Après la publication de l’affiche, en partenariat avec l’Humanité, de la marche des Fiertés du 28 juin prochain, l’extrême droite a nourri une violente polémique sur les réseaux sociaux, ayant même pour conséquence le retrait des subventions de la région Île-de-France par Valérie Pécresse. L’équipe de l’Inter LGBT, organisatrice de la manifestation, dénonce l’instrumentalisation opérée par le camp réactionnaire et rappelle l’urgence de défendre les droits des LGBTI.

© Villette Pierrick/ABACA
L’affiche de l’inter-LGBT, le collectif d’associations en charge d’organiser la marche des fiertés qui se déroulera à Paris le 28 juin, dévoilée en partenariat avec l’Humanité, est la cible d’un harcèlement violent de la droite et de l’extrême droite. Dès mercredi 3 juin, plusieurs membres du Rassemblement national (NR) se sont insurgées.
« Femme voilée, homme blanc martyrisé et caricaturé en facho, soutien à la Palestine, alors que les homos, bis et trans y sont massacrés… voilà les marqueurs d’extrémistes qui se moquent des violences bien réelles que subissent les homos en France comme tant d’autres Français », écrit sur X (ex-Twitter) le porte-parole du parti d’extrême droite Jean-Philippe Tanguy. « Cette marche des fiertés est la déambulation de la honte et de la haine de tout ce qui n’est pas l’extrême gauche. Rappelons que le seul pays de la région qui permet d’aimer librement s’appelle Israël », ose de son côté Julien Odoul, député de l’Yonne. Marguerite Sterne, souvent accusé de transphobie, a elle aussi accusé l’inter LGBT de représenter « la mise à mort d’un homme ».
Les conséquences de la polémique
Cette polémique, montée en épingle par la droite et l’extrême droite, a des conséquences bien concrètes. « La Région Île-de-France, qui contribue à la sécurisation de la marche, refuse d’être associée à cette affiche qui incite à la violence avec son cadavre renversé ! », affirme Valérie Pécresse, présidente de la Région Île-de-France, précisant avoir demandé le retrait du logo et de la subvention de l’administration. Pour rappel, la candidate à l’élection présidentielle de 2022 avait activement soutenu et participé à la Manif Pour tous en 2012. Aurore Bergé, ministre de l’Égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations, a elle aussi demandé à la Dilcrah (Délégation interministérielle à la lutte contre le racisme, l’antisémitisme et la haine anti-LGBT +) de faire retirer son logo de l’affiche.
En réponse, de nombreuses personnalités et organisations se sont élevées contre les pressions de la droite et de l’extrême droite. Il s’agit d’une « attaque violente contre l’existence même de la Marche des Fiertés de Paris, et par là-même contre les droits et libertés des personnes LGBTI », estime la France Insoumise Paris dans un communiqué. « Valérie Pécresse appartient aux rangs de l’internationale réactionnaire », regrette de son côté le groupe des élus de la région Île-de-France de la gauche communiste, écologiste et citoyenne. « L’internationale réactionnaire menace les personnes LGBTI + et la riposte doit être unitaire », écrit l’UNEF sur X (ex-Twitter).
Pour l’Humanité, l’équipe de l’inter-LGBT revient sur cette polémique, dénonçant l’instrumentalisation opérée par le camp réactionnaire et rappelant l’urgence de défendre les droits des LGBTI.

L’inter-LGBT est attaqué sur les réseaux sociaux par la droite, l’extrême droite, mais aussi par la Dilcrah, ou encore par Beit Haverim, groupe juif gay et lesbien de France. Est-ce que vous vous attendiez à l’ampleur de cette polémique ?
Nous nous attendions ce que ça arrive, notamment parce que le mot d’ordre de la mobilisation est la lutte « contre l’international réactionnaire ». Par ailleurs, nous connaissons les méthodes de harcèlement de l’extrême droite, en identifiant en meute nos partenaires sur les réseaux sociaux. Cependant, nous n’avions pas anticipé l’ampleur des attaques. Nous sommes surtout particulièrement choqués que des partenaires, notamment la Région île de France, se désolidarisent de notre mouvement. Ce qu’il se passe avec cette affiche montre l’urgence de défendre les droits des LGBTI.
Valérie Pécresse a en effet annoncé faire retirer le logo de la région île de France de l’affiche de la Marche des Fiertés, mais aussi retirer vos subventions. Comment vous comprenez ces décisions ?
L’utilisation du levier financier témoigne d’une volonté de silenciation de notre mouvement et de nos revendications. Une partie du spectre politique, ici Valérie Pécresse, présidente de la région Île-de-France, cède à l’international réactionnaire qui nous attaque et contre qui nous nous battons. Il est important de rappeler que les luttes LGBTI et les marches des fiertés ont commencé par les émeutes de Stonewall (en 1969, pendant lesquelles les manifestants dénonçaient un raid de la police à New York, dans le quartier de Greenwich Village, N.D.L.R.).
L’extrême droite vous reproche de représenter sur l’affiche une femme voilée, un « homme blanc étranglé », un « soutien au Hamas »… Que leur répondez-vous ?
Nous sommes particulièrement choqués par l’instrumentalisation d’un certain nombre de signes sur l’affiche. Alors qu’un tote bag représente des drapeaux hongrois et bulgare (pays dans lesquels les marches des fiertés sont interdites, NDLR), l’extrême droite y voit un drapeau palestinien. Alors qu’un personnage représentant le camp réactionnaire (il porte un tatouage d’une croix celtique, symbole de la « suprématie blanche », NDLR) en inconscient, ils y voient le cadavre d’un homme blanc. Même le brassard bleu que porte une vieille dame, symbole de la langue des signes et qui représente l’inclusion des personnes handicapées, est dévoyé.
Nous sommes révoltés et outrés de l’instrumentalisation de symboles, pourtant très clair, par le camp réactionnaire, mais aussi par un certain nombre de personnes du milieu LGBTI. Sous prétexte de se complaire dans des polémiques qui affaiblissent nos droits et notre communauté, ils oublient de regarder vers le vrai ennemi.
La tenue de la Marche des Fiertés, le 28 juin prochain, vous inquiète-t-elle ?
Nous répondrons présents : nous ne changerons ni notre parcours, ni notre affiche, ni notre mot d’ordre. Les menaces sur la communauté LGBTI ne datent pas d’hier. Cela nous pose tout de même la question de la sécurité de la marche, mais nous sommes prêts. Si nous nous sentons soutenus par nos alliés, nous savons pertinemment que l’extrême droite ne s’arrêtera pas là. Nous travaillons avec la préfecture et l’ensemble de nos équipes de sécurité, et nous n’avons pas de doute que cela se passera très bien. Nous avons besoin d’une mobilisation massive et continue. Protéger les droits LGBTI est l’affaire de tous, et pas seulement des personnes concernées.
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