Musicien de légende à la conscience politique aiguisée, Roger Waters, inventeur d’un son nouveau, a cofondé en 1965 le groupe de rock Pink Floyd. Il n’a jamais fait mystère de ses engagements internationalistes, de ses combats pour la liberté, la paix, l’égalité.
Depuis son studio d’enregistrement à New York, à quelques semaines du début d’une tournée mondiale, Roger Waters, nous a offert un entretien au long cours. Le musicien, connu pour ses engagements internationalistes et ses combats anticapitalistes, nous fait partager ses réflexions sur le monde. Turquie, Ukraine, Palestine, dangers de la civilisation capitaliste, désinformation : aucun des sujets qui font ou défont l’actualité n’échappe à sa sagacité.
Vous vous êtes récemment engagé pour la libération d’une jeune chanteuse kurde condamnée en Turquie à dix-neuf ans de prison, Nûdem Durak . Comment avez-vous entendu parler d’elle ?
J’ai entendu parler d’elle par l’un de mes amis. Et j’ai été un peu choqué d’entendre l’histoire de cette jeune femme donc je me suis renseigné. Elle n’a pas pu se défendre lors de son procès, c’était un fait accompli. Elle est en prison depuis sept ans maintenant. Voilà comment tout a commencé.
Comment vous est venue l’idée de lui offrir l’une de vos guitares, signée par de grands noms du rock ?
Je ne sais pas. Je me suis réveillé un matin et je me suis demandé ce que je pouvais bien faire. J’avais entendu que lors d’une inspection dans les cellules de sa prison, les gardiens avaient cassé la guitare de Nûdem Durak. J’ai donc pensé : « C’est quelque chose que je peux faire, je peux lui donner une guitare, mais pourquoi ne pas le rendre public et lui offrir l’une de mes guitares ? Et aussi, pourquoi ne pas la faire signer par quelques amis et d’autres musiciens et voir si nous pouvons aider, ainsi, à faire connaître un peu sa détresse ? » Et c’est ce que nous avons essayé de faire.
Ces jours-ci, la presse turque a annoncé que vous alliez vous rendre dans ce pays pour remettre vous-même cette guitare à Nûdem Durak dans sa prison. Est-ce vrai ?
Il est vrai que j’avais envisagé une conférence de presse à Istanbul. Et j’ai eu beaucoup de conversations avec des gens à ce sujet : quels seraient les gestes les plus appropriés pour pousser ceux qui prennent les décisions vers la possibilité d’un nouveau procès ? Je n’irai pas à Istanbul dans l’immédiat si cela devait faire plus de mal que de bien à ce stade. Tout ceci est très difficile. Je parle des pouvoirs en place en Turquie. Nous n’allons pas demain déclencher un soulèvement populaire en Turquie.
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Il n’y aura pas des millions de Turcs rassemblés aux portes des prisons pour exiger la libération des détenus politiques. Cela n’arrivera pas. Donc nous devons être très politiques à ce sujet. Des élections auront lieu en Turquie en 2023. Que se passera-t-il ? Personne ne le sait. Je n’ai pas de boule de cristal. Alors je réfléchis à ce qui pourrait être le plus efficace, pour Nûdem comme pour beaucoup d’autres personnes qui partagent son sort et sont dans mon cœur. Je suis dans ce combat, je ne l’abandonnerai jamais.
Suivez-vous toujours avec autant d’attention ce qui se passe à Jérusalem et dans toute la Palestine ?
Oui, bien sûr ! Les Israéliens envoient maintenant des troupes d’assaut à Al-Aqsa ; ils arrêtent des gens au hasard et détruisent les lieux. Ils pensent qu’ils peuvent faire n’importe quoi et que personne ne le remarquera.
Vous avez été violemment critiqué pour votre soutien au peuple palestinien. On vous a accusé d’antisémitisme. Comment réagissez-vous à ces graves mises en cause ?
Vous savez, je me suis engagé depuis 15 ans seulement dans ce combat. Mais j’ai été assez impliqué et je le suis de plus en plus chaque jour. J’ai de grands amis en Israël, comme Nurit Peled, par exemple, dont la fille a été tragiquement tuée dans un attentat suicide à Tel Aviv il y a de nombreuses années. Elle est extraordinairement active dans le combat que nous menons pour l’égalité des droits pour tous nos frères et sœurs, pas seulement en Palestine et en Israël, mais dans le monde entier. Elle m’envoie chaque jour des nouvelles de ce qui se passe là-bas.
Alors que je faisais partie du Tribunal Russell sur la Palestine, j’ai parlé aux Nations Unies devant le Comité des droits de l’homme. J’ai mis une putain de cravate et un costume et je les ai appelés Vos Excellences. Et j’ai fait un discours. C’était le 29 novembre 2012, le jour où l’Assemblée générale des Nations unies a voté à une écrasante majorité en faveur de l’admission de la Palestine à l’ONU, bien que seulement en tant qu’État observateur. Mais c’était la première fois qu’il était reconnu que la Palestine pourrait être un État.
