À la veille de sa rencontre avec Emmanuel Macron, Lucie Castets adresse aux Français une lettre cosignée avec les représentants du Nouveau Front populaire. La candidate à Matignon affirme que « l’inaction du président de la République est grave et délétère ».
Lucie Castets est prête, et elle le répète aux Français. Dans une lettre publiée ce jeudi 22 août, la candidate du Nouveau Front populaire à Matignon et les représentants de l’union de la gauche affirment une fois de plus leur capacité à gouverner. À la veille de leur rencontre avec le président de la République, ce message est adressé « aux électeurs qui se sont mobilisés massivement » autour du NFP, et à ceux « qui n’ont pas voté pour nous, comme à ceux qui n’ont pas voté du tout ».
Majorité absolue ou non, l’heure est à l’action. « Qui refusera l’augmentation du pouvoir d’achat ? – Les parlementaires rendront compte de leurs votes, et les citoyennes et citoyens en seront témoins », écrivent-ils. Lucie Castets, Fabien Roussel (PCF), Marine Tondelier (Les Écologistes), Manuel Bompard (FI) et Olivier Faure (PS) rappellent que leur coalition est arrivée en tête et qu’ils ont pour devoir de « former un gouvernement, chercher des accords au sein du Parlement et [de] se mettre au travail. »
Inventer une nouvelle manière de gouverner
Les signataires rappellent leurs principales propositions. Ils réaffirment vouloir œuvrer à « améliorer la vie des concrètement et rapidement la vie des Françaises et des Français » : augmentation du pouvoir d’achat, revalorisation des salaires et du SMIC, réparer l’hôpital public et l’éducation nationale…
Le NFP entend également porter « une diplomatie au service de la paix », « pour faire échec à la guerre d’agression de Vladimir Poutine (…), obtenir le cessez-le-feu à Gaza et la libération des otages ». Ils comptent agir « pour la reconnaissance immédiate » de la Palestine.
Le Parlement doit « retrouver la main sur son calendrier et discuter sereinement des projets et propositions de loi qui lui seront soumises. Les partenaires sociaux devront être écoutés et respectés. Des nouvelles formes d’association des acteurs de terrain, des élus locaux, des associations et de toutes et tous ceux qui font vivre notre démocratie au quotidien, devront être imaginées. »
Depuis les législatives anticipées, Emmanuel Macron ne dit mot. Celui-ci « tergiverse plutôt que de tirer les conséquences de ces élections. Combien de temps allons-nous continuer comme si rien ne s’était passé au début de l’été ?, écrivent les auteurs de la lettre, L’inaction du président de la République est grave et délétère ». Ensemble, ils proposent d’inventer une nouvelle manière de gouverner sous la Ve République en marquant « une rupture nécessaire » avec les « politiques passées ».
Plus d’un mois après la démission de Gabriel Attal, les représentants de l’union de la gauche sont conviés vendredi 23 août à 10 h 30 par l’Élysée pour échanger avec Emmanuel Macron. Quant à la droite républicaine et les macronistes, ils sont attendus dans l’après-midi et les représentants du Rassemblement National et Éric Ciotti ont rendez-vous lundi.
Le contenu de la lettre du Nouveau Front populaire
Chères Françaises, chers Français,
Emmanuel Macron nous a conviés le 23 août à l’Elysée pour un échange auquel nous nous rendrons, ensemble. Nous souhaitons, avant ce rendez-vous, nous adresser directement à vous pour vous dire ce que nous comptons faire pour le pays dans les prochains mois et prochaines années, et comment.
Au mois de juillet dernier, vous vous êtes massivement mobilisés dans les urnes pour refuser l’arrivée de l’extrême droite au pouvoir et rompre avec les politiques menées depuis sept ans. Nous vous en remercions.
Et depuis ? Rien. Le président de la République tergiverse plutôt que de tirer les conséquences de ces élections. Combien de temps allons-nous continuer comme si rien ne s’était passé au début de l’été ?
Vous avez placé le Nouveau Front populaire en tête du scrutin, sans donner à quiconque de majorité absolue. Ce résultat nous oblige toutes et tous, et en premier lieu oblige celui qui l’a provoqué.
« Politiques injustes et imposées »
L’inaction du président de la République est grave et délétère. Parce qu’elle met en évidence son souhait de prolonger les sept dernières années de politiques injustes et imposées de façon autoritaire. Parce qu’elle donne l’impression que le vote ne servirait à rien, que tout cela ne serait qu’un jeu d’échecs institutionnel.
Nous mesurons l’ampleur de la défiance exprimée aujourd’hui partout dans le pays, par vous, citoyennes et citoyens, responsables de syndicats, d’entreprises, d’associations, de collectifs, élus locaux. À force de renoncements, de décisions imposées contre la volonté du peuple, comme la réforme des retraites, beaucoup d’entre vous ne croient plus en la politique. Ces sentiments nourrissent la montée de l’extrême droite que nous avons combattue et continuerons à combattre.
