Pourquoi une loi pour introduire la notion de non-consentement dans la définition du viol ?

Réponses de la rapporteure de la mission parlementaire Marie-Charlotte Garin

Un rapport parlementaire sur la définition pénale du viol vient d’être rendu. Dans la foulée, le Conseil d’État a été saisi pour avis sur la proposition de loi transpartisane qu’il porte et qui pourrait arriver au Parlement fin mars. Rencontre avec la députée Marie-Charlotte Garin (NFP), coautrice de ce texte avec Véronique Riotton (Ensemble pour la République).

 

Après un an de travaux, la délégation aux droits des femmes estime qu’une nouvelle loi pourrait lancer un changement de paradigme dans notre société pour éliminer les violences de genre. Marie-Charlotte Garin, co-rapportrice de la mission parlementaire et députée écologiste, porte ce texte.

Comment votre mission parlementaire a-t-elle conclu qu’il fallait introduire la notion de consentement dans la définition pénale du viol ?

Nous avons fait un constat, celui de l’absence de notion de consentement dans la loi, alors qu’il irrigue toute la procédure judiciaire. Au final, on se retrouve avec un consentement qui peut être instrumentalisé par les personnes mises en cause, comme on l’entend régulièrement lors des audiences.

Nous avons également constaté une culture du viol omniprésente dans notre société, à tous les âges, dans tous les territoires et toutes les classes sociales. Le procès des agresseurs de Gisèle Pelicot en a été l’illustration parfaite. Une impunité règne sur le viol, puisque très peu d’auteurs sont condamnés, et 73 % des victimes ne portent pas plainte.

De plus, nous ne sommes pas en conformité avec nos engagements internationaux, et notamment avec la Convention d’Istanbul, texte le plus protecteur en termes de droits des femmes à l’international, dont nous sommes signataires.

Que peut apporter un changement de loi ?

Nous voulons donner un outil supplémentaire aux juges. Ceux que nous avons pu auditionner nous ont dit : « Nous nous retrouvons confrontés à des victimes, que nous croyons, mais nous sommes dans l’incapacité de caractériser la violence, la menace, la contrainte ou la surprise. » C’est-à-dire les quatre critères qui définissent le viol actuellement dans le Code pénal français.

En modifiant la loi, nous voulons ouvrir la définition pour permettre aux juges de pouvoir poursuivre plus souvent, dans les cas qui échappent à la violence, la contrainte, la menace et la surprise, pour leur permettre de mieux appréhender les situations de sidération, d’emprise.

Nous voulons donner un outil pour systématiquement aller interroger la personne mise en cause, lui demander dans quelles conditions et quelles mesures raisonnables elle a pris pour s’assurer du consentement de la victime présumée.

Cela viendra apporter un élément de clarification dans le droit, pour permettre à la justice d’être plus efficace sur les violences sexistes et sexuelles, de mieux reconnaître aussi les vulnérabilités des victimes. Elles ne sont pas toujours en capacité de se débattre, de dire non, il faut bien que ce soit reflété dans la loi. Aujourd’hui, un acte sexuel, une pénétration sexuelle non consentie, c’est un viol, cela doit donc transfigurer dans la loi pour réaffirmer quelles sont les valeurs que notre société protège. Nous devons vraiment passer à une culture du consentement.

Que répondez-vous aux opposants, féministes, avocates, qui s’inquiètent que cette notion de consentement se retourne contre la victime ?

Il ne s’agit pas juste de dire que c’est un acte sexuel non consenti, point. Une écriture comme ça, au minimum, serait même contre-productive, et nous nous y opposerions. Nous proposons de modifier la loi selon quatre critères très précis. Nous voulons déjà faire entrer la notion de non-consentement dans la définition pénale.

Nous conservons les quatre critères actuels, en poussant le juge à aller interroger les notions de vulnérabilité, et à regarder les circonstances environnantes. Parce qu’évidemment, si vous dites oui avec un pistolet sur la nuque, tout le monde comprend bien que ce n’est pas un consentement qui a été donné librement.

Nous avons été très attentives aux craintes des féministes, notamment sur la modification de la loi, et nous proposons une rédaction d’équilibre, qui prend en compte ces craintes, pour protéger au mieux les victimes de demain et celles d’aujourd’hui.


En savoir plus sur Moissac Au Coeur

Subscribe to get the latest posts sent to your email.

Donnez votre avis

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.