L’importance de la surveillance et de l’encadrement des élèves durant le temps scolaire a été mis en exergue dans l’actualité en lien avec l’assassinat de Dominique Bernard, professeur de lettres à Arras.
Les assistants d’éducation méritent une revalorisation tant sur le plan de la formation et des conditions d’exercice que de la rémunération
Sébastien Laborde, Conseiller départemental de la Gironde et responsable de la commission éducation du PCF
Depuis quinze ans, la part d’éducation par élève constitue une part du PIB en baisse régulière. La dépense publique, particulièrement la dépense de l’État pour l’éducation nationale, diminue. Cela coïncide avec la baisse du temps d’enseignement en classe pour tous les élèves.
Plus d’une année sur le temps de la scolarité obligatoire, plus de deux ans pour les élèves de lycée professionnel. Sans compter les heures d’absence non remplacées, en particulier dans les établissements et sur les territoires populaires. L’école aujourd’hui manque de tout.
Elle manque d’enseignants, de personnel administratif ; la médecine scolaire est exsangue. Parmi le personnel, les assistants d’éducation jouent un rôle essentiel. Ils aident les équipes éducatives à la surveillance des élèves en dehors du temps de classe, ils participent à l’animation d‘activités culturelles et sportives au sein des établissements, ils sont un soutien à l’encadrement des élèves lors de sorties pédagogiques. C’est le projet d’établissement qui définit leur rôle, qui est et doit rester éducatif.
Au regard du manque de personnel, la tentation peut être grande de le mobiliser pour pallier le manque, que ce soit pour des tâches administratives, de prévention dévolues aux médecin et infirmière scolaires, parfois même pour du remplacement d’enseignant – la frontière entre une heure d’étude et une heure de remplacement d’un enseignant est malheureusement vite franchie.
Un projet gouvernemental prévoit même de fusionner les accompagnants d’élèves en situation de handicap (AESH) avec les autres assistants d’éducation (AED). Or, ils ont un rôle bien spécifique. Alors que ceux-ci mériteraient un statut leur donnant droit à une formation, une progression de carrière et une rémunération, ils sont souvent, au sein des établissements en manque d’effectifs, utilisés à des missions qui devraient être dévolues aux AED et, malheureusement, l’inverse est également vrai.
Faut-il, par conséquent, davantage d’assistants d’éducation ? Sans aucun doute, oui, et pour accomplir des missions qui leur sont propres – éducatives, d’animation, de surveillance. Faisant partie intégrante de la communauté éducative au sein des établissements, ils ont besoin d’être formés. Il serait, par exemple, intéressant de réinterroger la question d’un statut des AED leur permettant de préparer les concours de l’éducation tout en étant exerçant leur emploi au sein des établissements.
Aujourd’hui, ces AED sont recrutés par les chefs d’établissement, sous contrats précaires payés à peine au niveau du Smic. Leur formation se fait « sur le tas » pour l’essentiel, tutorée par les conseillers principaux d’éducation. Confrontés à la pénurie de moyens humains, ils sont souvent employés à des tâches administratives. Ils jouent pourtant un rôle essentiel au contact des élèves qui mériterait, comme tous les métiers de l’éducation, une revalorisation, tant sur le plan de la formation, des conditions d’exercice, de la rémunération, que de la reconnaissance de leur rôle en direction de la jeunesse.
Le statut d’assistant d’éducation, introduit en 2003, a augmenté la précarité et le temps de travail, et fait baisser la rémunération.
Emmanuel Séchet, Secrétaire général adjoint du Snes-FSU
De manière générale, alors qu’on en demande toujours plus à l’école, il faut plus d’adultes dans les établissements scolaires. Plus de professeurs pour des classes moins chargées, plus de psychologues de l’éducation nationale, plus de CPE, plus d’infirmières et d’assistantes sociales. Et ce personnel doit être reconnu et respecté pour ce qu’il est et ce qu’il apporte aux élèves. Il faut aussi plus d’assistants d’éducation (AED).
Dans les collèges, lycées généraux technologiques et professionnels, il y a en moyenne 11 AED pour 1 000 élèves. C’est très insuffisant pour assurer les missions de base : surveiller les cours de récréation, les toilettes, la restauration, les entrées et sorties, les études surveillées. Cela impacte le fonctionnement des établissements. Mais, au-delà de ces manques clairement identifiables, c’est l’accompagnement des élèves qui est empêché.
Loin d’être de simples surveillant·e·s, les AED sont des référents adultes indispensables pour les élèves en dehors de la classe. La loi du 2 mars 2022 visant à combattre le harcèlement scolaire a d’ailleurs introduit la possibilité de recruter des AED en CDI au motif qu’ils (et elles) sont précieux pour l’accompagnement de nos élèves au quotidien et que la lutte contre le harcèlement doit s’appuyer sur eux. Mais leur nombre n’a pas augmenté et le CDI n’a rien changé à leurs conditions de travail.
Depuis la rentrée 2023, la promesse inconsidérée du président de la République de remplacer toutes les absences de professeurs se traduit par la possibilité d’utiliser les AED pour encadrer des séquences numériques. C’est une nouvelle pression qui est mise sur les équipes de vie scolaire au détriment de leur mission première, qui est de maintenir un climat scolaire propice aux apprentissages et d’accompagner les élèves.
Plus récemment, la question de la sécurisation des établissements s’est imposée. Les solutions purement techniques – caméras, portiques – sont des mirages dangereux. Il faut privilégier les moyens humains, mais les AED ne sont pas des personnels de sécurité. Ils et elles ne sont ni formés, ni recrutés pour cela, et les mobiliser pour pallier les manques en la matière fragilise encore les établissements.
Le statut d’AED, introduit en 2003, a augmenté la précarité et le temps de travail, et fait baisser la rémunération. Il a aussi introduit une confusion des missions qui aggrave les effets des sous-effectifs. Alors, il faut recruter massivement des AED, mais il faut aussi augmenter leur salaire, qui est aujourd’hui au niveau du Smic horaire.
Il faut mettre fin à l’annualisation du temps de travail qui impose aujourd’hui des services hebdomadaires de plus de quarante heures. Il faut en finir avec le recrutement par les établissements et donner cette compétence aux recteurs. Enfin, parce qu’il est important qu’il y ait des étudiants dans la vie scolaire, il faut rendre plus attrayante la mission d’AED pour les étudiants.
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