Victime d’un attentat d’extrême droite, abandonné par l’État, le maire de Saint-Brévin démissionne

NDLR de MAC: communiqué du PCF Saint-Brévin : Nous demandons en conséquence la dissolution immédiate de tous ces groupes d’extrême-droite violents

Après l’incendie criminel de sa maison en mars, par des militants fascistes mobilisés contre un projet de déplacement d’un centre d’accueil pour demandeurs d’asile, Yannick Morez a décidé de démissionner de son mandat de maire et de quitter la ville, mercredi. Il n’a jamais reçu de protection policière ni le moindre soutien du ministre de l’Intérieur depuis cet attentat.

Dans une lettre postée sur les réseaux sociaux, le maire de Saint-Brévin dénonce l’inaction de l’Etat après l’incendie de sa maison.

Un stigmate effrayant du risque terroriste de l’extrême droite et du refus du gouvernement à le combattre. Yannick Morez est contraint de fuir la ville dont il est maire depuis 2017, un mois et demi après l’attentat dont il a été victime dans sa maison. À Saint-Brevin-les-Pins (Loire-Atlantique) le projet de déplacement d’un centre d’accueil pour demandeurs d’asile (Cada) près d’une école a suscité plusieurs manifestations de militants d’extrême droite s’y opposant, encore le 29 avril dernier. Des mobilisations peu suivies mais violentes. Le maire a ainsi été menacé de mort et, le 22 mars au matin, un cocktail molotov a été jeté devant sa maison, brûlant deux voitures et une partie de la bâtisse.

Face au risque pour sa vie, Yannick Morez a envoyé sa démission au préfet mardi : « C’est une décision prise en famille. Ni ma femme, ni mes trois enfants ne souhaitent que je continue après l’attaque que nous avons subie. Nous avons failli mourir. » Mercredi soir, il a annoncé publiquement, sur la page Facebook de la ville, qu’il quittait aussi Saint-Brévin, où il vit depuis 32 ans : « J’ai pris cette décision pour des raisons personnelles, notamment suite à l’incendie criminel perpétré à mon domicile et au manque de soutien de l’Etat. »

Une lettre à Olivier Véran restée sans réponse

Les protections policières qu’il a sollicitées à la suite de l’attentat ne lui ont pas été accordées et jamais le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin, trop occupé à dénoncer les « éco-terroristes » et l’« extrême-gauchisme », ne lui a témoigné le moindre soutien. Deux jours après l’incendie, Yannick Morez a envoyé une lettre à Olivier Véran, porte-parole du gouvernement : « Ce contexte (de violences et de menaces, NDLR), nous l’avons dénoncé à de multiples occasions, demandant un soutien de l’État, des forces de l’ordre et de la justice. Nous ne l’avons pas eu. Au contraire. Nous avons été choqués par les propos et la minimisation des faits opérés par le sous-préfet et le commandant de gendarmerie, se retranchant derrière la liberté d’expression. » Le 6 avril, dans Envoyé spécial, il expliquait que malgré un échange téléphonique avec Olivier Véran, « il ne s’est rien passé depuis, je ne suis pas sous protection. » Il a alors exprimé à nouveau son sentiment d’abandon, rappelant en outre que le Cada était un projet de l’État et non de la municipalité : «  Derrière, aux maires de se débrouiller », se désole-t-il.

Pour Élisabeth Borne, qui a réagi jeudi matin en marge de son déplacement à la Réunion, ce service minimum était suffisant : « La ministre chargée des collectivités territoriales, Dominique Faure a contacté ce maire, ça montre de notre volonté de mieux protéger les maires, de répondre plus efficacement quand il y a des menaces. » Se réveillant lui aussi quand il est trop tard, Emmanuel Macron  « redit » (comme s’il l’avait exprimé avant, donc) sa « solidarité » avec le maire démissionnaire de Saint-Brévin, après des attaques « indignes ».

Après avoir fait l’autruche, l’exécutif souhaite rencontrer l’édile

« L’inaction de l’État est une honte absolue. Qu’attend-il pour agir ? » a réagi Fabien Roussel, secrétaire national du PCF. À l’heure où nous écrivons ces lignes, Gérald Darmanin n’a toujours pas réagi à la démission de Yannick Morez. La secrétaire d’État à la Jeunesse, Sarah El Haïry, l’a fait par un tweet dans lequel elle se contente d’estimer que « les menaces envers les élus doivent être le combat de tous ». Sans un mot concernant l’extrême droite, qu’Aurore Bergé, a également eu tout le mal du monde à évoquer jeudi matin sur France Inter. La cheffe de file des députés Renaissance a noyé la gravité du terrorisme d’extrême droite et de la démission de Yannick Morez : « La question plus large, c’est celle de la protection de nos élus, ces insultes et menaces que la quasi-totalité des élus de la République reçoivent ».

« On va continuer à renforcer notre action pour intervenir plus tôt et pouvoir soutenir les maires, repérer les difficultés et mieux les accompagner face à des violences dont ils peuvent parfois être victimes », a ajouté Élisabeth Borne. Elle conclut sa sortie en renvoyant dos à dos extrême droite et extrême gauche. « Cela montre qu’il y a une montée de l’extrémisme dans notre pays. Il faut qu’on soit très vigilants sur ce sujet. L’extrémisme vaut des deux côtés », avant de proposer, tout de même, de recevoir l’édile à son retour de la Réunion.

Pour rappel, le terrorisme est inexistant à l’extrême gauche, comme l’a rappelé l’historien Nicolas Lebourg en avril dans l’Humanité : « Il n’y a pas, ou peu, à gauche, d’attaques sur les personnes, et pas de tentation terroriste comme à l’ultradroite avec des projets d’attentats meurtriers. »

Mercredi soir, à l’Assemblée nationale, les députés ont rendu hommage au maire de Saint-Brevin-les-Pins. Le Rassemblement national, qui avait localement pris part aux premières manifestations contre le Cada, avant de prendre ses distances, ne s’est pas levé, dans l’hémicycle, ont déploré les élus de la Nupes.


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