La politique du tandem Macron-Bayrou prend prétexte des conflits et des risques actuels de sécurité. Elle s’inscrit dans une guerre sociale visant à satisfaire les profits capitalistes.

© ECPAD via ABACA
Le monde n’a jamais été aussi surarmé. Il n’y a pas d’autre chemin que la paix et le désarmement pour une économie de justice sociale.
Alexandre Derigny
Secrétaire général CGT finances
Une économie de guerre, c’est une économie de la misère et de la destruction. Il n’y a pas d’autre chemin que la paix et le désarmement pour une économie de justice et de progrès social. Alors que les budgets d’austérité succèdent aux budgets d’austérité, alors qu’il faut prendre en compte le réel et qu’« il n’y a pas d’argent magique », subitement, des dizaines, voire des centaines de milliards se mettent à valser pour le réarmement.
Le monde n’a jamais été aussi surarmé : 2 443 milliards de dollars en 2023, en augmentation constante. En France, la loi de programmation militaire 2024-2030 prévoyait déjà une augmentation de 40 % du budget militaire à l’horizon 2030, pour un total de 400 milliards. Maintenant, on nous parle de 90, voire 100 milliards annuels. Même pris dans la poche des plus riches (ce qui a déjà été exclu par Macron), ces milliards manqueraient aux services publics et à la protection sociale. Or il est urgent de réarmer les services publics. Le constat est accablant : une mortalité infantile parmi les plus élevées d’Europe, des urgences régulièrement débordées, de la maltraitance institutionnelle dans les Ehpad et les crèches, des élèves sans profs, des filières menacées de disparition à l’université, une crise du logement inédite depuis soixante-dix ans, des transports publics de plus en plus défaillants…
Si on y ajoute l’industrie, où les plans sociaux se multiplient, les secteurs qui ont un besoin urgent d’un réarmement budgétaire ne manquent pas. Aux finances, ce sont encore des centaines d’emplois supprimés à Bercy et dans les institutions et juridictions financières, après les dizaines de milliers supprimés ces vingt-cinq dernières années. Les crédits d’intervention se réduisent de plusieurs milliards, y compris ceux de l’aide au développement. Alors que les besoins explosent comme la lutte contre la fraude et les trafics. Des mesures budgétaires doivent être prises pour faire la guerre à la misère et à l’injustice sociale.
Ce sont toujours les mêmes, les travailleurs, qui souffrent des conflits armés, et toujours les mêmes, les rentiers et les spéculateurs, qui en profitent. Depuis début 2024, certaines entreprises de « défense » ont plus que doublé leur valeur spéculative et ce n’est pas fini. La fédération des finances CGT se prononce pour un réarmement des services publics et des droits sociaux. Une paix juste et durable repose sur la justice sociale, le droit à l’autodétermination et le respect du droit international. Les négociations de paix sont la seule solution, que ce soit en Ukraine, en Palestine, au Soudan, au Kivu ou ailleurs.
Rappelons ce que disait l’appel des opposants à la guerre du Vietnam paru dans le Washington Post en février 1969 : « Tant que nous serons au Vietnam, nous manquerons de logements, d’éducation et de soins de santé. Nos villes vont pourrir. Nous ne pouvons pas avoir et nous n’aurons pas à la fois des armes et du beurre. Le Vietnam absorbe l’argent dont nous avons désespérément besoin pour les programmes nationaux. »
Les magnats de l’industrie des armes veulent profiter de la situation. L’urgence est au contraire de prendre soin des services publics.
Michèle Leflon
Présidente de la Coordination nationale des comités de défense des hôpitaux et maternités de proximité
Quel paradoxe ! Il est possible de s’affranchir des règles budgétaires européennes pour augmenter les dépenses militaires, pas pour l’école ou la santé. Emmanuel Macron a trouvé une nouvelle ficelle pour détériorer encore davantage les services publics en leur opposant la menace de la guerre, en langage décodé l’opportunité de financer les magnats de l’industrie des armes. Il profite de la situation internationale pour un assaut au service du grand capital contre les salariés, contre le peuple de France. Et le premier ministre de renchérir en interdisant tout retour de l’âge de la retraite à 62 ans.
Alors qu’il faudrait tout faire pour conjurer le danger de guerre, nos gouvernants transforment cette menace en une guerre très concrète contre les services publics, contre la Sécurité sociale, un paradoxe alors que la sécurité collective impose un peuple qui va bien, bien formé, en bonne santé. Elle impose aussi de sortir de la dépendance totale aux approvisionnements étrangers. Déclinons au niveau de la santé. La détérioration de l’accès aux soins en fait une des premières préoccupations des Français. La mortalité néonatale, bon indicateur de l’état de santé d’une population, est en France une des plus élevées de l’Europe occidentale. Il y a urgence ! Et il y a besoin d’efficacité.
L’efficacité, c’est le service public avec des critères de gestion à transformer, à fonder sur la qualité de la réponse aux besoins des populations, dans la proximité et non sur la rentabilité. La place du secteur privé dans l’hospitalisation s’élargit, un gâchis. Même la Cour des comptes, dans un rapport de 2019, avouait ne pas comprendre les montages financiers. Mais le privé n’investirait pas sans profits à la clé ! Le recours aux investissements privés dans des secteurs comme la radiologie inquiète même la très traditionnelle Académie de médecine et les infos inquiétantes sur les Ehpad privés se multiplient. La Sécurité sociale n’a pas à financer les actionnaires !
Il faut donner des moyens au secteur public, mettre fin au départ des médecins hospitaliers vers le privé en allant vers l’égalisation des revenus et des contraintes entre public et privé. Il faut former en nombre des médecins et des paramédicaux en les salariant pendant leurs études en échange d’un engagement de service public.
La Sécurité sociale n’est pas là non plus pour financer les actions des laboratoires pharmaceutiques, d’autant plus qu’en délocalisant ils ont multiplié les pénuries. La sécurité collective, ce serait un pôle public du médicament pour aller vers une autonomie de la France en lien avec les autres pays européens. Face aux tensions internationales, l’urgence c’est de prendre soin des services publics, celui de santé et les autres.
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