Voyage au coeur de l’Université d’été du PCF… (1)

 

Puisqu’il m’avait été interdit de présenter à l’université d’été une communication, qui aurait reflété le niveau de réflexion auquel nous avons plus ou moins abouti dans histoireetsociete, je vous avais expliqué que je privilégierai l’écoute et une sorte d’audit sur ce qui se serait dit dans ces trois jours. L’avantage de ce que je vais tenter de vous exprimer est qu’il s’agit non seulement d’un diagnostic qui me serait personnel mais de nombreux “points” que j’ai pu faire avec différents groupes, camarades venus d’horizons divers.

Le bilan global est plutôt favorable comme me l’exprimait au retour dans la voiture un jeune camarade de Marignane d’une vingtaine d’années qui venait d’adhérer et qui se rendait dans ce type de réunion pour la première fois: partout des débats calmes, des échanges de qualité, clairs ou chacun disait sans langue de bois ce qu’il vivait et les commentaires que lui inspiraient l’intervention. Il a résumé: “Ce sont des gens motivés, honnêtes, et avec qui on peut échanger”. Avec la fougue de son âge, il regrettait qu’il n’y ait pas assez de formation “marxiste-léniniste”” et même de combativité mais cela l’avait mis en appétit, comme je l’incitais à aller vers les JC, il m’a déclaré : je préfère le parti puisqu’on va tous y finir autant vaut commencer à agir à ce niveau. Cela n’a l’air de rien mais cela dit bien une impression général plutôt favorable et qui nous a laissé à la fois lucides sur ce qui restait à accomplir et avec espoir sur ce qui était en train de naitre…

Au titre du positif, l’énorme travail accompli par les camarades de la fédération de l’Hérault… C’est une équipe de jeunes et de moins jeunes qu’il fallait observer : Dans un “corum” véritablement kafkaéen” qui semblait fait exprès pour perdre les congressistes, entre un système de niveaux difficilement compréhensible, une absence de renseignement sur papier qui faisaient errer les plus de vingt ans maniant difficilement les GPS de leurs portables, il y avait cette équipe de l’Herault gérant le bar, la nourriture, l’accueil, passant leur temps à nettoyer, à empêcher l’excès de consommation alcoolisé tout en assurant dans la chaleur le confort de chacun, eux mêmes à deux doigts de la rupture physiques avec une volonté de coordination interne qui relevait de la stratégie de batailles de l’empire ou de celles des grands palaces du système Escoffier… Avec la particularité d’avoir le médecin qui assure une permanence de l’aube au soir devant la caisse… bref ce que nous avons tous connu du parti ces moments d’intense mobilisation de toutes les bonnes volontés qui soudent les camarades… Cet exploit de la fédération de l’Hérault n’avait que l’équivalent de celui d’Elodie venue de Toulouse avec un énorme stand de livres, cette frêle jeune femme avec qui nous partageons la passion pour la culture et qui comme tant d’autres espèrent qu’un peu de temps sans campagne électorale pourrait enfin l’aider à lancer des batailles pour la culture, des séances de cinéma… Je me dis en discutant avec elle et aussi avec les camarades du Pas de calais que vraiment il n’y a que dans ce parti là que l’on peut tout à coup échanger y compris avec des camarades ouvriers des réflexions enthousiastes sur le Napoléon d’Abel Gance, sur le livre des texte d’Aragon en 1935… On va au syndicat pour se défendre mais au parti pour s’approprier le monde, pour savoir et pas seulement s’informer…

Il y a cet échange entre générations. Cette rencontre de la vieille dame que je suis avec des jeunes gens y compris celui avec qui nous échangeons sur la guitare classique et l’apport de Cuba dans ce domaine… ou ce jeune Ukrainien qui dénonce ce que l’on fait de son pays … à cause de Zelensky et de tous ceux qui veulent opposer Russes et Ukrainiens, alors que sa mère est ukrainienne et son père russe… Cette jeune femme que je découvre qui a réussi à créer la seule section d’entreprise de cette taille…

