COP26. Les jeunes mettent un coup de chaud

Le 1er novembre, à Glasgow. Des membres français du groupe de lutte contre le changement climatique Anv-Cop21 brandissent des portraits d’Emmanuel Macron pour rappeler ses engagements non tenus. Julien Marsault/Hans Lucas/AFP

La « génération climat » place peu d’espoirs dans la conférence de Glasgow, mais espère peser sur les négociations. Une marche mondiale était organisée ce samedi.

Dossier Tous nos articles sur la COP26

Pour eux, c’en est clairement fini des petits gestes. Ce qu’ils veulent, c’est bousculer le système, pas lui mettre des pansements. « On doit changer la structure de nos sociétés mais on ne trouvera pas les solutions avec ceux qui sont responsables de la situation actuelle », dénonce l’activiste Stacy Algrain, fondatrice de Penser l’après. « On n’a pas les ressources pour réaliser nos actions, on n’a pas les lois derrière nous. Les gouvernants ont un discours hypocrite », abonde Sixtine Dano, militante au sein ­d’Alternatiba et de l’ANV-COP21.

Une défiance à l’égard des puissants

Lorsque la jeunesse s’engage contre le dérèglement climatique, pour beaucoup, elle a le visage – très médiatique – d’une Suédoise de 18 ans qui dit sans ambages sa colère face à l’inaction des décideurs. Mais dans le sillage de Greta Thunberg, ils sont des millions, issus des pays du Nord comme du Sud. À l’étranger, ces militants emblématiques s’appellent Vanessa Nakate, Evelyn Acham, Harriet O’Shea ou Elizabeth Wathuti. En France, ils se nomment Camille Étienne, Hugo Viel, Stacy Algrain, Nathan Méténier ou Léna Lazare.

Avec la COP26, qui réunit jusqu’au 12 novembre les représentants des États à Glasgow (Écosse), cette « génération climat » veut hausser le ton, lasse des promesses non tenues. Tous ont en commun une défiance à l’égard des puissants qui les conduit à ne pas attendre grand-chose de ce sommet international annoncé, une nouvelle fois, comme celui de la dernière chance. Malgré tout, ils continuent de vouloir faire pression : samedi, ils l’ont fait lors de la Journée mondiale pour la justice climatique, avec des manifestations aux quatre coins de la planète.

« Il manque un calendrier, des jalons, des chiffres… »

Si, d’ores et déjà, des pays se sont engagés à stopper la déforestation d’ici à 2030, à diminuer les émissions de méthane ou à renoncer partiellement au charbon, les militants attendent des résultats concrets. « Les dirigeants se fixent des objectifs mais ils n’expliquent jamais comment ils font ni comment ils les financent. Il manque un calendrier, des jalons, des chiffres… » égraine Stacy Algrain, 24 ans. Sixtine Dano n’a « pas énormément d’espoirs » non plus sur le fait que la COP26 puisse être une réussite, et encore moins le grand soir écologique. Si elle s’est rendue à Glasgow, c’est pour « ne pas laisser Emmanuel Macron dérouler son discours de greenwashing. Il se permet de faire la morale alors que la France ne respecte pas ses engagements, elle a même été condamnée deux fois au tribunal pour cela ». Même pour ceux qui sont les plus intégrés aux débats et optimistes, à l’instar de Nathan Méténier, un des jeunes conseillers sur le climat du secrétaire général de l’ONU, il s’agit de « limiter la casse ».

« Cette génération a compris que les COP sont devenues un théâtre des bonnes résolutions », explique l’historien Alexis Vrignon, spécialiste des mouvements écologistes. Ce dernier rappelle que « les mobilisations de la jeunesse n’ont jamais eu d’impact sur ces rendez-vous ». En 1992, lors du sommet de la Terre à Rio, les jeunes étaient déjà mis en avant comme des lanceurs d’alerte. Trente ans plus tard, ils n’ont toujours pas réellement voix au chapitre. « Dans les COP, il y a trois acteurs : les États, les ONG et les entreprises. Et dans ce trio, le couple État-entreprises s’impose. Sauf que les militants sont mieux formés aujourd’hui qu’avant et voudraient peser davantage », analyse Alexis Vrignon.

« Les organisations de jeunesse n’ont pas une armée de lobbyistes »

Ils ne veulent donc pas seulement poser sur la photo. « Les décideurs passent leur temps à nous rire au nez. Ça fait bien d’être pris en photo avec des jeunes alors ils viennent nous voir. Mais dès qu’il s’agit de prendre des décisions, ils nous mettent de côté », s’agace Stacy Algrain. Présent à la COP26, Nathan Méténier a pu s’entretenir avec ­Emmanuel Macron et Barbara Pompili, la ministre de l’Écologie. Une entrevue qu’il a obtenue in extremis : « Ce n’est pas normal ! Ils devraient nous rencontrer car on vient pour parler d’avenir, regrette Nathan ­Méténier. La COP est importante pour nous, c’est l’endroit où l’on a accès aux décideurs. Et nous, les organisations de jeunesse, n’avons pas une armée de lobbyistes… »

 

Face à l’indifférence des responsables ­politiques, ils s’organisent. « Cette rencontre internationale permet aux activistes de se rejoindre pour créer des rapports de forces puissants face aux décideurs », assure Sixtine Dano, qui a déroulé une banderole de 140 m2, où le président français est représenté avec des flammes derrière lui et l’inscription « Macron regarde ailleurs ».

Les manifestations, pour eux, ne suffisent plus : « Nous devons attaquer sur tous les fronts : mettre la pression là où sont les décideurs, mais aussi faire des actions sur les réseaux sociaux pour vérifier tout ce qu’ils disent. À nous d’apprendre les règles du jeu qu’ils ont créé et de les retourner contre eux », ajoute Stacy Algrain. Nathan Méténier préfère jouer la carte institutionnelle en demandant à ­Emmanuel Macron « la création d’un conseil des jeunes pour le climat, construit et géré par les organisations de jeunesse ». Ce qui ne convainc pas spécialement Stacy Algrain : « Ça reste une institution en marge de celles qui ont le pouvoir. On veut des jeunes dans les organes décisionnaires ! »


Climat, COP26 : on fait le point sur les enjeux

 


En savoir plus sur Moissac Au Coeur

Subscribe to get the latest posts sent to your email.

Donnez votre avis

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.