Le choix du prochain gouvernement aura des conséquences très concrètes sur la vie quotidienne de chacune et chacun, selon qu’il poursuivra la cure d’austérité ou qu’il décidera de réinvestir dans nos services publics. Les parents d’élèves ont besoin de savoir si nous nous donnerons les moyens de mettre un enseignant devant leur enfant, et de redresser l’école publique ; les salariés ont besoin de savoir quand sera revalorisé leur salaire, après plusieurs années d’inflation ; les habitants si leur logement pourra faire l’objet d’une rénovation thermique et si l’adaptation aux bouleversements climatiques sera accélérée ; les patients s’ils seront accueillis aux urgences en cas de besoin et si l’hôpital aura les moyens de fonctionner ; nos enfants, si nous leur offrirons une planète habitable où grandir et s’épanouir.
« Rupture nécessaire »
Sur tous ces sujets, une rupture est nécessaire avec les politiques passées. Elle a été demandée par les électrices et électeurs. C’est ce à quoi s’attèlera un gouvernement du Nouveau Front populaire dès les premières heures de sa nomination.
Aux électeurs qui se sont mobilisés massivement autour du Nouveau Front populaire, nous disons : nous nous engageons à bâtir une société plus juste, plus solidaire à mesure de la capacité contributive de chacun, dans laquelle le travail sera mieux rémunéré, la pénibilité mieux reconnue, les services publics réhabilités et à mettre en œuvre dès maintenant la bifurcation écologique indispensable pour notre avenir à tous. Une société dans laquelle chacun pourra avoir une vie digne.
Aux électeurs qui n’ont pas voté pour nous, à droite ou à l’extrême droite, comme à ceux qui n’ont pas voté du tout, nous disons : oui, nous souhaitons rompre avec la logique d’un camp contre un autre et travaillerons ensemble pour construire l’avenir du pays et financer les services publics.
Nous sommes convaincus que nous pourrons améliorer concrètement et rapidement la vie des Françaises et des Français, et que l’absence de majorité absolue ne nous en empêchera pas. Qui refusera l’augmentation du pouvoir d’achat que nous proposons avec la revalorisation des salaires et de la rémunération des fonctionnaires ? Qui acceptera de voir perdurer la situation catastrophique de l’hôpital public avec les services d’urgence fermés en plein été ? Qui se résoudra à une nouvelle rentrée où tant de professeurs manqueront face à nos enfants dans les écoles, les collèges et les lycées ? Sur toutes ces questions clefs, les parlementaires rendront compte de leurs votes et les citoyennes et citoyens en seront témoins.
« Manière de gouverner inédite »
Nous en sommes conscients : nous devons inventer une manière de gouverner inédite sous la Ve République. Le Parlement devra, de façon transparente, retrouver la main sur son calendrier et discuter sereinement des projets et propositions de loi qui lui seront soumises. Les partenaires sociaux devront être écoutés et respectés. Des nouvelles formes d’association des acteurs de terrain, des élus locaux, des associations et de toutes et tous ceux qui font vivre notre démocratie au quotidien, devront être imaginées.
Nous porterons également une diplomatie française au service de la paix car nous ne pouvons pas accepter que les différends se règlent par la force en Europe et dans le monde. Nous œuvrerons ainsi pour faire échec à la guerre d’agression de Vladimir Poutine, défendre la souveraineté du peuple ukrainien et œuvrer au retour à la paix. Nous agirons pour obtenir le cessez-le-feu immédiat à Gaza et la libération des otages. Et puisque le Président de la République lui-même avait affirmé que la reconnaissance de l’État de Palestine n’était pas un “tabou pour la France”, nous agirons pour sa reconnaissance immédiate, au côté de l’État d’Israël, sur la base des résolutions de l’ONU pour avancer vers une paix juste et durable.
Enfin, nous ramènerons la paix civile en Nouvelle-Calédonie en revenant sur la réforme du corps électoral et en rouvrant un processus de discussion, dans l’esprit des accords de Nouméa et de Matignon.
Nous sommes convaincus que la France peut encore incarner les valeurs de justice, de liberté, d’ouverture qui ont fait son histoire. Les discours de haine l’abîment et ne lui ressemblent pas.
C’est ce dont nous ferons part au président de la République le 23 août prochain, lorsque nous le rencontrerons tous ensemble, pour défendre l’espoir qui s’est levé le 7 juillet dernier et qui ne doit pas être déçu.
Vous vous êtes exprimés il y a deux mois déjà, il est plus que temps maintenant de passer à l’action : comme dans toutes les démocraties parlementaires, la coalition arrivée en tête doit pouvoir former un gouvernement, chercher des accords au sein du Parlement et se mettre au travail.
Nous y avons travaillé tout l’été. Nous sommes prêts.
Lucie Castets, candidate du Nouveau Front populaire à Matignon
Manuel Bompard, coordinateur de la France insoumise
Olivier Faure, Premier secrétaire du Parti socialiste
Fabien Roussel, secrétaire national du Parti communiste français
Marine Tondelier, Secrétaire nationale des Écologistes
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