De ce brassage je pourrais vous parler longtemps mais tous ceux qui ont fréquenté les manifestations du parti connaissent cela, il faut passer à un autre bilan parce que c’est selon moi ce qui a permis tout ce que je vous ai décrit précédemment, un contexte politique plus ouvert, plus disponible que ce que l’aurait voulu certains qui au niveau des débats avaient peut-être espéré “serrer les boulons autour d’un consensus” et se sont heurté à un questionnement sans hostilité mais opiniâtre…

Une question commence à surgir : comment se fait-il que nous ignorons toutes ces expériences, ces questionnements? Ce camarade des Hautes Alpes que j’a rencontré dans une autre vie et qui demande pourquoi le membre de l’exécutif qui est chargé de l’aider dans se fédération n’est jamais venu ? C’est impalpable mais ça me fait penser au début des Communistes d’Aragon : souvenez vous cet enseignant a décidé d’aller aider à la frontière pour l’accueil des Républicains espagnols dans leur exode face aux troupes de Franco. Il est face à un bordel tel que le moindre acte devient impossible et au bout de quelques jours il en arrive au constat qui veut que le désordre soit organisé. Les fascistes de Franco ont leurs alliés dans cet accueil…

L’exploit que réalisent les camarades de l’Hérault, Elodie toute seule avec sa montagne de livres, et plus encore ce questionnement sur la nécessité de “s’occuper du parti” , l’interrogation sur certaines dérives qui n’ont rien à voir avec ce qui a été décidé au Congrès tout ça fait revenir sans cesse cette image du désordre organisé, d’une absence de coordination qui a peut-être un sens ? C’est de cela que je vais vous parler, l’absence de coordination a une triple dimension:

  • La première c’est tout ce qui empêche de construire une opinion commune propre au PCF et qui pourrait alors servir de colonne vertébrale à lagauche, à la nation, ce que j’appelle le manque théorique… La théorie c’est une carte d’état major, ce n’est pas le terrain dans toute son étendue, sa complexité mais c’est justement ce qui permet de tracer un itinéraire et ne pas se perdre. Il y a une volonté d’empêcher que les communistes aient leur carte, d’où provient cette “volonté” ? …
  • La seconde dimension, à partir de là c’est l’organisation à la fois l’échange d’expériences, la réflexion collective et la démultiplication des efforts.. face à cela il y a la censure mais il y a aussi le fait que personne ne parait s’occuper de ce que jadis on appelait la vie du parti… il y a pire des initiatives sont court-circuitées : la fédération va accomplir quelque chose de mieux mais ça ne se réalise jamais. On pourrait multiplier les exemples de la force d’inertie.
  • La troisième dimension c’est de substituer sans cesse à l’activité propre du parti, des activités collectives. Ainsi il est clair que comme la LFI a voulu par la Nupes s’approprier toutes les activités avec un seul but la campagne présidentielle de Mélenchon, le PS tente de lancer partout des comités du Nouveau Front populaire qui vont interdire toute activité propre du parti. Le cas de la lutte pour la paix illustre particulièrement ce vers quoi peut conduire cette démarche.

je ne sais pas si les camarades qui étaient dans cette université d’été en avaient tous conscience mais ils ont tous agi pour à travers les tâches du moment, le bilan de ces élections pour que s’amorce dans le calme et la fraternité une réflexion sur les problèmes rencontrés pour l’activité propre du parti. L’extraordinaire sur lequel je voudrais insister c’est qu’a contrario de cette désorganisation sous sa triple dimension, il y a eu des moments forts qui se sont inscrits et ce sont de ces moments en relation avec les débats dont nous allons avoir l’occasion de vous parler, et comme l’a inauguré Franck Marsal à travers son article- intervention sur le Congrès et l’Ukraine, nous allons vous montrer ce qui est en train de surgir et qui peut représenter un chemin collectif important.

Danielle Bleitrach

 


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