Choisi comme tête de liste du PCF aux élections de juin 2024, Léon Deffontaines entend rassembler largement. Il explique ses trois priorités, du rôle diplomatique de l’Union à la question du pouvoir d’achat.
Léon Deffontaines a été élu tête de liste par 91 % des 22 598 adhérents du PCF qui ont participé au vote qui s’est tenu jusqu’au 12 novembre. Il définit trois priorités pour sa campagne européenne (la paix, la lutte contre le réchauffement climatique et le pouvoir d’achat) et veut constituer une liste de large rassemblement.
Vous avez été choisi par 91 % des militants communistes. Quelle est votre réaction ?
C’est un honneur déjà. Je suis donc à la tête d’une liste de large rassemblement du PCF. Nous entrons officiellement en campagne et je suis très enthousiaste. Ce vote large et unanime montre la détermination de notre parti à entrer de nouveau en campagne pour les européennes. Notre programme peut rassembler. J’invite tous les partis à venir nous rejoindre s’ils se retrouvent dans ce projet que nous portons. Nous le construirons avec d’autres militants de gauche. Nous rassemblerons également le monde du travail et de la création, avec des syndicalistes et des travailleurs confrontés aux politiques libérales en position éligible.
Vous avez défini trois priorités. Quelles sont-elles ?
La paix, la lutte contre le réchauffement climatique et pour le pouvoir d’achat. Ce dernier est, de loin, malgré le contexte international, la première préoccupation des Français. À juste titre, étant donné que les prix explosent et que les revenus stagnent. Des politiques peuvent être menés à l’échelle européenne pour redonner du pouvoir d’achat. La hausse des factures énergétiques joue un rôle prépondérant dans l’inflation. Les Français en ont encaissé encore une cet été, et une nouvelle est prévue pour le mois de février. Nos collectivités territoriales et nos entreprises sont également pénalisées, ce qui contribue à l’augmentation des prix. En grande partie, la faute incombe au marché spéculatif de l’énergie au niveau européen. Nous proposons donc d’en sortir, de façon à pouvoir vendre l’électricité que nous produisons en France à prix coûtant : entre 50 et 70 euros le mégawattheure, alors qu’il est revendu sur le marché européen 300 voire 600 euros. Cela permettra de redonner du pouvoir d’achat aux Français, en faisant baisser leurs factures.
Le pouvoir d’achat, c’est aussi les salaires. Peut-on changer la répartition des richesses produites dans le cadre de l’Union européenne ?
Pour les salaires, il faut s’attaquer à la mise en concurrence des travailleurs européens. Elle tire les salaires vers le bas. Des entreprises ont délocalisé à l’est de l’Europe pour cette raison. Nous nous opposerons à l’élargissement de l’UE vers des pays dont les conditions salariales sont très en dessous des nôtres. Il faut aussi agir sur l’emploi, via plusieurs leviers. Les services publics en sont un. Mais il faut pour cela remettre en cause les règles budgétaires austéritaires imposées par l’UE aux États membres, et réinvestir.
Ensuite, nous voulons agir en faveur de la réindustrialisation, en Europe comme dans notre pays. Il s’agit de recréer une industrie de pointe dans un certain nombre de secteurs, dans le cadre d’une coopération à l’échelle européenne. Cela doit être financé par la production monétaire : nous proposons la création d’un fonds industriel européen qui financerait les entreprises vertueuses à la fois pour le climat et pour l’emploi. Nous pouvons ainsi créer des emplois durables sur tout le continent.
Comment concilier cette réindustrialisation avec votre deuxième priorité, la lutte contre le réchauffement climatique ?
Cette lutte s’organise à l’échelle mondiale, régionale, nationale… Le réchauffement climatique n’a pas de frontières. Notre discours est original : si nous voulons répondre à ce défi, il faut une planification. Elle passera notamment en Europe par des grands travaux utiles à l’environnement. Par exemple, en remplaçant les camions par des trains. Nous sommes partisans de grandes infrastructures ferroviaires, comme le projet Lyon-Turin. Le développement du ferroviaire peut multiplier par 2,6 le nombre de voyageurs transportés d’ici à 2050. Le développement des lignes à grande vitesse ne doit pas non plus se faire au détriment des petites lignes. Il faudra aussi planifier la rénovation de nos bâtiments, la réindustrialisation de notre pays pour rapprocher la production des consommateurs… Enfin, nous devons augmenter la part de l’électricité dans notre mix énergétique. Pour la décarboner, nous avons besoin du nucléaire. Il ne faut pas opposer le nucléaire et les énergies renouvelables, mais investir massivement dans l’un et dans les autres.
Le contexte international avec la guerre entre Israël et le Hamas est particulièrement dégradé. Comment comptez-vous faire entendre un discours de paix dans la campagne ?
On a toujours dit que l’Union européenne, c’est la paix. Pourtant, elle est aujourd’hui incapable d’engager un processus de paix entre l’Ukraine et la Russie, ou d’appeler à un cessez-le-feu à Gaza. Il faut remettre la paix au cœur du projet européen. Je souhaite que l’UE soit une Europe d’avenir, et elle ne le sera qu’à la condition d’être une voix de la paix sur la scène internationale. Il faut pour cela se désaligner des États-Unis et de l’Otan. L’Union européenne et la France doivent retrouver leur propre voix sur les enjeux internationaux.
La France est en train de durcir sa politique migratoire sous la pression de la droite et de l’extrême droite. Quelles sont vos propositions à l’échelle du continent ?
La gauche ne doit pas remettre ces questions à demain. On ne peut pas se satisfaire que des gens dorment dans des camps de fortune. Nous devons régler ce problème. La droite et l’extrême droite veulent fermer les frontières et ne surtout pas organiser l’immigration. Au PCF, nous proposons au contraire de l’organiser, c’est-à-dire accueillir, intégrer et coopérer. Accueillir, c’est installer des centres d’accueil partout en Europe pour les personnes en attente de régularisation. Intégrer implique de répartir les efforts à l’échelle continentale sans les faire reposer sur les seuls États du sud de l’Union. Les travailleurs doivent pouvoir être régularisés et avoir les mêmes droits sociaux que les autres salariés. Enfin, il faut coopérer avec les pays d’origine. Beaucoup de gens fuient la misère. La France et l’Europe doivent changer leurs rapports avec les pays en développement.
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