Nottin renvoie Blanquer à ses chères études

L’Humanité a décidé de suivre la confrontation entre le candidat de la Nupes et l’ex-ministre de l’Éducation nationale, à Montargis, dans le Loiret. Suite de ce feuilleton avec une rencontre électrique, sur fond de bilan déplorable de la Macronie, tant pour l’école que pour le pouvoir d’achat.

Montargis (Loiret), envoyé spécial.

Selon une célèbre réplique, l’important, ce n’est pas la chute mais l’atterrissage. Envoyé depuis Paris dans la 4e circonscription du Loiret, Jean-Michel Blanquer en a fait l’expérience lors de sa première rencontre avec Bruno Nottin, samedi, sur le marché du centre-ville de Montargis, où l’un est candidat de la majorité sortante, l’autre de la Nupes. L’instant fut bref, aux alentours de 11 h 30, sous le ciel bleu. Saisissant l’occasion, le communiste adresse directement à l’ex-­ministre de l’Éducation nationale les bonnes phrases qui l’ont fait gagner en notoriété sur Twitter . « Ça se passe bien, votre parachutage ? dégaine-t-il d’emblée. Dans la circonscription, ce sont 11 postes qui ont été supprimés dans les collèges en trois ans, les professeurs et les parents d’élèves, tous sont contre vous ! » « J’ai fait plus en cinq ans qu’aucun de mes prédécesseurs », essaie de justifier Jean-Michel Blanquer, qui porte dans son projet l’implantation d’un IUT dans le Montargois. « Cela fait trente ans que les communistes locaux se battent pour cela, vous pompez notre projet », poursuit Bruno Nottin. Et d’ajouter : « Vous savez que vous êtes dans une ville qui compte 33 % de pauvres ? Vous dites vouloir agir, mais vous n’y connaissez rien. »

Le candidat macroniste cherche une réponse, celle qui fuse est digne d’un mauvais sketch. « J’ai un grand-oncle qui vient d’ici », dit-il, sourire en coin et petite tape sur l’épaule de son adversaire. « Mais moi, j’y suis né et j’y ai toute ma famille », ­rétorque le candidat de la Nupes. C’en est trop pour Jean-Michel Blanquer, qui, casquette sur la tête, s’extirpe de la conversation en lâchant à son concurrent : « Vous êtes élu depuis vingt ans et rien n’a été fait pour les habitants. » Bruno Nottin siège au conseil municipal de Montargis depuis 2008. Mais dans l’opposition. Un détail omis par l’ex-ministre. Le communiste est surtout un militant de terrain. Ce samedi, il était, deux bonnes heures avant cette rencontre, devant le Super U de la Chaussée, un quartier populaire coupé par l’ex-nationale 7 du centre-ville, commerçant et plutôt aisé. L’initiative prend des airs de permanence pour l’élu, interpellé par des habitants en proie aux galères du quotidien et que les annonces du gouvernement sur une future loi « pouvoir d’achat » ne rassurent pas.

« Pas d’APL, 500 euros de loyer et une mutuelle de plus en plus chère », résume Maryse. « Qu’est-ce que je suis allée me faire c… quarante ans à l’usine, si c’est pour être dans cette situation une fois à la retraite ? » poursuit-elle. Dernièrement, elle a dû contracter un crédit : « Certains le font pour acheter une voiture, moi, c’est pour me refaire les dents. » « C’est pour des gens comme vous que l’on se bat, regardez, dans le programme, nous proposons de rem­bourser les soins à 100 % », lui répond le candidat, qui défend également l’augmentation du Smic à 1 500 euros ou encore le blocage des prix des produits de première nécessité. « Je n’ai, au mieux, que 100 euros pour vivre chaque mois. Heureusement, je peux compter sur une amie qui m’offre un repas de temps à autre », raconte aussi Martine. Également à la retraite, cette habitante, baguette à la main, s’émeut : « Voici mon repas chaque midi depuis huit jours, accompagné d’un bout de fromage.  »

« Les préoccupations sont celles de gens privés d’argent »

« Je ne suis pas sûre que Jean-Michel Blanquer connaisse le prix d’une baguette de pain », assure une autre Martine, trésorière locale du Secours populaire français. L’antenne montargoise a vu les familles ­bénéficiaires de l’aide alimentaire croître de près de 30 % entre 2020 et 2022, des suites du Covid. Elles sont désormais 257 à recevoir de l’aide alimentaire deux fois par semaine. « Le burkini ? Personne n’en parle ici… Les préoccupations sont celles de gens privés de vacances, de loisirs, d’argent… » poursuit-elle. D’ailleurs, l’antenne du Secours populaire prépare les vacances à venir. Martine tient à monter le dossier d’une famille de huit enfants qui doit se contenter de 3,50 euros pour vivre quotidiennement. « Ils vont bénéficier d’une semaine aux Sables-d’Olonne », se réjouit-elle.

« Si on quitte la ville, les campagnes sont, elles aussi, populaires. La moindre augmentation du prix de l’essence est vécue comme un choc », assure Bruno Nottin. Marine Le Pen, arrivée en tête avec 52 % des voix au second tour, tire principalement ses électeurs de ces campagnes oubliées. En 2018, deux ronds-points aux entrées de l’agglomération montargoise ont été investis par des gilets jaunes. Séverine et Jacques en étaient. Elle, ancienne aide-soignante reconvertie comme comptable, n’arrivait plus à subvenir à ses besoins avec les 800 euros qu’elle touchait. Lui est un chômeur de longue durée. Tous deux se sont engagés dans la campagne du candidat de la Nupes. « Au fond, avec Bruno, nous avons les mêmes objectifs de justice sociale : augmenter les salaires et rétablir l’ISF », insiste Jacques, prêt à interpeller à son tour l’ex-ministre comptable du bilan d’Emmanuel Macron.


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