L’école est en deuil. Mélanie, assistante d’éducation, a été mortellement attaquée au couteau mardi 10 juin 2025 par un élève de 14 ans lors d’un contrôle des sacs à l’entrée du collège François Dolto de Nogent en Haute Marne. Agée de 31 ans, elle était la mère d’un enfant de quatre ans. L’opération était menée avec la gendarmerie dans le cadre des mesures de sécurité renforcées mises en place ces derniers mois.
Elisabeth Borne : « Nous devons apporter une réponse globale pour protéger les élèves et les enseignants face à cette violence »
La ministre de l’Education nationale Élisabeth Borne s’est rendue sur place. « La nation entière est sous le choc face à ce drame qui a coûté la vie à une assistante d’éducation. En me rendant au collège François Dolto ce jour, j’ai tenu à être aux côtés de la famille de la victime et leur exprimer tout mon soutien, ainsi qu’à l’ensemble de la communauté éducative » a-t-elle déclaré. Elle a rappelé les initiatives et annonces déjà engagées par le gouvernement : lutte contre le harcèlement scolaire, contrôles de sacs inopinés, plan pour la santé mentale des jeunes. « Nous devons apporter une réponse globale pour protéger les élèves et les enseignants face à cette violence » a-t-elle déclaré.
L’auteur présumé des coups de couteau mortels est décrit par la ministre comme un élève « très bien intégré » et issu d’un foyer où « les deux parents travaillent ». Il avait été exclu à deux reprises pour des perturbations de cours. Il ne présentait « aucun antécédent judiciaire » . Il était engagé comme « ambassadeur harcèlement » dans le collège. L’adolescent a été placé en garde à vue. Les motivations de son geste restent, à ce stade, inconnues.
Une montée des violences préoccupante
Ce drame s’ajoute à une série de violences mortelles. Jeudi 24 avril, un lycéen avait tué une camarade et blessé deux autres dans un établissement catholique de Nantes. Depuis la mise en place des contrôles de sacs en mars, après la mort d’un lycéen de 17 ans en Essonne, 6002 fouilles ont été réalisées, menant à la saisie de 186 couteaux et à 32 gardes à vue, selon les chiffres du ministère de l’Éducation.
Sur France 2, le président Emmanuel Macron a déclaré qu’« on va durcir les règles » et qu’un jeune « ne pourra plus acheter un couteau sur internet ». Le Chef de l’Etat a également annoncé l’interdiction des réseaux sociaux pour les moins de quinze ans. Sur le plateau de TF1, le premier ministre a aussi annoncé l’interdiction d’acheter une arme blanche et rappelé sa volonté d’expérimenter des portiques à l’entrée des établissements, comme l’avait initié Laurent Wauquiez (LR) dans les lycées d’Auvergne-Rhône-Alpes.
Pour le Premier ministre François Bayrou : « On a la certitude qu’on est devant une épidémie. Il y a deux choses à regarder : le sujet des armes, de leur contrôle, et ceux qui portent les coups, les adolescents qui sont forcément avec des déséquilibres. Qu’est-ce qu’on peut faire pour rétablir cet équilibre, empêcher les dérives ? »
Des critiques sur les réponses sécuritaires
Laurent Zameczkowski, vice-président de la Peep, estime que les assistants d’éducation ne sont « pas là pour assurer des opérations de sécurité » sur France info. Pour Sud Education, « ce drame terrible met au jour à quel point les assistant.es d’éducation sont en première ligne dans les établissements scolaires, pourtant elles et ils sont maintenu.es dans la précarité par leur employeur l’Education nationale ». Pour de nombreux syndicats et parents, ce drame soulève des questions sur les moyens et la politique de sécurisation des établissements.
La secrétaire nationale du SNES Sophie Vénétitay met en garde sur la récupération politique du sujet des violences et de la sécurité des établissements : « Sans polémique, sans récupération, en étant à la hauteur du drame… Il y a un sujet sur la façon dont on sécurise un établissement scolaire, mais sérieusement, sans récupération politique. »
Une communauté éducative traumatisée : fouiller, surveiller… ou éduquer ?
L’émotion est immense parmi les personnels et les élèves. Une cellule psychologique a été immédiatement mise en place. L’équipe éducative est profondément choquée par la brutalité de ce geste. Sophie Vénétitay (Snes-FSU) exprime sa colère et sa tristesse interrogée par France info : « Une immense douleur. L’Éducation nationale est endeuillée. Les AED font un travail éducatif, jamais ils ne devraient se retrouver à être en position de vigile d’un établissement, jamais ils ne devraient être exposés à des dangers devant l’établissement. »
Le débat est relancé : comment protéger l’école sans la transformer en zone sécuritaire ? Si les mesures de contrôle se multiplient, elles semblent insuffisantes à enrayer un phénomène plus profond. Et c’est même Bruno Retailleau, le ministre de l’intérieur qui l’affirme : « Il y a une première leçon : la réponse ne peut pas être seulement sécuritaire puisqu’il y avait des gendarmes aux portes de l’établissement. »
Comment faire pour que l’Ecole soit un lieu de protection face aux tensions qui traversent la société ? C’est à cette question cruciale que doivent répondre les responsables politiques. Les infirmières scolaires, les psychologues de l’éducation nationale et les assistantes sociales manifestaient ce mardi 10 juin pour dénoncer les mesures des Assises de la santé scolaire déconnectées des besoins et du terrain avec des revendications pour des moyens au service de la santé et du soin des élèves : leur message « assez de blabla ».
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Djéhanne Gani
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