Une multinationale française que l’auteur moissagais n’hésite pas à passer au scalpel pour en dévoiler les ficelles.
Il y a bien des années qu’il a déposé ses valises avec sa famille au cœur de la cité uvale, et aujourd’hui, à l’âge de la (relative) sagesse, il l’observe du haut des coteaux. L’écrivain Jean Songe (à la ville Yannick Bourg), d’un abord affable et discret, manie pourtant une plume à la précision diabolique qui sied si bien au roman noir. Fin lettré, connaisseur hors pair de la musique anglo-américaine, l’homme fut également un agitateur culturel au sein de la Zone d’Activités Poétiques (ZAP) qu’il avait initiée il y a quelques années avec quelques amis artistes du cru, et un redoutable bluesman frapadingue avec son groupe Le Vieux Flingue.
Mais derrière l’auteur, l’artiste, le saltimbanque, le musicien, se cache le citoyen. Jean Songe a participé à l’aventure TEMS lors des dernières municipales, et est un membre très actif de l’association O Amala qui œuvre à Moissac au soutien à l’intégration des résidents roms bulgares. Cette citoyenneté s’exprime aussi à travers sa plume.
Si Jean Songe n’a pas la prétention d’être un lanceur d’alerte ni Robin des bois, il a pourtant dénoncé il y a quelques années la dangereuse fuite en avant de l’industrie du nucléaire (« Ma vie atomique », paru en 2016 chez Calmann-Levy), après un hallucinant travail de recherches documentaires sur des sources autorisées.
Aujourd’hui il remet le couvert aux éditions du Seuil, avec « Sodexo la gloutonne ». On est à mille lieues du pamphlet, tant l’auteur aborde la multinationale tentaculaire avec finesse (et parfois humour), et puis à la lecture on se rend bien compte que cette saga familiale à la française n’est que le prétexte pour éveiller les conscience sur ce capitalisme « glouton » qui s’auto-dévore, qui finira par en mourir, et la planète avec.
Les économistes néo-classiques postulaient à la fin du XIXe siècle que le marché était équilibrant si les agents économiques gardaient une « taille » raisonnable. Tout l’inverse ici avec la déraison de ces groupes gigantesques, dont fait partie Sodexo. Le texte est extrêmement documenté, impeccablement sourcé, et le talent stylistique de l’auteur fait le reste. Un must de la rentrée littéraire.
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