« Choc des savoirs » et groupes de niveau : l’arrêté publié au Journal officiel, les syndicats dénoncent des mesures « iniques »

Après plusieurs semaines de cacophonie entre Gabriel Attal et sa ministre de l’Éducation nationale Nicole Belloubet, l’arrêté imposant la création de groupes de niveau au collège en français et en mathématiques a été publié au Journal officiel, le 17 mars. Malgré une souplesse affichée, les syndicats continuent de dénoncer des « mesures iniques » et appellent à faire de la mobilisation nationale du 19 mars l’occasion d’un rejet massif du « choc des savoirs ».

L’expression a disparu des textes, mais l’esprit est bien le même, acté noir sur blanc dans le Journal officiel. Après plusieurs semaines de cacophonie ministérielle, sur fond de désaccords entre le premier ministre et sa ministre de l’Éducation nationale Nicole Belloubet, et malgré le rejet unanime des syndicats, la réforme dite des « groupes de niveaux » au collège voulue par Gabriel Attal a été officialisée dans la nuit du samedi 16 mars au dimanche 17 mars.

Ce nouvel arrêté prévoit ainsi, dès la rentrée prochaine, un regroupement des élèves de sixième et de cinquième dans des « groupes (…) constitués en fonction des besoins des élèves identifiés par les professeurs » en français et en mathématiquesLa généralisation aux élèves de quatrième et troisième est prévue pour la rentrée 2025. Exit donc la notion explicite de « groupes de niveau », qui a cristallisé la colère des représentants syndicaux. Mais, dans les faits, le résultat sera le même, l’arrêté prévoyant quelques lignes plus loin que « les groupes des élèves les plus en difficulté bénéficieront d’effectifs réduits ».

Tour de passe-passe lexical

Un tour de passe-passe qui n’a pas trompé les syndicats. Le Snes-FSU, syndicat le plus représentatif du second degré, qui a réagi dès la parution de l’arrêté, continue de pointer « des mesures iniques », comme lors du Conseil supérieur de l’Éducation (CSE) du 8 février où leurs amendements à la réforme dite « choc des savoirs », dans laquelle s’inscrit cette mesure, avaient été systématiquement rejetés par l’exécutif.

L’organisation voit dans les concessions et la souplesse affichées, à savoir notamment la possibilité offerte aux directions d’établissements de permettre, durant une période allant d’« une à dix semaines dans l’année » de sortir de ce dispositif et de regrouper les élèves dans leur classe de référence pour ces enseignements, un nouvel exemple de « dérégulation ».

« Comme à chaque réforme néolibérale, l’organisation est renvoyée au local. Derrière la « souplesse » affichée, c’est en fait une dérégulation supplémentaire, chaque établissement pouvant adopter une organisation différente des autres », s’est insurgée l’organisation dans ce communiqué. Et le syndicat de pointer les multiples entraves rendant inapplicable une telle « souplesse » : « Comment organiser des retrouvailles d’élèves en classe entière s’il y a des groupes surnuméraires ? », « Quel enseignement dispenser face à des élèves qui auront vu des méthodes et des éléments du programme différents selon leur groupe ? », « Quel sort sera réservé aux professeurs des regroupements surnuméraires sans élèves pendant ces périodes ? »

Au-delà de la méthode, les syndicats dénoncent l’esprit même de cette mesure, derrière les circonvolutions lexicales. Dans les colonnes de L’Humanité, le sociologue Pierre Merle, spécialiste des politiques éducatives et de la ségrégation scolaire, l’avait ainsi résumé : « Les groupes de niveau sont un équivalent moderne du bonnet d’âne. »

Classe préparatoire à la classe de seconde

D’autres mesures ont également été déclinées dimanche dans le Journal officiel. À commencer par un décret sur le redoublement, qui sera désormais, dans les écoles primaires (écoles maternelles et élémentaires), « décidé » par le conseil des maîtres et non « plus proposé » aux familles, qui devront opposer un recours dans un délai de quinze jours en cas de refus.

Autre « innovation », concernant cette fois le secondaire : la création d’une « classe préparatoire à la classe de seconde », destinée à « consolider les acquis du cycle des approfondissements » pour les élèves qui n’auront pas eu leur brevet en fin de troisième (dont l’obtention conditionnera désormais le passage en seconde).

Autant de mesures qui, selon les syndicats, ne feront qu’accroître le gouffre séparant les élèves des classes populaires et ceux des classes plus favorisées. À la veille de la mobilisation nationale prévue le 19 mars, le Snes-FSU appelle les personnels de l’Éducation nationale à exprimer de façon massive leur opposition « à cette réforme et ses conséquences désastreuses pour les élèves et les personnels ».

 


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