Une décennie s’est écoulée depuis lors. Et toujours rien. Pas même le plus petit clin d’œil à l’idée que les États-Unis se soucient des droits humains d’une quelque manière que ce soit. Pas seulement en Palestine, d’ailleurs. Je ne suis pas dégoûté. Si, je le suis. Mais je continue à me battre. Est-ce que j’en ai quelque chose à foutre de ces attaques contre moi ? Non, je m’en fous. Je les emmerde.
Fondamentalement, le message de The Wall reste, dans ce monde où la propagande tend à prendre le pas sur le réel : « Vous avez le pouvoir ». Roger Waters
D’où vous viennent vos engagements internationalistes ?
De ma mère et de mon père, évidemment. Vous savez, tous ceux d’entre nous qui ont un cœur, une âme et une once d’amour prennent le chemin de tels engagements. Mais plus encore si vos parents sont Eric Fletcher et Mary Duncan Waters et qu’ils vivaient à Londres dans les années trente. En fait, Eric Fletcher, mon père, était en Palestine en 1935. Il enseignait à la St. George’s School de Jérusalem. J’ai donc un lien familial étrange avec la Palestine.
Il écrivait des lettres à ma grand-mère pour lui dire combien il était préoccupé par la situation difficile des peuples autochtones qui avaient vécu ensemble pendant toute la durée de l’Empire ottoman, jusqu’à la Première Guerre mondiale. Juifs, chrétiens, druzes et musulmans vivaient tous ensemble. Le rêve sioniste a détruit le potentiel de tous les gens qui vivaient dans cette région côte à côte. Les uns avec les autres, sans qu’un groupe ait le pouvoir sur tous les autres, ce qui est le cas actuellement, avec l’assentiment de pays qui se disent épris de liberté, de démocratie.
David Gilmour et Nick Mason se sont joints à d’autres musiciens pour interpréter une chanson de soutien à l’Ukraine. L’avez-vous écoutée ?
Je l’ai écoutée, oui. Je désapprouve leur démarche. Il y a un incendie, des gens meurent et cela revient à verser de l’huile sur le feu. Vous savez, David et Nick, de toute évidence, suivent leur propre chemin et se font leur propre opinion sur les choses. J’étais dans un groupe de rock avec eux, mais ça s’est terminé en 1985. C’est il y a très, très longtemps maintenant. Mes opinions politiques n’ont pas changé. Enfin, j’ai très peu changé depuis.
Mais c’était devenu de plus en plus clair au cours des dernières années où j’ai travaillé avec eux : on ne se comprenait plus du tout. Ils ont subi un lavage de cerveau, comme beaucoup de gens. Et toute cette agitation de drapeaux bleus et jaunes ne fait de bien à personne. La seule chose importante à propos de l’Ukraine en ce moment, c’est d’arrêter la guerre en cours. De l’arrêter par la diplomatie et les négociations entre Zelensky et Poutine, qui ont besoin pour cela d’un peu d’aide de la part des États-Unis et des gouvernements britannique, français, allemand, des Européens, et probablement de la Chine aussi. Pour qu’ils puissent tous dire, d’accord, c’est bon, ça suffit les combats. Voilà ce que nous devons encourager.
VLADIMIR POUTINE EST UN TYRAN MAIS L’OCCIDENT N’EST PAS UN CAMP MERVEILLEUX REMPLI D’AMOUR POUR LA LIBERTÉ ET LA DÉMOCRATIE. ROGER WATERS
En Occident, on ne voit rien d’autre que ce tyran maléfique de Vladimir Poutine – ce qu’il est. Mais l’Occident n’est pas un camp merveilleux rempli d’amour pour la liberté et la démocratie. Les États-Unis se fichent complètement des droits humains, ils l’ont maintes fois prouvé en envahissant eux aussi des pays souverains. Et Zelensky n’est pas le type formidable, le Robin des bois que l’on dépeint. C’est juste un politicien opportuniste, qui a déclaré illégales onze organisations d’opposition, qui s’est allié aux néonazis du bataillon Azov. Nous, dans le mouvement pour la paix, devons utiliser tous les bons offices dont nous disposons pour encourager la diplomatie, pour encourager des pourparlers de paix.
Vous dénoncez la « dystopie d’entreprise dans laquelle nous luttons tous pour survivre ». Parlez-vous là du système capitaliste ?
Oui, bien sûr. C’est de cela que je parle. Regardez la destruction que l’esclavage, le colonialisme et l’économie néolibérale ont causée au monde entier… L’école de Chicago et Milton Friedman ont fait du marché non régulé la panacée pour tous les maux du monde : il fallait laisser faire le marché et tout irait bien. Non.
