3e samedi de mobilisation : le mouvement anti-passe prend de l’ampleur

Une foule nombreuse et hétéroclite a défilé le 31 juillet contre la « dictature sanitaire ».

Plus de 200 000 personnes ont manifesté le 31 juillet. L’hétérogénéité et l’atmosphère parfois confusionniste de la mobilisation risquent de profiter à l’extrême droite.

Pour son troisième samedi consécutif, la mobilisation contre le passe sanitaire n’a pas faibli, témoignant de l’enracinement de cette nouvelle colère dans le paysage sociopolitique français. Ils étaient, selon le ministère de l’Intérieur, 205 000 dans toute la France – dont 15 000 à Paris – à défiler contre le projet de loi samedi 31 juillet, contre 160 000 le samedi d’avant. Ce qui confirme que l’opposition prend de l’ampleur.

Icon VideoEn vidéo Les témoignages que nous avons recueillis dans le principal cortège parisien

Trois cortèges différents à Paris

Si la défense de la « liberté » et la lutte contre ce qui est vécu comme une « dictature sanitaire » sont le mot d’ordre un peu partout, le mouvement anti-passe reste cependant caractérisé par sa diversité, tant politique que sociologique. On y retrouve certes des groupes progressistes opposés au passe et au licenciement sanitaires mais non à la vaccination, dont des syndiqués CGT, des insoumis ou encore le NPA. Mais aussi des primo-manifestants qui refusent toute étiquette, jusqu’à des militants « antivax » par complotisme, en passant par une extrême droite aux relents antisémites qui cherche à noyauter le tout. Symbole de cette hétérogénéité, trois cortèges différents se sont constitués à Paris. L’un est parti de Montparnasse à l’appel de l’ex-FN Florian Philippot, tandis qu’un collectif de gilets jaunes a organisé sa propre marche en partance du 17e arrondissement.

Comment faire vivre les revendications légitimes et progressistes ?

La journée a été marquée sporadiquement par des scènes de violence, à Paris et en région. Dans la capitale, des heurts ont éclaté entre la police et certains membres du cortège, tandis que deux femmes journalistes de l’AFP ont été la cible d’insultes et de crachats. Mais c’est à Montpellier (Hérault) qu’une scène filmée par le Midi libre a particulièrement suscité l’émoi. En marge du cortège, une poignée de manifestants s’en sont pris à un pharmacien et aux quelques patients qui attendaient un test antigénique devant une tente de dépistage du Covid. Aux cris d’ « assassins » et « collabos », ces quelques anti-passe ont détérioré la tente, forçant les soignants à démonter le dispositif. Cinq centres de vaccination ont été vandalisés en France depuis le mois de juin.

Dans ce contexte, et même s’il ne s’agit que d’une minorité très bruyante, comment faire vivre les revendications légitimes et progressistes contre le passe ? En effet, il instaure une inégalité de fait entre citoyens sur des bases de suspicion médicale, en lieu et place d’une vaccination obligatoire qui, quoi qu’on en pense, aurait rendu tous les Français égaux devant la même règle. Et son extension au monde du travail risque de faciliter les licenciements abusifs et les mises à pied, en plus de contrevenir au secret médical.

Une difficile ligne de crête

C’est pourtant bien l’extrême droite qui, profitant du confusionnisme ambiant (dans les manifs se côtoient des comparaisons du pré­sident avec Hitler, des références à l’étoile jaune, la thèse du complot juif derrière la pandémie…), prospère sur la mobilisation. Florian Philippot, en mal d’électorat depuis son départ du FN, en 2017, s’est reconstitué une audience d’abord en incarnant le mouvement antimasque, puis antivax, désormais anti-passe. Se félicitant du succès de sa mobilisation du 31 juillet, l’ex-eurodéputé a menacé de préparer « quelque chose d’immense, un coup de force phé­noménal » samedi prochain si le Conseil constitutionnel ne censurait pas, le 5 août, la loi qui met en place le passe sanitaire.

Face à cette mainmise de l’extrême droite sur une grande partie du mouvement, les forces de gauche sont devant un difficile dilemme : faut-il continuer à manifester ? Il faut à tout le moins clarifier. Une difficile ligne de crête, en témoigne le jeu d’équilibriste de Jean-Luc Mélenchon, qui, après avoir exhorté les insoumis qui iraient manifester à « ne pas être confondus » avec ceux qui osent des comparaisons indignes avec l’apartheid ou la Shoah, répète que les marches de ce samedi « doivent être comprises et respectées ».

 


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