Le 1er mai 2026, tous les agent.es du ministère seront affilié.es à la complémentaire santé obligatoire de la MGEN. Si l’accord interministériel a été signé par la majorité des organisations syndicales, des points de vigilance et des critiques de cette réforme imposée par l’employeur se font entendre par les syndicats en première ligne pour accompagner et former les personnels. La prise en charge de l’optique et des frais dentaires sont notamment dans le viseur.

L’accord signé par la majorité des syndicats : insuffisances, progrès

« Cette réforme confirme que les gouvernements successifs s’appuient sur le renforcement du rôle des assurances complémentaires pour faire reculer la place, le rôle et les principes de la Sécurité sociale » dénonce la secrétaire générale du Snes-FSU Sophie Vénititiay.

« La FSU n’a depuis [la signature de l’accord] eu de cesse de chercher à limiter les effets négatifs de cette réforme », elle souligne que les négociations ont « permis d’empêcher que chaque ministère mette en œuvre cette réforme sans aucun contrôle et avec une participation employeur et une couverture encore plus faible. La négociation et la signature de l’accord interministériel en santé de janvier 2022 a, par exemple, permis d’imposer un panier de remboursement relativement élevé et une négociation sur la prévoyance. Alors que le gouvernement n’en voulait pas, l’accord interministériel d’octobre 2023 a abouti à des améliorations statutaires pour l’invalidité des personnels titulaires et à une meilleure couverture des congés de grave maladie pour les non-titulaires. Cet accord a aussi imposé un cadre collectif pour une couverture prévoyance sans questionnaire de santé et sans tarification au risque. »

Sud Éducation a également signé l’accord. Selon le syndicat, « le cadre général de l’accord constitue un progrès pour un grand nombre de personnels qui seront mieux couverts ou avec un niveau de couverture équivalent à celui de l’offre référence de la MGEN, qui couvre actuellement un peu plus de 60 % des personnels du ministère ». Le syndicat souligne que l’adhésion obligatoire « permet de garantir la solidarité intergénérationnelle et la mutualisation entre les populations sans tarification à l’âge ». Il considère que « dénoncer cet accord ou s’en retirer serait tourner le dos au principe de solidarité entre les travailleurs et travailleuses ».

Mais Sud Éducation pointe plusieurs insuffisances. « La solidarité est entièrement assumée par les adhérent·es envers les enfants, les retraité·es, les contractuel·les et les petits salaires », explique le syndicat. Il réclame « que le ministère mette en place des mesures salariales pour aider les plus modestes à prendre en charge leurs cotisations et celles de leurs familles ». Le syndicat critique également que « la mutuelle fa[sse] sa marge sur les cotisations des enfants, alors qu’elle a été capable de proposer un tarif plus avantageux et soutenable pour les familles dans d’autres ministères ».

Des syndicats critiques et attentifs

« Dura lex sed lex ! » : La FSU refuse la réforme d’un régime obligatoire et plaide pour une gestion 100 % Sécurité sociale. Selon elle, la réforme « rompt les solidarités inter et intra générationnelles, aggrave la marchandisation de l’assurance maladie et conforte un système dual coûteux, inefficace et inégalitaire ». Elle défend le remboursement à 100 % par la Sécurité sociale des soins prescrits qui seul permet «un accès égalitaire aux soins » explique la Secrétaire Générale du SNES-FSU Sophie Vénétitay. Elle dénonce aussi l’obligation d’adhérer à un contrat choisi par l’employeur.

Au Se-UNSA, Elisabeth Allain-Moreno précise : « Nous avons signé l’accord mais cela ne nous empêche pas de veiller à une mise en œuvre claire et aidante pour les collègues et de continuer à exiger une amélioration des prises en charge, car selon les catégories de personnels, certains y perdent ».

Des critiques sur la prise en charge de l’optique et du dentaire

Si la CFDT et  la Fep-Cfdt voient un « progrès historique » pour les agents du ministère et une avancée sociale dans un droit supplémentaire car tous.tes les agent.e.s bénéficieront d’une complémentaire santé financée en partie par l’employeur comme dans le secteur privé. Elle dit rester vigilante, notamment sur une meilleure prise en charge dentaire et optique dès la première option, ainsi que la mise en place de trois options de garanties progressives. Contrairement à d’autres secteurs du ministère, les agent·e·s de l’Éducation nationale ne bénéficient ni de trois options ni d’une couverture dentaire et optique dès la première option. Ont été privilégiés d’autres postes, comme l’hospitalisation, la psychologie.

La secrétaire nationale de la CFDT Laetitia Aresu rappelle que quasi toutes les organisations syndicales ont signé cette avancée. Elle souligne « la mutualisation forte et des mécanismes de solidarité, l’avenir nous dira si cela devient un acquis social ». Pour elle, le mécontentement se cristallise, à raison, sur l’option 1 et le « besoin d’améliorer ces postes dentaires et optiques ».

Un système encore à ajuster : la question des ayants droit

D’après plusieurs sources, pour un agent.e seul.e, la couverture est avantageuse du fait de la participation de l’employeur.

« Preuve de la dimension inégalitaire de cette réforme, elle pèse lourdement sur les plus précaires, les bas salaires, notamment les AESH, même s’il existe quelques rares cas de dispense » dénonce la secrétaire générale du Snes-FSU Sophie Vénétitay, pour qui « le calcul forfaitaire est inégalitaire et anti-redistributif ». Pour elle, « cette réforme entraîne un recul considérable des solidarités, notamment envers les retraité·es, qui ne vont pas bénéficier de la participation financière de l’employeur ».

Karine Fromont du Se-Unsa confirme aussi que la question des ayants droit est le point épineux, comme celle des familles monoparentales. Elle aussi tempère sur les critiques, relativise les « 3000 témoignages reçus par le député insoumis, – 0,2% des agents » glisse-t-elle. Elle compare aussi avec d’autres ministères comme celui de la transition écologique pour qui la hausse des cotisations serait de 14%. La pyramide des âges des professeurs est vieillissante, et les cotisations encadrées pour les retraité.es précise la CFDT. « Sur les ayants droit pour lesquels le régime est facultatif, les cotisations pourraient peser pour des familles aux ressources modestes, mais encore une fois, sans données précises, ça reste une hypothèse. Il faut attendre l’effectivité du régime au 1er mai pour avoir une photographie réelle des remboursements et donc du niveau de couverture, des restes à charge » complète Laetitia Aresu.

Le ministre a annoncé des analyses à venir. La problématique de l’éventuel surcoût pour certaines familles devrait être évoquée lors de la prochaine commission paritaire de pilotage et de suivi le 12 janvier. La MGEN et tous les syndicats soulignent la mise en place d’accompagnements comme de formations à destination des agents pour les informer et former sur les changements et les démarches.

Djéhanne Gani

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