LE CAPITALISME MOBILISE DES OUTILS DE PROPAGANDE AFIN DE CONTRÔLER LE RÉCIT POUR LE MONDE ENTIER. C’EST À JEFF BEZOS QU’APPARTIENT LE “WASHINGTON POST… Roger Waters
C’est un système corrompu, défaillant, qui prêche littéralement de ne pas se soucier des autres, de nous battre les uns contre les autres jusqu’à la mort comme condition prétendue du progrès et de la richesse. Et ce système mobilise des outils de propagande destinés à contrôler le récit pour le monde entier. C’est une question centrale.
Le Washington Post appartient à Jeff Bezos. Vous savez, le connard qui fait pisser les chauffeurs dans des bouteilles sur le bord de la route parce qu’ils ne peuvent même pas s’arrêter pour une pause pendant leur journée de travail. Bezos, Zuckerberg, Gates, Buffett… ils sont considérés comme de grands hommes. Regardez-les… J’ai déjà rencontré Elon Musk. Il suffit de regarder dans ses yeux pour voir qu’il est fou à lier.
Vous avez inventé un son à la fin des années soixante et dans les années soixante-dix, en studio avec Pink Floyd, qui continue d’inspirer de nombreux musiciens contemporains. Beaucoup d’entre eux vous considèrent comme le parrain de la musique moderne.
Il est vrai qu’aux débuts de Pink Floyd, nous étions – et Syd Barret particulièrement – très intéressés par l’expérimentation, les répétitions d’écho, etc., mais il n’y avait pas d’ordinateurs à cette époque-là. Le Binson Echorec avait déjà été inventé. C’était un disque, un vrai magnétophone qui enregistre et lit ensuite l’enregistrement avec des têtes de lecture placées autour du disque. Il y avait aussi l’Echoplex, qui était une boucle de bandes en rotation. Ou encore le Copicat. Différentes personnes travaillaient à l’époque sur le retardement de bande (le son différé). C’est mon ami Ron Geesin qui m’a appris à faire un long retardement avec une boucle de bande magnétique.
Et puis, lentement, le numérique s’est développé, de sorte qu’en 1976, 1977, quelque chose comme ça, certains commençaient à être en mesure de créer des “lignes à retard” numériques. Je me souviens en avoir acheté une demi-douzaine, de les avoir superposées et mises en série pour obtenir un retard d’une seconde ou d’une seconde et demie. Quelqu’un a dû commencer à déconner avec l’électronique, en inventant la première boîte. Je n’ai aucune idée de qui c’était, mais ça a pu arriver parce qu’ils ont vu que les valves d’un ampli réagissaient mal à un signal trop fort. Et vous obtenez ce son de guitare déformé. Oh mon Dieu, le larsen ! Personne n’a jamais pensé pouvoir soutenir une note guitare comme ça.
Nous avons depuis découvert que des génies existent. L’un d’entre eux s’appelle Jeff Beck : il jouait une musique incroyable en maniant les effets. Roger Waters
Et puis soudain, quelqu’un a dit : «Oh, attendez une minute. Vous pouvez changer le signal ! Et si on mettait ça dans quelque chose sur lequel on peut mettre le pied ? Oh, mon Dieu, c’est la pédale, wah ! » Tout ça n’était qu’une continuation des distorsions d’une Fender Strat. Oh, mon Dieu, vous pouvez accorder toutes les cordes en appuyant avec le pied sur le côté. Mais c’est Apache ! [une chanson des Shadows, NDLR]. Nous avons depuis découvert que des génies existent. L’un d’entre eux s’appelle Jeff Beck : il jouait une musique incroyable en maniant les effets. Ce sont des petits pas technologiques. La manière dont on en fait usage, c’est autre chose.
Il y avait également Peter Zinovieff, qui a créé le premier ordinateur qui générait lui-même de la musique. J’en ai eu longtemps un entre les mains ! En gros, c’est trois oscillateurs de fréquence très, très simples qui modifient les ondes. C’est une technologie vraiment simple. Mais si vous envoyez ça à travers un filtre égalisateur… Vous savez, c’est ce que j’ai passé toute ma putain de carrière à faire parce que j’aime ça. Je ne sais pas où les gens vont chercher l’idée que c’était révolutionnaire de quelque façon que ce soit.
Est-il vrai que vous allez enregistrer un album folk ?
Qu’est-ce que la musique folk ? Quand j’étais gamin, nous savions tous ce qu’était la musique folk. C’était de la musique acoustique. Et à l’époque, on jouait normalement sur une guitare acoustique, probablement à cordes en boyau, vous savez, une guitare de style espagnol. Cela aurait pu être autre chose : un harmonium, une cornemuse, un sifflet en fer-blanc, un violon. Mais cela est venu de la tradition des troubadours allant de village en village en chantant des chansons. C’est donc le conteur assis sous le marronnier, en fait.
