2022. La vague #MeToo prête à déferler sur la campagne présidentielle

Le 10 juillet 2020, à Paris, manifestation de militantes féministes contre la nomination du nouveau ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, et du nouveau ministre de la Justice, Éric Dupond-Moretti. Yaghobzadeh Alfred/ABACApresse.com

 

Quatre ans après #MeToo, les féministes tentent, tant bien que mal, de faire émerger leur cause à l’occasion du scrutin d’avril 2022. Une manifestation d’ampleur doit se dérouler le 20 novembre, à Paris.

Le mouvement #MeToo va-t-il bousculer la campagne présidentielle ? À six mois de l’élection, les féministes veulent se faire entendre des postulants à l’Élysée. #NousToutes et une myriade d’organisations, dont le collectif Stop harcèlement de rue ou le Planning familial, appellent à manifester, le 20 novembre, à Paris et partout en France, pour dénoncer les violences sexistes et sexuelles dans la société, mais aussi interpeller les candidats. « Aujourd’hui, ce n’est plus possible de faire l’impasse sur la lutte contre les violences faites aux femmes, contre les enfants, d’autant plus qu’elles touchent une grande partie de la population », mesure Marylie Breuil, membre du comité de pilotage #NousToutes.

Cette militante regrette que les questions féministes peinent encore à s’imposer au cœur des débats, dominés par les thèmes traditionnels de la droite et de l’extrême droite. Il y a bien eu la séquence Sandrine Rousseau, mais la candidate EELV à la primaire écologiste a perdu d’un cheveu face à Yannick Jadot, jugé peu crédible sur ces sujets. C’est en tout cas l’avis de l’association Osez le féminisme ! qui a passé au peigne fin l’engagement féministe des anciens candidats, plaçant le député européen en avant-dernière position. Au fil de la campagne, l’association va continuer à scruter, analyser, les déclarations des postulants en lice pour l’Élysée. « On souhaite qu’ils fassent des propositions sérieuses », insiste Céline Piques, porte-parole de l’association.

« Il est temps d’engager un virage culturel global »

La gauche a-t-elle intégré le combat contre les violences de genre au sein de ses thèmes de campagne ? La lutte contre les violences faites aux femmes, absente en 2017, fait désormais partie des préoccupations de certains candidats à l’élection présidentielle, témoignant d’une prise de conscience de ces enjeux. « À la France insoumise, nous avons pris les différentes vagues de #MeToo très au sérieux, assure Clémence Guetté, coresponsable du programme l’Avenir en commun. La question des violences fait partie des thèmes qu’on a renforcés pour prendre en compte la libération de cette parole. »

Au PCF, Hélène Bidard, membre de la direction nationale, prône une « transition féministe » de la société, sur le modèle de la transition écologique. « #MeToo a montré qu’il était grand temps d’engager un virage culturel global », explique-t-elle.

Ces positions de principe pourraient se traduire dans une loi-cadre en cas d’élection. Concrètement, Jean-Luc Mélenchon (FI) et Fabien Roussel (PCF) s’engagent à débloquer un milliard d’euros pour lutter contre les violences faites aux femmes, reprenant une revendication clé des associations féministes. Cette somme servirait à financer la formation des magistrats, policiers, mais aussi à créer des places d’hébergement d’urgence, ou encore à mieux protéger les enfants des violences.

Quant à Anne Hidalgo, rare femme candidate avec la représentante de Lutte ouvrière (LO), Nathalie Arthaud, et Marine Le Pen (RN), elle se distingue pour le moment de ses rivaux à gauche. Dans son discours à Lille, l’émancipation des femmes est essentiellement envisagée sous le prisme de l’égalité salariale. Si son équipe assure travailler plus largement sur le sujet des violences faites aux femmes, très peu de propositions émergent pour le moment en dehors de cette seule question. En attendant, le PS fait de l’égalité salariale un axe important de sa campagne. « Je ne laisserai pas faire cette situation qui fait qu’il y a encore 20 % d’écart entre les salaires des hommes et des femmes. C’est indigne d’une démocratie comme la nôtre ! » a-t-elle déclaré à France Info. Sans pour autant s’engager à réduire le temps de travail, une mesure importante pour limiter les temps partiels subis par les femmes.

Une campagne pour interpeller les candidats sur des propositions

Ses concurrents Fabien Roussel et Jean-Luc Mélenchon défendent la revalorisation des métiers majoritairement occupés par des femmes (qualifications, grilles salariales). L’insoumis pioche également dans le programme de 2017 en proposant à nouveau la création de 500 000 places supplémentaires en crèche. « La plupart des candidats ont un programme, mais j’ai l’impression qu’ils restent très en surface, qu’ils ne creusent pas les sujets féministes », déplore Tiffany Coisnard, membre du bureau national des Effronté-e-s.

Pour nourrir leur réflexion, les partis politiques de gauche vont continuer à consulter les associations de terrain. À ce titre, Osez le féminisme ! va lancer, en janvier 2022, une campagne pour interpeller les candidats sur une série de propositions. Parmi lesquelles, investir massivement dans la lutte contre les violences de genre, abolir la prostitution, mais aussi revaloriser les salaires des métiers féminins dans le secteur du commerce et de la santé, ou encore garantir un accès égal à l’IVG sur tout le territoire. Céline Piques attend des engagements très forts des candidats à la présidentielle. « On ne peut plus en rester à de simples déclarations d’intention. il faut juste de la volonté politique, les solutions sont connues depuis longtemps. » Il reste quelques mois à la gauche pour s’en emparer radicalement.

 


Deux députées pour un « budget sensible au genre »

Deux élues du groupe EDS, Albane Gaillot et Paula Forteza (ex-LaREM), déplorent que « tous les moyens n’ont pas été mis en œuvre » pour faire avancer l’égalité entre les femmes et les hommes, « grande cause » du quinquennat. Elles proposent de mettre en œuvre de nouvelles mesures dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances 2022. Notamment une « budgétisation sensible au genre » et le financement de « mesures de rattrapage » en faveur de l’égalité entre hommes et femmes sur les salaires, les politiques de santé et la lutte contre les violences faites aux filles et aux femmes.


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