À trente jours du premier tour, le candidat communiste a réuni 5 000 personnes, jeudi 10 mars, pour son meeting parisien. Il y a annoncé un « plan spécial pour le pouvoir d’achat », une préoccupation largement partagée par les participants dont certains venaient pour la première fois.
Plus d’une heure avant le meeting de Fabien Roussel, jeudi 10 mars, la foule est déjà nombreuse devant le cirque d’hiver, à Paris. Chasuble sur le dos et casquette CGT sur la tête, Valérie a peur de ne pas pouvoir rentrer. « Avec une dizaine d’amis syndicalistes, on s’était promis d’adhérer si les communistes présentaient un candidat et un programme », raconte cette déléguée du personnel à l’Armée du Salut. Dans une campagne d’abord confisquée par les thèmes identitaires de l’extrême droite et désormais bousculée par la guerre en Ukraine, elle en est persuadée : « si la gauche veut se faire entendre, elle doit s’emparer du social ». Comme elle, ils sont plus de 5000, selon le décompte de l’équipe de campagne, à avoir fait le déplacement. « Il y a un an, personne ne l’aurait pensé », s’amuse Fabien Roussel qui fait un saut à l’extérieur en cours de discours pour en livrer une partie en live aux nombreux participants qui n’ont pas pu entrer et suivent la soirée sur écrans géants.
Avec des intentions de vote oscillant entre 3,5 et 5 %, le communiste est une des surprises de cette campagne. « Le personnage est audible, le programme est intéressant », résume Aléna. Avec son ami Arnaud, tous deux étudiants en droit, elle s’apprête à vivre son premier meeting. Lui vient d’une famille de tradition gaulliste et pointe « des écarts de richesses qui se sont creusés depuis les 30 glorieuses, au point que les grosses fortunes ont vu leurs patrimoines doubler pendant l’année du Covid ». « La France des jours heureux c’est celle de la justice sociale », assure le candidat, un peu plus tard, dans une salle chauffée à blanc par les prises de paroles de ses soutiens. Et face aux conséquences de l’invasion Russe, le député plaide pour « un plan spécial pour le pouvoir d’achat » qui « s’attaquera aussi aux profiteurs de guerre ». Au programme : taxation à 100 % des profits du CAC 40 pour deux ans – c’est le « roussellement des dividendes », sourit-il, blocage des prix des céréales, suppression des niches fiscales ou encore cotisation de 10 % sur les revenus financiers… « Juste cette mesure, c’est 30 milliards pour la sécu », précise-t-il.
Arnaud écoute attentivement et se déclare convaincu : « Sans Fabien Roussel, j’aurais voté Blanc ». À l’issue du meeting, près de la buvette, Bruno est, lui, emballé. Ce militant communiste, venu du Loiret, tance une gauche « qui s’était perdue dans des dérives libérales et qui ne parlait que des sujets sociétaux. Non pas qu’ils ne soient pas importants, mais le cœur de la gauche a toujours été de parler d’abord du travail ». Fabien Roussel « pose les contours d’une gauche de rupture, avec comme objectif la reconquête des classes populaires », abonde l’eurodéputé GRS Emmanuel Maurel, invité à s’exprimer sur scène aux côtés des autres formations (MRC, RG, NGS) qui comme la sienne ont fait le choix de soutenir le député du Nord. Cette ex-figure de l’aile gauche du PS salue aussi une candidature qui « la première a eu le souci d’une souveraineté énergétique, industrielle, alimentaire… au point d’être moquée pour cela ! » Le prétendant à l’Élysée en fait d’ailleurs un point clé de son discours : « La droite a mis la France sur le Bon Coin ! Ils ont signé des traités de libre-échange à tour de bras, tacle le communiste, et aujourd’hui ils reviennent la bouche en cœur en nous parlant de souveraineté ! Je n’ai pas peur de ce mot, redonnons-lui tout le sens progressiste », assume Fabien Roussel, qui propose pour cela de nationaliser la BNP, la société générale et Axa, tout en « augmentant le budget de l’État de 120 milliards d’euros dès 2023 ».
Parmi toutes les propositions que déroule le député du Nord contre « la vie chère », celle d’un revenu étudiant de 850 euros minimum trouve un écho particulier chez les nombreux jeunes venus au Cirque d’hiver. « Cela me permettrait simplement de pouvoir étudier, sans me préoccuper de comment remplir mon frigo », souligne Aléna, contrainte de travailler à temps partiel à côté de ses cours. « Mon fils n’a pas pu aller étudier à Metz, alors qu’il était accepté en L1 de biologie dans une faculté réputée pour son pôle d’excellence », déplore Valérie, la syndicaliste. « 400 euros juste pour un studio c’est 30 % de mon salaire et il n’avait le droit qu’à 100 euros de bourse », poursuit-elle. « Des millions de Français n’arrivent plus à vivre. Si la gauche veut se reconstruire, elle doit leur apporter des réponses, sans les juger », veut croire Bruno. À ce jeu-là, pour son directeur de campagne, Ian Brossat, le candidat communiste a toutes les cartes en main : « La première fois que j’ai rencontré Fabien Roussel, raconte-t-il, c’était sur le parking du Leclerc de Saint-Amand, au tout début des Gilets jaunes. Au bout de 5 minutes, il les avait conquis. Il va faire la même chose à la présidentielle. »
Déterminé à déjouer dans « la dernière ligne gauche » les scénarios prédits par les sondages, « la France des jours heureux ce sera celle des salaires revalorisés », martèle à la tribune Fabien Roussel, qui souhaite porter le SMIC à 1923 euros bruts, mais aussi instaurer un minimum retraite de 1 200 euros nets. Et pour Valérie, la salariée de l’Armée du salut, il y a urgence : « Au quotidien je vois des retraités qui le 10 du mois sont déjà démunis ».
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