Et ça, ça a survécu, certainement jusque dans les années soixante aux États-Unis. Principalement grâce au travail de gens comme Alan Lomax, qui partaient vers le sud et enregistraient tous les joueurs de blues. Le blues est venu en grande partie des gens qui travaillaient dans les champs, comme on le sait. C’est une histoire très intéressante. J’adore cette histoire. Et c’est mélangé, cependant, avec la mythologie : conclure un pacte avec le diable à la croisée des chemins pour devenir un grand joueur. Il y a quelque chose de très louisianais là-dedans. Tout cela est très romantique dans toute l’histoire de la musique folk, Alan Lomax, Woody Guthrie, « This land is my land »…
Il existe une longue tradition dans la musique populaire d’artistes engagés. Vous sentez-vous proche de certains d’entre eux ?
Oui. Billie Holiday. C’est elle qui me vient d’abord à l’esprit. Harry Belafonte est un grand héros à mes yeux. On pourrait parler de Paul Robeson aussi, à cause du prix qu’il a payé pour son engagement politique, son implication auprès de la classe ouvrière aux États-Unis dans les années quarante et cinquante. Et ainsi de suite.
Vous avez composé dans les années quatre-vingts la musique d’un opéra pop, « Ça ira », sur la Révolution française. Quels souvenirs gardez-vous de la collaboration, à cette occasion, avec Étienne Roda-Gil, l’un des meilleurs paroliers français ?
Il y a quelques années, juste avant sa mort, Étienne est venu me rendre visite à New York. Nous marchions dans la 54e rue, tôt le matin, avant une journée d’enregistrement. Nous nous sommes arrêtés à la table d’un café, dans le rayon de soleil de cette rue étroite. J’ai pris un expresso, mais Étienne était alcoolique : il a pris un gros shot de whisky, en fumant cigarette sur cigarette, des Benson & Hedges. Nous discutions de choses et d’autres, je ne sais plus comment la conversation a pris un tour philosophique. Il est parti, revenu, m’a regardé droit dans les yeux en murmurant, avec son accent français à couper au couteau : « Peut-être ne suis-je pas seul ».
Peu de temps après, il s’est saoulé à mort, il travaillait à ça depuis un demi-siècle. C’était évident que ça allait arriver. Ce jour-là j’ai griffonné ces mots sur un morceau de papier que j’ai glissé dans ma poche arrière. Je l’ai toujours, mais il est dans un portefeuille maintenant parce que j’ai réalisé qu’il commençait à s’effilocher et à se déchirer et que je le perdrais si je le gardais dans ma poche. J’aimais le garder près de moi, comme un talisman. « Peut-être ne sommes-nous pas seuls ». J’ai ressenti, à entendre ces mots, une grande émotion. Ils me donnent de l’espoir.
Vous souvenez-vous que l’Afrique du Sud a interdit The Wall de Pink Floyd au début des années quatre-vingt, quand les étudiants chantaient cette chanson pour protester contre le système d’apartheid ? Comment expliquez-vous le pouvoir subversif d’une chanson ?
Eh bien, j’espère que le pouvoir de subversion de cette chanson-là ne s’est pas éteint. Fondamentalement, son message reste, dans ce monde où la propagande tend à prendre le pas sur le réel : « Vous avez le pouvoir ».
Vous voyez cette photo de Syd Barret ? Elle apparaîtra sur l’écran après le dernier couplet de wish you were here C’est difficile pour moi de m’y confronter. Roger Waters
Vous avez annoncé une tournée cet été. Quel sens lui donnez-vous ?
Son titre est This is not a Drill (Ceci n’est pas un exercice). Vous voyez cette photo [il nous montre une photo de Syd Barret] ? Elle apparaîtra sur l’écran après le dernier couplet de Wish You Were Here. C’est difficile pour moi de m’y confronter. Nous allions à un rendez-vous au siège de Capitol records, puis en descendant dans la rue, Syd m’a lancé dans un sourire : “C’est beau ici à Las Vegas, n’est-ce pas ?”. Évidemment, il devenait fou à ce moment-là. Puis son visage s’est assombri et il a craché un seul mot. “Les gens”, il a dit.
Quand vous perdez quelqu’un que vous aimez, ça sert à vous rappeler que “ce n’est pas un exercice”. Eh bien, “ce n’est pas un exercice”, c’est le nom que j’ai donné à la tournée. Toute ma tournée vise à faire comprendre aux gens que nous sommes au milieu d’un temps de grand désespoir. Nous sommes confrontés à une catastrophe absolue. Et “ce n’est pas un exercice”. Nous avons une responsabilité absolue envers tous nos frères et sœurs pour empêcher les gangsters qui sont aux commandes de détruire le monde. C’est tout.
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