Continuant de diffuser des chiffres de contamination en milieu scolaire tellement faux qu’ils sont contredits par ceux de Santé publique France, ignorant que les nouveaux variants du virus pourraient toucher plus fortement les jeunes, le ministre de l’Éducation nationale camoufle ses échecs, repousse les échéances de vaccination et refuse tout aménagement pédagogique. Jusqu’à quand ?
À quand les premières vaccinations pour les enseignants de France ? Fin janvier, fut la première réponse du ministère. La semaine dernière, c’était mars, puis finalement avril. Et maintenant, « cela aura forcément lieu dans le courant du premier semestre », a déclaré Jean-Michel Blanquer, dimanche 10 janvier, sur RTL. Ce qui peut donc nous emmener jusqu’en juin, juste avant… les vacances scolaires. Mais, que l’on se rassure, a aussitôt précisé le ministre de l’Éducation nationale, puisque « le grand critère de vaccination reste celui de l’âge (…), quand on arrivera à celui de la population active, les professeurs seront parmi les premiers concernés ».
Avec ce genre de déclaration, il faut faire du commentaire de texte. « Parmi les premiers concernés » : on peut comprendre que les enseignants seront prioritaires. Ou s’arrêter sur ce « parmi », qui signifie au contraire qu’ils ne bénéficieront pas d’un ordre de priorité particulier. Bref, comme le remarque le secrétaire général du syndicat SE-Unsa, Stéphane Crochet, dans 20 Minutes : « Certes, les professeurs ne sont pas plus prioritaires que les caissiers, qui croisent beaucoup de monde, mais il faudrait accélérer la cadence pour tous. » Sinon, les premiers enseignants vaccinés seront soit à la retraite, soit en vacances. Ce qui risquerait d’hypothéquer largement l’efficacité de la politique de vaccination en milieu scolaire. Certes, ces atermoiements peuvent avoir les mêmes causes que celles qui expliquent les retards français de la vaccination dans la population générale : des achats et livraisons de vaccins insuffisants, une logistique à la traîne et un manque de personnel médical.
Loin du million annoncé, seuls 10 000 tests ont été effectués
Mais, dans l’éducation nationale, ces soucis pourraient se voir renforcés par des causes internes, comme le montre le précédent du dépistage. Ainsi, toujours le 10 janvier, le ministre claironnait l’objectif d’ « un million de tests » ce mois-ci. Problème : à la date où il s’exprimait, seuls 10 000 tests, selon le ministère lui-même, avaient effectivement été réalisés. Pire : il avait déjà proclamé le même objectif… en novembre 2020. Depuis, les seules vraies campagnes de tests massifs en milieu scolaire ont été réalisées à l’initiative des collectivités locales.
Les raisons de cet échec du dépistage peuvent être cherchées du côté du volontariat, qui reste faible : crainte des élèves vis-à-vis de la procédure de test elle-même, crainte du personnel de se voir détecté positif et de devoir s’isoler, donc d’être absent et de pénaliser ses élèves, faute de remplaçants. Mais la cause essentielle se trouve plutôt dans le manque de personnel : plus que jamais indispensables pour suivre la santé des élèves, mise à mal sur tous les plans par le confinement, les infirmières scolaires ne sont guère disponibles pour les tests. Et ce ne sont pas les quelque 900 médecins scolaires (pour 12,5 millions d’élèves) qui peuvent assumer cette charge. Le personnel fourni par les ARS ou des associations n’a visiblement pas permis de combler ce manque. Et on ne voit pas par quel miracle il en serait autrement pour la vaccination, encore plus complexe à mettre en œuvre.
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Mais, pour Jean-Michel Blanquer, peu importe. Continuant de diffuser des chiffres de contamination en milieu scolaire tellement faux qu’ils sont contredits par ceux de Santé publique France, ignorant que les nouveaux variants du virus pourraient toucher plus fortement les jeunes, le ministre s’arc-boute sur son « protocole miracle » pour refuser en bloc le report des épreuves de spécialité du bac (prévues dès mars) ou des aménagements dans les programmes pour pallier les retards. Tout juste concède-t-il que la reprise en présentiel dans les lycées pourrait ne pas avoir lieu le 20 janvier, comme prévu. De quoi faire largement monter la tension dans les établissements, où la journée de grève interprofessionnelle du 26 janvier se prépare déjà activement…
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