PCF. Les adhérents tiennent de vendredi 7 avril au lundi 10 avril leur 39 e congrès à Marseille, en pleine bataille des retraites. Perception du communisme, image du parti et adhésion aux valeurs qui y sont associées, popularité de Fabien Roussel… Notre sondage Ifop exclusif.
Ce n’est pas encore une révolution, mais l’image du PCF bouge et ses idées marquent des points dans l’opinion. À l’heure, pour les communistes, d’écrire une nouvelle page lors de leur 39 e congrès qu’ils tiennent jusqu’à lundi 10 avril à Marseille, le sondage Ifop que nous publions montre que « derrière les oripeaux historiques qui demeurent repoussoir, les idées, elles, restent d’actualité, surtout dans un contexte social très fort », souligne Frédéric Dabi, le directeur général de l’institut.
Comment reconquérir les classes populaires, les abstentionnistes, les électeurs RN ?
Un contexte de mobilisation historique contre la réforme des retraites dont les quelque 700 délégués attendus dès ce vendredi dans la cité phocéenne comptent se saisir. Les presque 5 000 amendements remontés des fédérations de la formation brasseront de nombreuses questions.
« Mais la grande question que nous devons affronter, c’est comment, en s’appuyant sur ce qui a grandi dans la société avec ce mouvement social, nous réussissons demain à constituer une majorité politique », résume le porte-parole du PCF, Ian Brossat.
Quelle construction à gauche et quel bilan tirer des quatre dernières années ? Comment reconquérir les classes populaires, les abstentionnistes, les électeurs RN ? Comment renforcer le PCF avec davantage d’élus et d’adhérents ? Autant de questions qui ont fait débat en amont de l’adoption, à près de 82 % en janvier, du texte d’orientation soutenu par Fabien Roussel et la direction actuelle, « L’ambition communiste pour de nouveaux Jours heureux ». Si elles seront à nouveau sur le métier ce week-end, pour y répondre, les communistes ne sont pas dépourvus de points d’appui.
Le poids de l’histoire pèse encore lourd
Certes, selon notre sondage, la conviction que « le communisme est une idée d’avenir » n’est partagée que par 19 % des Français – avec, tout de même, une pointe à 29 % chez les 18-30 ans ; 25 % chez les employés et ouvriers ; 28 % chez les chômeurs.
Et le poids de l’histoire pèse encore lourd. 73 % des sondés estiment que « les idées communistes ont été perverties par les crimes commis au siècle dernier par l’URSS » 61 % l’associent d’abord à « l’échec d’une idéologie en URSS et dans l’est de l’Europe » (c’est 10 points de moins chez les plus jeunes avec 51 %) et 55 % à « la dictature » (45 % chez les 18-30 ans).
« Mais, au-delà de cette vision historicisée du communisme, pour un quart des Français, c’est l’idée de partage des richesses, de mise en commun des biens publics », relève Frédéric Dabi. Pour 26 % des personnes interrogées, il est en effet associé à ces deux idées tandis que 16 % d’entre elles le lient à l’égalité et à « une société dans laquelle l’homme n’est plus exploité ».
« Nous voulons décider de comment nous produisons ces richesses et pour quoi »
Plus encore, lorsque la question porte sur une série d’idées développées par le communisme, l’adhésion est majoritaire. 83 % des Français estiment ainsi que « la lutte des classes est toujours une réalité aujourd’hui ».
C’est même 90 % parmi les classes moyennes (entre 1 900 et 2 500 euros de revenus par mois), et 92 % chez les chômeurs. 80 % jugent aussi que « des secteurs comme la santé, l’éducation ou le logement ne devraient pas être soumis à la concurrence et à la compétition économique ».
72 % estiment que « les salariés, les travailleurs devraient pouvoir décider des choix de leur entreprise ». Une question clé pour le PCF que la formation entend réaffirmer. « Nous voulons décider de comment nous produisons ces richesses et pour quoi. Ça, c’est révolutionnaire et c’est le cœur du projet communiste », martèle ainsi Fabien Roussel.
« L’aspiration à un au-delà du capitalisme est plus présente que jamais »
De même, 64 % des sondés estiment qu’ « il est possible de construire une société basée sur la coopération et le partage des richesses et des pouvoirs » quand 56 % pensent que « le système capitaliste est le principal responsable du dérèglement climatique ».
