Nombre de candidats ne disposent pas d’une machine politique ou de sondages flatteurs leur permettant d’emprunter facilement. D’autres peuvent compter sur de riches donateurs. Une situation qui interroge notre système de financement de la vie politique.
«En campagne, le candidat, faute de moyens, sillonne la France en TER. » Le « JDD » met ainsi en exergue les faibles moyens financiers dont dispose pour l’instant le candidat à l’élection présidentielle Arnaud Montebourg, en l’accompagnant sur l’un de ses déplacements. À cinq mois du scrutin, c’est loin d’être anodin… Car, si la présidentielle suscite des vocations, toutes n’iront pas jusqu’au bout. Et une raison majeure, au-delà de la question des 500 parrainages d’élus nécessaires à valider une candidature, est essentiellement financière.
Des configurations très différentes
Tous les candidats à l’élection présidentielle ne sont pas sur un pied d’égalité. D’un président de la République sortant qui n’a pas grands soucis à se faire de ce point de vue aux « petits » candidats de gauche, en passant par les formations politiques traditionnelles et solidement implantées, les configurations sont très différentes. Le candidat d’un parti disposant de nombreux parlementaires disposera d’un financement public plus important que les autres.
De même, un Emmanuel Macron de 2017, sans parti derrière lui mais avec de solides soutiens dans le monde financier, a pu passer d’une candidature quasi dissidente à la conquête du pouvoir. La droite, bien qu’affaiblie depuis l’avènement du macronisme, reste une famille politique importante, disposant d’une majorité au Sénat et de nombreux élus locaux. Le Parti socialiste, malgré sa déroute de 2017, gère encore des régions, des grandes villes et d’autres collectivités territoriales.
Un RN endetté
« Pour l’instant, à ce stade de notre campagne, nous n’avons pas encore besoin de beaucoup d’argent », reconnaît Laurence Rossignol, porte-parole d’Arnaud Montebourg. La question se posera davantage dans quelques semaines, selon elle, lorsqu’il faudra entrer dans le dur de la campagne présidentielle. D’autres s’inquiètent davantage. C’est le cas de la candidate d’extrême droite Marine Le Pen, en difficulté dans les sondages depuis la montée de son concurrent Éric Zemmour.
Pour la campagne de 2017, le FN s’était financé auprès de banques russes pour un montant de 9 millions d’euros. Entre-temps, la loi pour la confiance dans la vie politique, votée en 2017, est venue interdire le recours à des financements auprès de banques non européennes. Le RN rembourse toujours ses dettes, estimées en 2018 à 24 millions d’euros, ce qui lui complique la tâche pour obtenir de nouveaux prêts. La candidate d’extrême droite a écrit au président de la République pour lui demander un « débat parlementaire » sur les difficultés de financement rencontrées par son parti et d’autres candidats, et s’est vu opposer une fin de non-recevoir.
L’objectif des 5 %
Au-delà de la santé financière d’un mouvement politique ou d’un candidat, c’est la perspective de son résultat électoral qui pèse lourd. « La meilleure garantie, c’est de faire 5 % et d’être remboursé », confirme Laurence Rossignol. Ce qui pénalise justement les plus petits candidats ne bénéficiant pas de bons sondages. À gauche, Arnaud Montebourg et le communiste Fabien Roussel sont donnés pour l’instant en dessous de cette barre fatidique.
Le candidat du PCF, lui, pourra tout de même s’appuyer sur un parti qui compte encore de nombreux élus locaux qui reversent au parti, mais aussi sur une organisation militante encore solide. « Nous avons fait le choix de nous appuyer sur la souscription », explique ainsi le mandataire financier de Fabien Roussel, Jérémy Bacchi. Le PCF entend en effet lever 1 million d’euros par ce biais. « C’est un gage de liberté vis-à-vis du secteur bancaire », assure-t-il pour justifier ce choix de financement. Les fédérations du PCF y jouent donc un rôle de premier plan, tandis qu’elles auront aussi pour objectif de contracter des prêts pour 1 million d’euros également.
Les banques rechignent à prêter
La souscription, c’est aussi le choix de la France insoumise, qui compte ainsi rassembler 2,5 millions d’euros d’ici au mois de décembre. « On s’appuie à la fois sur des financements publics et sur les dons », confirme Manuel Bompard, directeur de campagne de Jean-Luc Mélenchon. Pour les dernières semaines de la campagne, les insoumis envisagent tout de même le recours à un emprunt. « En 2017, nous avions connu quelques difficultés sur ce plan, reconnaît Manuel Bompard. Il y avait alors encore beaucoup d’incertitudes, et les banques se montraient très prudentes. Tant qu’il n’y a pas de dynamique incontestable, elles rechignent à prêter trop tôt. » Le candidat insoumis avait finalement réalisé un score de 19,6 %, assurant son remboursement. Mais il est aujourd’hui donné beaucoup plus bas par les sondeurs, entre 8 et 10 % des intentions de vote…
Quelle aide publique ?
« Il y a autant de situations que de partis politiques », résume Jérémy Bacchi. Ce qui pose des questions d’ordre démocratique sur le système de financement de la vie politique. Jusqu’en 2019, la proposition d’une « banque de la démocratie » était débattue. Elle a finalement été rejetée par l’actuelle majorité et remplacée par un « médiateur du crédit » chargé de faciliter les négociations entre les banques et les équipes de campagne. Mais c’est insuffisant pour beaucoup. « Je ne sais pas si c’est une banque de la démocratie ou un pôle public bancaire qui pourrait jouer ce rôle », explique le mandataire financier de Fabien Roussel. Manuel Bompard rappelle que « les pouvoirs du médiateur du crédit sont extrêmement faibles » et qu’il vaudrait mieux créer un « établissement public ou, au minimum, une garantie des prêts par l’État conditionnée à un parrainage citoyen ». Le directeur de campagne fixe ce seuil de parrainages à 150 000 signatures, chiffre suggéré par le rapport Jospin sur la modernisation de la Ve République.
« Dans tous les cas, il faut une aide de la puissance publique, sinon ce sont les gros partis avec beaucoup d’élus et de ressources qui sont favorisés », insiste Manuel Bompard. « Il faut trouver un juste point d’équilibre entre le financement des partis politiques et la nécessité d’une expression démocratique dans le pays », résume également Jérémy Bacchi. Pour le dirigeant communiste, on doit au final « éviter à la démocratie d’être sous une influence quelconque, de la part des industriels comme des banques ».
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