Les encombrantes amitiés fascistes de Marine Le Pen

La cheffe du RN cherche à masquer ses liens avec des manifestants du défilé du 6 mai, à Paris, et divers militants adeptes du coup de poing et du nazisme. Ceux-ci sont pourtant nombreux, directs et tenaces.

Lionel Préau / Riva Press

Frédéric Chatillon passe aux menaces : « J’ai très envie de t’apprendre les bonnes manières », écrit-il sur Twitter, le 9 mai, au militant Raphaël Arnault. Le porte-parole de la Jeune Garde antifasciste vient alors de révéler l’identité du néonazi qui, le 6 mai à Paris, ouvrait la voie du terrifiant cortège d’extrême droite rendant hommage à Sébastien Deyzieu, membre d’un mouvement pétainiste, mort le 9 mai 1994. Frédéric Chatillon n’a guère apprécié que cette information soit mise sur la place publique, insultant Raphaël Arnault : « Le petit tapin du système, la gorge profonde, la poucave, la balance. »

L’auteur de ces injures est un vieil ami de Marine Le Pen, rencontrée sur les bancs de la fac de droit, à Assas, au début des années 1990. Lui est alors président du Groupe union défense (GUD), adepte du coup de poing avec ses troupes surnommées Waffen Assas et fête chaque année l’anniversaire d’Hitler…

Une « amitié profonde » et des « connivences politiques et idéologiques »

Une « amitié profonde » et des « connivences politiques et idéologiques » le lient à Marine Le Pen, selon l’historienne spécialiste de l’extrême droite Valérie Igounet, citée dans le Journal du dimanche en mars .

Cette camaraderie, Marine Le Pen cherche à la cacher depuis la condamnation à deux ans de prison de Frédéric Chatillon dans l’affaire des kits de campagne surfacturés, pendant la présidentielle 2012, via sa société Riwal.

Pour prendre la suite de cette dernière afin de continuer à gérer la communication du RN, e-Politic est monté en 2014. Une entreprise dont le second investisseur est le groupe Erer, lui-même détenu par la société Asdall, dirigée par Frédéric Chatillon. Celui-ci aurait donc encore participé à la campagne de Le Pen en 2022, pour laquelle e-Politic a facturé plus de 750 000 euros de dépenses en communication politique.

La génèse de la création du Comité du 9 mai

Frédéric Chatillon n’était pas présent à la manifestation fasciste du 6 mai, car il vit « maintenant en Italie », explique-t-il dans un entretien au site de la fachosphère Breizh-Info, ce mercredi 10 mai. Il se réjouit toutefois que ses « vieux amis y participent » et tient « à rendre hommage et à féliciter ceux qui entretiennent le flambeau ».

L’ami de Marine Le Pen raconte aussi la genèse de la création du Comité du 9 mai (organisateur de la manifestation), avec le Front national de la jeunesse et l’aide de dirigeants du FN. Les « vieux amis » en question sont Axel Loustau et Olivier Duguet. Également anciens du GUD, ils étaient trésoriers du microparti de Marine Le Pen, Jeanne, jusqu’en 2022.

Le premier, qui a connu la députée à Assas également, était élu RN jusqu’en 2021 au conseil régional d’Île-de-France et est lié, au même titre que Frédéric Chatillon, à e-Politic. Un proche, donc, au moins professionnellement, si ce n’est amicalement.

« Ce ne sont pas mes  proches», jure Marine Le Pen

Marine Le Pen s’en est farouchement défendue, mardi 9 mai. À Sud Radio, tout en considérant « inadmissible » le défilé néonazi du 6 mai, elle jure, à propos de Loustau et Duguet : « Ce ne sont pas mes proches. Tous les gens qui, à un moment ou à un autre, ont eu une responsabilité de comptable ou même d’élu, ne font pas partie de mes proches. »

Ce type de connexions entre le RN et les manifestants du 6 mai ne s’arrête d’ailleurs pas là. En première ligne, on trouve Paul-Alexis Husak, a révélé Libération. Un ancien du groupuscule dissous des Zouaves Paris, qui était salarié de e-Politic encore récemment et pendant la campagne présidentielle de 2022. Un ex-membre de mouvement violent qui a donc, de fait, travaillé pour Marine Le Pen.

Le Rassemblement national de la jeunesse nage aussi en eaux troubles

Dans cette porosité entre les extrêmes droites institutionnelles et ouvertement fascistes, le Rassemblement national de la jeunesse nage aussi en eaux troubles. Depuis novembre, celui-ci est dirigé par Pierre-Romain Thionnet, secondé par Luc Lahalle.

Deux anciens du syndicat la Cocarde étudiante, suspecté de plusieurs faits de violences, en 2023 lors de blocages d’universités, ou encore en 2021, pour avoir attaqué une manifestation contre les violences faites aux femmes à Paris.

Beaucoup de ses membres ont rejoint le GUD parisien après sa renaissance en novembre 2022. Libération révèle en outre que ces deux personnages ont tracté, dimanche 7 mai, en compagnie de Raphaël Ayma, un cadre du groupuscule néofasciste Tenesoun, bien représenté la veille à la manifestation pour Sébastien Deyzieu.

Quant à Mathieu Duarte, l’homme à la cagoule dont Raphaël Arnault a révélé l’identité, il grenouille dans les milieux néonazis de Clermont-Ferrand et partage régulièrement, sur Twitter, des contenus du RN.

Certe, Marine Le Pen n’y est pour rien, mais elle ne peut se dissocier de ces diverses mouvances comme elle tente de le faire. Malgré la dédiabolisation, le RN reste intimement lié aux fascistes de tout poil.


En savoir plus sur Moissac Au Coeur

Subscribe to get the latest posts sent to your email.

Donnez votre avis

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.