Soit une forme de « consensus » sur certains items puisqu’une majorité s’y dégage même à droite : 70 % des sympathisants LR estiment ainsi que la lutte des classes est toujours d’actualité. Mais, « au-delà, on observe une très forte adhésion majoritaire à gauche, dans les quatre partis de la Nupes, notamment sur la responsabilité du capitalisme dans le dérèglement climatique », constate Frédéric Dabi.
Un signal qui fait écho à une partie du texte d’orientation en discussion ce week-end sur « l’actualité brûlante du projet communiste », remarque Ian Brossat. « La période où on pouvait nous seriner avec la fin de l’histoire et l’idée que le capitalisme était le seul horizon de l’humanité est révolue. Macron peut répéter les vieux slogans de Thatcher selon lesquels il n’y a pas d’alternative, il ne convainc personne. Tout le monde n’appelle pas forcément cela le communisme, mais l’aspiration à un au-delà du capitalisme est plus présente que jamais », développe l’élu parisien.
Pour 42 % des Français le PCF est « un parti qui veut changer la société »
L’image du PCF, elle, n’est d’ailleurs pas gelée dans le temps. « On a une lecture qui reste clivée, mais clairement auprès de l’ensemble des Français, et plus encore des sympathisants de gauche, cette image bouge de manière assez spectaculaire », analyse le sondeur de l’Ifop.
Ils sont désormais une minorité de Français (42 %) à juger que le PCF est « un parti condamné à disparaître ». Soit 16 points de moins que lors d’une précédente enquête en 2010 (58 %). Ils ne sont d’ailleurs plus que 28 % chez les moins de 35 ans à le penser et 35 % parmi les plus pauvres (moins de 900 euros de revenus).
Parmi les sondés, ils sont également 42 % à estimer que le PCF est « un parti qui veut changer la société » et 34 % qu’il est « utile pour défendre les salariés ». C’est, à chaque fois, 3 points de mieux qu’en 2010, mais pas au niveau des années 1980 et 1990, avec respectivement 56 % et 50 % relevés lors d’une enquête de 1993, et 52 % et 48 % en 1986.
Alors que l’un des objectifs affichés de la candidature de Fabien Roussel à la dernière présidentielle était de faire valoir les « spécificités » du PCF, seuls 39 % des Français jugent qu’il est un parti comme les autres, contre 48 % en 2010 et 52 % en 1993. « C’est à noter dans un contexte de défiance généralisée à l’égard des partis », pointe Frédéric Dabi. En revanche, seuls 18 % d’entre eux pensent qu’il « présente des solutions originales ». C’est 7 points de plus qu’en 2010 (11 %), mais là encore moins élevé qu’en 1993 (24 %).
Fabien Roussel « incarne l’avenir de la gauche » pour 38% des Français
Reste alors « qu’on pourrait penser la marque communiste figée dans un passé plus ou moins glorieux, plus ou moins compliqué à assumer, ce n’est pas le cas : un tiers des Français estiment que c’est un parti qui s’est transformé », pointe le politologue, qui voit dans la figure de Fabien Roussel un atout pour la formation. D’ailleurs, 45 % des sondés (62 % des sympathisants de gauche) pensent que son actuel secrétaire national « modernise le Parti communiste français ».
Notre enquête Ifop confirme, en outre, qu’une majorité de Français, 54 %, le trouvent « sympathique ». La moitié d’entre eux estiment aussi qu’il s’oppose bien au gouvernement tandis que, pour 38 %, il « incarne l’avenir de la gauche » (54 % parmi les sympathisants de gauche), et 30 % qu’il a « la stature pour gouverner ».
« En termes de visibilité, d’authenticité, de proximité, il fait bouger les choses au PCF », résume le sondeur de l’Ifop. Concernant « la proximité avec les préoccupations des Français, il est à 48 %, poursuit Frédéric Dabi. N’oublions pas que c’est l’item sur lequel le niveau d’exigence et la sévérité des Français sont le plus importants. À titre de comparaison, dans une de nos enquêtes pour Paris Match , parue mardi, Emmanuel Macron tombe à 18 %, Fabien Roussel a 30 points de plus. »
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