot et Alain Geismar. Entré en semi-clandestinité à la suite de la dissolution des JCR en juin 1968, après la reprise en main du pays par le pouvoir gaulliste, Alain Krivine est appréhendé et inculpé une première fois à la prison de la Santé pour « maintien et reconstitution de ligue dissoute ». L’année suivante, il lance la ligue communiste, notamment aux côtés d’Henri Weber, futur dirigeant du PS. Lunettes sur le nez et cheveux frisés, il est candidat une première fois à la fonction présidentielle, en 1969. Une « candidature révolutionnaire » qui « tendra à dissiper les illusions électoralistes et parlementaristes du PCF ». Il ne recueille que 1,06 % des suffrages. Candidat une seconde fois en 1974 pour la Ligue communiste révolutionnaire (LCR), il obtient 0,37 % des voix.

Chef de file du mouvement trotskiste français, Alain Krivine a durant la seconde moitié du XXe siècle voulu semer « les graines d’une nouvelle gauche, ni sociale-démocrate, ni stalinienne ». Son organisation, la LCR, qu’il dirige durant près de 30 ans, a été partie prenante de toutes les luttes lycéennes, étudiantes et féministes. En 1973, il connaît un second séjour à la prison de la Santé après avoir perturbé, en faisant usage de la force, un meeting d’Ordre nouveau, une organisation d’extrême droite, mobilisée contre une prétendue « immigration sauvage ». Il ne sera relâché qu’au bout de cinq semaines à la suite d’un fort mouvement de soutien.

Journaliste à l’Hebdomadaire « Rouge », l’organe de presse de la LCR, il occupe à 58 ans son premier mandat électif. Second sur une liste d’union avec Lutte ouvrière (LO) d’Arlette Laguiller aux Européennes de 1999, il siège comme eurodéputé jusqu’en 2004. « Un soixante-huitard qui n’a jamais renié ses convictions anticapitalistes et révolutionnaires », a salué Nathalie Arthaud (LO). À la faveur de cette élection, il s’entoure d’Olivier Besancenot. Ce dernier prend sa relève médiatique et réussit des percées électorales aux présidentielles de 2002 (4,25 %) et 2007 (4,08 %). La LCR occupe ainsi une place de choix, durant près de 10 ans, au sein de la gauche radicale. Porte-parole de la formation jusqu’en 2009, Alain Krivine participe à la création du Nouveau parti anticapitaliste (NPA) espérant ainsi, en vain, amplifier l’influence trotskiste.

Dans la foulée de l’annonce de son décès, les hommages se sont multipliés. Le député insoumis Eric Coquerel, ancien de la LCR, a tenu à saluer la mémoire de « (s) on camarade », « grande figure du mouvement révolutionnaire et porte-parole humain et talentueux du parti qui fut le mien ». « Avec Jack Ralite, Alain Krivine fut l’une des figures qui m’a donné envie de faire de la politique pour changer le monde », a révélé Clémentine Autain (FI).

« Il fut l’une des voix de l’histoire politique de la gauche. Alain Krivine s’est aujourd’hui éteint, que sa mémoire soit honorée. Pensées fraternelles à ses amis et compagnons de route de toujours », a déclaré de son côté le secrétaire national du PCF Fabien Roussel.


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