Éducation : quand le gouvernement taille en cachette dans les effectifs de surveillants

La suppression de plus de 1 100 postes d’assistants d’éducation est prévue dans la loi de finances 2024. Une mesure délétère pour les élèves, que le gouvernement avait pris soin de dissimuler au moment de la discussion budgétaire.

C’est le président de la Commission des finances à l’Assemblée, le député LFI de Seine-Saint-Denis Éric Coquerel, qui a révélé le pot aux roses dans un message sur X (Ex-Twitter). Dans le projet de loi de finances pour 2024, le gouvernement a – semble-t-il sciemment – dissimulé la suppression de plus de 1 100 postes d’AED (assistants d’éducation, auparavant appelés surveillants).

C’est, à l’époque, Gabriel Attal qui occupait la rue de Grenelle. Une « vérification ultérieure a révélé que le ministre excluait de sa présentation chiffrée une partie des AED, soit ceux bénéficiant du dispositif de préprofessionnalisation proposé aux futurs professeurs ». 1 112 postes passeraient ainsi à la trappe à la rentrée prochaine.

L’expert du site le Café pédagogique, François Jarraud, est allé vérifier. Et il confirme : « Cette baisse du nombre d’AED n’apparaît pas clairement dans les « bleus budgétaires », les documents remis aux parlementaires lors de la discussion de la loi de Finances ». Qui plus est, précise-t-il, « le « bleu » 2024 ne donne pas d’évolution comparée de 2023 à 2024 pour cette catégorie, alors que c’est la règle dans ce genre de document, à l’unité près ».

Un vivier de recrutement remis en cause

On peut toujours tenter de se persuader qu’il s’agit d’une erreur. Quoi qu’il en soit, cette perte de plus de 1 100 postes est à la fois dommageable pour les personnels et les élèves, et très significative d’une forme de duplicité gouvernementale. Par qui elle vise : les AED en préprofessionnalisation, c’est un dispositif monté par… Jean-Michel Blanquer et présenté comme une première réponse à la fameuse « crise de recrutement ».

Ces étudiants, en échange d’une rémunération certes bien faible (au mieux, 1 200 euros brut mensuels), participaient – en plus de leur cursus de licence ou master – à des activités pédagogiques au sein des établissements, à raison de 6 à 8 heures par semaine. L’idée était de permettre une première approche du métier à ceux qui se destinaient aux métiers de l’enseignement. Et donc, à l’heure où la « crise de recrutement » se fait toujours plus aiguë, c’est ce potentiel vivier qui subit une coupe spécifique.

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Une manifestation d'AESH à Paris le 5 avril 2022. © Pierrick Villette / ABACA

Éducation : drôles d’étrennes pour les AED et AESH

Mais moins d’adultes, c’est moins de sécurité dans les établissements. Vis-à-vis d’éventuelles (et heureusement, rares) menaces venues de l’extérieur, où caméras et autres coûteux portiques de sécurité ne remplaceront jamais la présence et la vigilance humaine. Il en est de même s’agissant de la sécurité et de la tranquillité à l’intérieur des établissements : là non plus, les caméras ne remplacent pas l’intervention humaine. D’autant que leur coût interdit d’en mettre partout où elles seraient utiles, sans même prendre en compte les lieux où leur présence est interdite – les toilettes, par exemple.

Une décision qui dément la volonté de lutter contre le harcèlement

En outre, alors que tous ces derniers mois ont donné lieu, après des drames où l’attitude de l’Éducation nationale a été mise en cause, à un grand déploiement de communication pour expliquer que la lutte contre le harcèlement en milieu scolaire était devenue une « priorité absolue », ces suppressions de postes font litière d’une telle affirmation.

Les AED, par leur connaissance des élèves, la proximité qu’ils et elles peuvent avoir avec eux, leur présence physique dans les lieux qui peuvent abriter des comportements harcelants, sont le premier maillon de la chaîne de détection et de protection.

Réduire leur nombre, et de manière aussi significative, c’est apporter la démonstration que derrière les paroles, il n’y a rien – rien que la volonté de toujours gratter un peu d’argent sur le dos des élèves et des personnels. Et de dégrader encore la perception de l’Éducation nationale par les familles, histoire de pousser un peu plus celles qui le peuvent à partir vers le privé qu’on subventionne, on le sait, sans lui demander de comptes.

 

 


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