Retraites : « L’application de la réforme au forceps est irréaliste » + attaque contre le dirigeant CGT S. Menesplier

L’entrée en vigueur de la réforme le 1er septembre acte la fin du régime spécial des industries électriques et gazières. Sébastien Menesplier, de la FNME-CGT, dénonce un décret « mal ficelé ».

AFP

Les salariés vont faire l’expérience des conséquences de la réforme des retraites. Durant l’été, l’exécutif a publié au Journal officiel les décrets d’application, effectifs au 1er septembre. Le secrétaire ­général de la Fédération nationale Mines Énergie CGT (FNME-CGT), Sébastien Menesplier, revient sur les effets de ce décret dans les industries électriques et gazières (IEG), alors que les agents statutaires, mais mis à disposition, pourraient perdre leurs droits.

Le 1er septembre acte notamment la suppression du régime spécial pionnier des IEG. Vous estimez ce calendrier intenable, pourquoi ?

Sébastien MenesplierSecrétaire général de la FNME CGT

Sébastien Menesplier
Secrétaire général de la FNME CGT

Une telle réforme, dans sa mise en œuvre, nécessite de prendre le temps pour faire les choses bien et ne pas imposer davantage de contraintes aux travailleurs concernés. Plus particulièrement dans les IEG, nous considérons que les conditions ne sont pas réunies. D’abord, cette réforme n’est toujours pas acceptée, ni comprise. Ensuite, sans dialogue avec les employeurs au regard des délais extrêmement courts, les salariés s’interrogent nécessairement sur les conséquences sur leur retraite alors même que nous sommes déjà à la date d’application ! Sont-ils tous protégés par la clause du grand-père ? Un doute ­sérieux persiste.

Lors de la consultation des acteurs de la filière, pour la promulgation du décret d’application, la FNME-CGT s’est inquiétée que des agents actuels puissent sortir de votre régime. Pour quelles raisons ?

Dans notre branche, des collègues peuvent être mis à disposition dans des entreprises autres que celles des IEG. Ces salariés continuent néanmoins à bénéficier du statut, donc des régimes spéciaux de santé et de retraite. Avec l’application de la réforme, nous attendons des garanties en ce qui les concerne. Pour l’heure, ces agents n’ont pas l’assurance de rester intégrés au régime spécial pionnier. Les employeurs et les ministères assurent que ces cas de figure vont être étudiés. Cela montre bien que le décret d’application est mal ficelé et n’a pas intégré toutes nos spécificités. C’est très grave. L’application au forceps est irréaliste et inatteignable.

Dans ce contexte d’incertitudes liées à l’application de la réforme, quelle est votre action syndicale ?

Sur le terrain, nous allons faire preuve de pédagogie, afin d’expliquer les conséquences de cette réforme. Les salariés ont beaucoup d’interrogations. Sur ce sujet, les employeurs ne peuvent se désengager de leurs responsabilités : ce ne sont pas les travailleurs qui ont voulu cette réforme. Les employeurs ne s’y sont pas opposés. Désormais, ils doivent assumer leurs responsabilités. Durant la consultation de la filière pour l’élaboration du décret d’application, la FNME-CGT, avec l’intersyndicale, a réussi à imposer des amendements, que le gouvernement n’a pas retenus.

C’est-à-dire ?

Le 4 juillet, nous sommes parvenus à ce que le conseil d’administration de la Caisse nationale de retraite des IEG (Cnieg) donne un avis négatif sur le décret. C’est un signal très fort, d’autant que la Cnieg a demandé au ministère de tutelle d’intégrer les amendements portés par les organisations syndicales, dont celui portant un décalage de trois ans du calendrier paramétrique, qui doit s’appliquer au 1er janvier 2025. Les membres du conseil supérieur de l’énergie ont porté un certain nombre d’amendements, qui n’ont pas été retenus dans le décret publié. Nous avons affaire à un exécutif qui ferme les yeux sur ce qui se passe dans le pays. La contestation sociale, massive entre janvier et juin, a été ignorée. Jusqu’à l’application de ce décret, l’exécutif est passé en force et cela ne sera pas sans conséquences.

Malgré tout, des avancées ont-elles été obtenues ?

Dans les IEG, les agents évolueront à deux vitesses, entre les bénéficiaires du régime spécial pionnier et ceux rattachés au régime général. Pour ces derniers, nous avons obtenu que les futurs embauchés des IEG puissent bénéficier, une fois à la retraite, des avantages sur le tarif de l’énergie, des droits familiaux et du capital décès. Ces revendications étaient portées par la FNME-CGT. Ces garanties ne sont pas des moindres pour les futurs salariés, à compter du 1er septembre 2023.

Mis à part la pension spéciale de retraite qui sera fermée, les nouveaux embauchés bénéficieront-ils des autres acquis de la branche des IEG ?

Pour les futurs salariés, d’autres acquis restent à confirmer, comme l’accès à la Camieg (l’organisme qui gère le régime spécial de Sécurité sociale des IEG) ou encore la possibilité de bénéficier de nos œuvres sociales. Ce sont deux gros piliers de notre statut, tout comme l’indemnité de fin de carrière et la prestation orpheline. Malgré la publication du décret, nous avons encore la possibilité de faire bouger les lignes et de gagner sur ces éléments lors de la négociation de l’application de la réforme des retraites.

Qu’en est-il de la reconnaissance de la pénibilité des métiers ?

La bataille syndicale est aussi à mener pour l’accès aux droits de branche, comme celui du service actif. Cet accord de branche, non statutaire, date de la réforme Sarkozy, en 2010. Ainsi, les nouveaux embauchés ont obtenu des congés compensatoires puisqu’ils ne pouvaient plus bénéficier de ce qu’on appelle pour les plus anciens les services actifs. Ces comptes jours-épargne retraite sont une reconnaissance de la pénibilité de leur métier. Un agent qui atteint 100 % de service actif dans son métier peut bénéficier d’un départ à la retraite cinq ans avant l’âge légal, en utilisant le compte jours-épargne retraite, afin de toucher une rémunération. Ce sujet est majeur pour les agents dont la pénibilité du métier est reconnue, c’est un élément très important pour l’attractivité de nos métiers, techniques notamment, qui ne doit pas être minimisé à l’heure où, dans la filière de l’énergie, il devrait y avoir de grandes campagnes de recrutement… mais pour des embauches qui ne seront plus désormais au régime spécial pionnier, malheureusement.


MAC apporte tout mon soutien à

@Seb_Menesplier, secrétaire général de la FNME-CGT. La répression à l’encontre des syndicats n’a pas sa place dans notre pays. Défendons un service public de l’énergie, soutenons la CGT.

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